Tensions mondiales, incertitude et risques de conflit entre États dotés de l’arme nucléaire s’accentuent. Ces armes sont brandies comme une menace, augmentant ainsi le risque qu’elles soient utilisées de manière intentionnelle ou non.
Par Béatrice Fihn, Martin Butcher et Rasha Abdul Rahim
Alors que des experts estiment que le risque d’une explosion nucléaire n’a jamais été aussi réel depuis la Guerre froide, les armes nucléaires sont une nouvelle fois une priorité à l’ordre du jour de la communauté internationale.
L’horreur de l’arme nucléaire
Les armes nucléaires sont les armes les plus destructrices et les plus inhumaines jamais conçues. Leur utilisation provoquerait des souffrances inacceptables parmi les civils, tant en raison de l’ampleur des dégâts immédiats qu’elles causent, qu’en raison du risque de retombées radioactives.
D’après Setsuko Thurlow, une survivante d’Hiroshima : « Toute la ville a été aveuglée par l’éclair du bombardement nucléaire, écrasée par un souffle tel celui d’un ouragan et dévorée par une température de 4 000 degrés Celsius. En quelques secondes, un matin d’été radieux a été transformé en un sombre crépuscule, la fumée et la poussière s’élevant du champignon atomique, les morts et les blessés recouvrant le sol, demandant désespérément de l’eau et ne recevant aucun soin médical. »
Les conséquences humanitaires et environnementales d’un recours aux armes nucléaires seraient catastrophiques. Des frappes de cette nature bafoueraient inévitablement le droit international humanitaire et le droit international relatif aux droits humains. Pourtant ces armes ne sont toujours pas explicitement et universellement interdites.
Il incombe à tous les gouvernements d’éliminer ces dangers, conformément à leur obligation de veiller au respect du droit international humanitaire. Aujourd’hui, neuf États sont officiellement dotés de l’arme nucléaire et de nombreux autres continuent de compter sur ces armes à travers des alliances militaires.
Une occasion historique
Il est temps de négocier un traité interdisant l’utilisation, la détention, la production et le transfert d’armes nucléaires, car elles frappent sans discrimination. Aucun État, pas même les membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, ne devrait être doté de ces armes.
En octobre 2016, lors de l’Assemblée générale des Nations unies, une majorité d’États a accepté d’entamer des négociations quant à un nouveau traité contraignant, interdisant les armes nucléaires , qui s’inscrirait dans la continuité d’autres traités interdisant les armes chimiques et biologiques, les mines antipersonnel et les munitions à fragmentation.
Comme nous l’avons constaté avec ces armes, une interdiction internationale a permis la mise en place de normes solides interdisant leur utilisation et a accéléré leur élimination.
Les négociations ont commencé à New York le 27 mars pour une semaine et se poursuivront du 15 juin au 7 juillet. Elles auront pour but d’élaborer un instrument contraignant interdisant les armes nucléaires.
- Béatrice Fihn, directrice générale de la Campagne Internationale pour l’Abolition des Armes Nucléaires (ICAN)
- Martin Butcher, conseiller en politiques relatives aux armes et aux conflits à Oxfam International
- Rasha Abdul Rahim, chargée de campagne/conseillère sur le contrôle des armes à Amnesty International