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Émirats Arabes Unis

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 155 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains aux Émirats Arabes Unis en 2023.

Les autorités ont continué de restreindre indûment les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique. Les Émirats arabes unis n’ont pas respecté leurs engagements en matière de politiques de lutte contre le changement climatique. Les personnes migrantes travaillant en extérieur n’étaient toujours pas suffisamment protégées contre les chaleurs extrêmes de l’été. Les autorités ont maintenu en détention arbitraire 26 prisonniers d’opinion et ont empêché totalement certains prisonniers de communiquer avec leur famille ou sévèrement restreint ces communications. Un nouveau procès collectif visant plus de 80 Émiriens s’est ouvert.

CONTEXTE

Les Émirats arabes unis ont accueilli en février l’édition 2023 du Salon international de la défense (IDEX), où de nombreux États, dont Israël, la Russie et les États-Unis, se sont réunis pour vendre des armes.

Du 30 novembre au 12 décembre, le pays a organisé à Dubaï la 28e réunion annuelle de la Conférence des Parties à la Convention- cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), dite COP28. Il a désigné Sultan Al Jaber, directeur général de la compagnie pétrolière nationale ADNOC, comme président de cet événement, ce qui a donné lieu à un conflit d’intérêts.

LIBERTÉ D’EXPRESSION, D’ASSOCIATION ET DE RÉUNION

Les autorités ont maintenu en détention au moins 26 prisonniers d’opinion qui n’avaient fait qu’exprimer leurs convictions.

Tout au long de l’année, les services judiciaires d’Abou Dhabi ont mené une campagne sur les réseaux sociaux, dont le slogan était « Votre liberté s’arrête aux limites de la loi ». La législation émirienne prévoyait une peine obligatoire d’au moins 15 ans d’emprisonnement pour toute « atteinte à la réputation ou au prestige du président », ainsi que la réclusion à perpétuité pour la participation à une manifestation « ayant pour but de [...] troubler l’ordre public ».

Le gouvernement a déclaré en avril que des « espaces sûrs [seraient] aménagés pour permettre à toutes les voix de se faire entendre » lors de la COP28, mais il n’a rien fait pour modifier ses lois et ses politiques répressives.

Ni le secrétariat de la CCNUCC, ni les autorités des Émirats arabes unis n’ont rendu public l’Accord de pays hôte, c’est-à-dire le cadre juridique régissant la COP28. Les militant·e·s sur place ne pouvaient donc pas savoir de quelles protections ils pouvaient bénéficier en dehors de la zone bleue, contrôlée par les Nations unies, pour les actions menées et les propos tenus dans cette zone. Les limites imposées à la société civile dans la zone bleue ont été inhabituellement restrictives, tandis que, en dehors de cette zone, les interdictions et la criminalisation de toute dissidence prévues dans la législation émirienne demeuraient en vigueur, instaurant ainsi un climat d’intimidation.

En mai, le parquet fédéral a averti que toute personne qui prononcerait « des injures » à l’égard d’employé·e·s du secteur public ferait l’objet de poursuites. Cette infraction était passible d’une peine d’emprisonnement au titre du Code des infractions et sanctions.

DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN

En juillet, le gouvernement a annoncé une nouvelle contribution déterminée au niveau national améliorant l’objectif du pays en termes de réduction des émissions de carbone. Cependant, les actions et les politiques des Émirats arabes unis restaient insuffisantes pour permettre au pays de respecter son engagement de maintenir le changement climatique sous le seuil internationalement approuvé de +1,5° C par rapport aux niveaux préindustriels. Ainsi, l’ADNOC, l’un des plus grands producteurs mondiaux d’hydrocarbures, a annoncé des projets offensifs visant à accroître sa production de combustibles fossiles.

Les Émirats arabes unis demeuraient très vulnérables aux conséquences du changement climatique, telles que la pénurie croissante d’eau et les chaleurs caniculaires. Selon le Groupe d’experts intergouvernemental des Nations unies sur l’évolution du climat, la température humide (mesure de la chaleur plus globale que la température de l’air) devrait atteindre des niveaux extrêmes s’approchant du seuil physiologique d’adaptabilité humaine, voire le dépassant, dans la sous-région dont les Émirats arabes unis font partie.

DROITS DES TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS

Plus de 85 % de la population des Émirats arabes unis était constituée de personnes de nationalité étrangère, dont une majorité d’ouvriers et ouvrières.

Malgré l’intense chaleur en été, le pays disposait toujours des normes de sécurité les plus laxistes de toute la région du golfe arabique en matière de travail en extérieur. Les mesures de protection imposées par les autorités restaient limitées à une interdiction du travail physique à l’extérieur pendant seulement deux heures et demie par jour durant les trois mois d’été les plus chauds, alors que les données météorologiques montraient que les personnes travaillant en extérieur étaient exposées à de graves dangers pour leur santé dus à la chaleur au moins la moitié de l’année et pendant plus de deux heures et demie par jour.

À partir du mois d’octobre, les Émirats arabes unis ont imposé à l’ensemble des travailleuses et travailleurs du secteur privé de cotiser à un programme national d’assurance chômage. Beaucoup de personnes migrantes, qui constituaient la majorité des effectifs de ce secteur, sont donc devenues éligibles à des allocations de chômage. Néanmoins, les employé·e·s de maison étaient exclus de ce programme. Les Émirats arabes unis n’avaient toujours pas instauré la garantie d’un salaire minimum pour les personnes migrantes exerçant un travail domestique ou travaillant dans le secteur privé.

DÉTENTION ARBITRAIRE

Alors que 23 des 26 prisonniers d’opinion détenus uniquement pour avoir exercé leurs droits humains avaient terminé de purger leur peine d’emprisonnement à la fin de l’année, les autorités les ont laissés en prison au titre d’une loi autorisant leur maintien en détention pour une période illimitée afin de leur dispenser des « conseils pour combattre l’extrémisme ».

En mai, les autorités ont demandé à la Jordanie d’arrêter et d’extrader aux Émirats arabes unis Khalaf al Rumaithi, titulaire de la double nationalité émirienne et turque. Cet homme, qui figurait au rang des 94 accusés jugés lors d’un procès collectif en 2012 et 2013, vivait depuis une dizaine d’années en exil en Turquie, qui lui avait accordé l’asile et la nationalité. Le 7 mai, il s’est rendu en Jordanie afin de chercher une école arabe pour son fils, et il a été arrêté à son arrivée. Les services de sécurité jordaniens l’ont expulsé dix jours plus tard alors qu’un recours judiciaire contre son extradition était en attente d’examen (voir Jordanie). Khalaf al Rumaithi a été emprisonné dès son arrivée sur le territoire émirien et se trouvait toujours en détention à la fin de l’année.

Le 5 juin, des membres de la Sûreté de l’État ont arrêté Mansoor al Ahmadi, l’un des deux seuls des 94 accusés du procès collectif de 2012-2013 à avoir été libérés en 2021. Cet homme a été détenu au secret dans un lieu non révélé avant de comparaître le 7 décembre devant un tribunal, dans le cadre d’un nouveau procès collectif. Il avait précédemment été maintenu un an et demi en prison à des fins de « conseils » à l’issue de sa peine, puis avait été relâché après avoir fait des « aveux » filmés – une vidéo que les autorités n’ont pas rendue publique.

Le 7 décembre, pendant la COP28, les Émirats arabes unis ont ouvert un nouveau procès collectif de 84 accusés. Parmi eux figuraient des défenseurs des droits humains et des prisonniers d’opinion, dont Ahmed Mansoor et Mohamed al Roken, déjà détenus depuis plusieurs années pour « terrorisme ».

TORTURE ET AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS

Pour la septième année consécutive, les autorités ont maintenu Ahmed Mansoor à l’isolement pour une durée indéterminée. Il n’avait pas accès à des produits d’hygiène personnelle en quantité suffisante et n’était autorisé à recevoir que deux à trois visites de sa famille proche par an, ce qui allait à l’encontre de l’interdiction absolue de la torture en vertu du droit international.

DROITS DES PERSONNES DÉTENUES

Les autorités pénitentiaires ont continué de priver les personnes encore détenues à la suite du procès collectif des 94 Émiriens en 2012-2013 de toute communication avec les membres de leur famille vivant en exil. Par ailleurs, à partir de la fin du mois de juin, elles ont interdit à au moins 11 d’entre eux tout appel téléphonique avec leurs proches, même résidant aux Émirats arabes unis. Elles ont également sévèrement restreint les échanges de sept prisonniers libanais avec leurs familles au Liban, limitant parfois à deux minutes la durée des appels téléphoniques.

PEINE DE MORT

Le gouvernement émirien a gracié en mars Fidaa Kiwan, Arabe israélienne qui avait été condamnée à mort pour détention de stupéfiants en 2022.

De nouvelles sentences capitales ont été prononcées par les tribunaux au cours de l’année.

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