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La Cour Internationale de Justice siégeant au Palais de la Paix, La Haye © STR / NurPhoto / NurPhoto via AFP
Qu’est-ce que la Cour Internationale de Justice ?
De la délimitation des frontières entre deux pays à la violation du droit international humanitaire et des droits humains dans le cadre de conflits armés, la Cour Internationale de Justice est l’organe international qui peut être saisi pour régler les différends entre les États. Ses décisions, qu’elles soient contraignantes ou consultatives, servent de boussole au droit international et à la résolution pacifique des conflits.
La Cour Internationale de Justice (CIJ) est l'organe judiciaire principal de l'Organisation des Nations Unies (ONU). C’est l’organe qui contribue à ce que les États puisse régler leurs différends de manière pacifique.
La CIJ a été instituée par la Charte des Nations Unies, signée en 1945, et a entamé ses activités en 1946 au Palais de la Paix à La Haye. Une fois qu’un État a ratifié la Charte des Nations Unies, il fait partie de la CIJ et peut alors amener des affaires devant la Cour.
La CIJ est née au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, guidée par le leitmotiv du “plus jamais ça”. L’ambition qui gouverne la CIJ réside dans le fait que les États puissent régler leurs différends par la voie pacifique et non plus par la guerre.
La Cour Internationale de Justice de plus en plus consultée pour les droits humains
La première affaire devant la CIJ a eu lieu en 1947. Jusqu’à ce jour, près de 200 affaires sont allées devant la Cour.
Récemment, la CIJ a été mis en lumière sur la scène internationale car elle est de plus en plus saisie sur des affaires en lien avec la situation des droits humains ou de conflits armés.
La première fois que la CIJ s’est intéressée à la question du génocide date de 1993. La République de Bosnie-Herzégovine avait alors déposé une requête contre la République fédérative de Yougoslavie au sujet d’un différend concernant une série de violations alléguées de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. La Cour a finalement adopté un arrêt en 2007 qui conclue que la Serbie avait manqué de se conformer à l’obligation de prévenir le crime de génocide qui a eu lieu en 1995.
Le 11 novembre 2019, la Gambie a saisi la CIJ au motif que le Myanmar ne respectait pas ses obligations au regard de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. Elle demandait notamment à la CIJ d’ordonner de toute urgence des « mesures conservatoires » pour empêcher la perpétration de tout acte pouvant s’apparenter ou contribuer au crime de génocide contre les Rohingyas et pour protéger ce peuple de nouvelles atrocités. Finalement, le 23 janvier 2020, la CIJ a ordonné au Myanmar de prendre des « mesures conservatoires » pour prévenir des actes de génocide envers les Rohingyas.
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Plus récemment, le 28 décembre 2023, l’Afrique du Sud a initié une procédure devant la CIJ contre Israël également sur la base d’une violation présumée de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. L’Afrique du Sud, dans la requête qu’elle a présentée à la CIJ, considère qu’Israël commet des actes à caractère génocidaire envers le peuple palestinien.
Même si ce type de procédure met des années avant d’obtenir une décision finale, la Cour peut rendre des mesures provisoires. Dans le cadre de la saisine par l’Afrique du Sud contre Israël, le 26 janvier 2024, la CIJ a rendu une décision demandant à Israël d’empêcher d’éventuels actes de « génocide » et de « prendre des mesures immédiates » pour permettre la fourniture « de l’aide humanitaire à la population civile de Gaza ».
“La décision rendue rappelle avec force le rôle crucial du droit international s’agissant de prévenir le génocide et de protéger toutes les victimes de crimes atroces. Elle envoie un message clair : le monde ne regardera pas en silence Israël poursuivre sa campagne militaire visant à décimer la population de la bande de Gaza et déchaîner la mort, le chaos et la souffrance contre les Palestinien·ne·s à une échelle sans précédent » a déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International.
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Les principaux enjeux de notre société contemporaine comme les questions de violation de droits humains, ou le dérèglement climatique sont des enjeux de droit international. La Cour Internationale de Justice va ainsi être de plus en plus amenée à se prononcer sur tous les aspects du droit international qui affectent notre société.
Le fonctionnement de la Cour Internationale de Justice
La CIJ est composée de quinze juges de nationalités différentes qui représentent collectivement les différentes régions du monde. Les juges sont élus pour neuf ans par l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité de l’ONU. Ils ne représentent pas leur gouvernement, ce sont des magistrats indépendants.
Les États font appel à cette Cour, saisie d’un litige, afin que les juges donnent leur interprétation sur un point de droit international. On ne parle pas de jugement d’un crime commis par un État mais de violation du droit international.
La différence entre la Cour Pénale Internationale (CPI) et la Cour Internationale de Justice (CIJ) :
La CPI est née suite à l’adoption du Statut de Rome de la Cour pénale internationale signé en 1998 et officiellement entré en vigueur en 2002. Son objectif est de mettre fin à l’impunité des auteurs des crimes les plus graves dans le monde entier.
Contrairement à la CIJ, elle ne juge pas la responsabilité des États mais celle des individus. Elle est compétente pour juger quatre types de crimes : crime de génocide, crime de guerre, crime contre l’humanité, et dans certains cas, crime d’agression.
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La CIJ a deux compétences :
Compétence contentieuse
Compétence consultative
La procédure contentieuse et ses arrêts contraignants
Dans le cadre de la procédure contentieuse, ce sont uniquement les États qui peuvent amener un différend à la Cour. Il s'agit à l'heure actuelle essentiellement des 193 États Membres des Nations Unies.
La Cour ne peut statuer sur un différend qu'à la demande d'un ou de plusieurs États. Elle ne peut se saisir d'office d'un litige puisque son Statut ne lui permet pas d'enquêter et de statuer à son gré sur les agissements d’États souverains.
Il faut en outre que les États en cause aient accès à la Cour et aient accepté sa compétence, c'est-à-dire qu'ils soient d'accord pour que la Cour examine le différend en question. C'est un principe fondamental du règlement des différends internationaux, les États étant souverains et libres de choisir les moyens de résoudre leurs différends.
La CIJ règle conformément au droit international, les différends d’ordre juridique entre les États sous la forme d’arrêts. Les arrêts de la CIJ dans la procédure contentieuse ont une valeur contraignante c’est-à-dire que les États doivent ensuite les appliquer.
En signant la Charte des Nations Unies, les États membres s’engagent à se conformer à la décision de la Cour dans tout litige auquel ils sont parties. De plus, comme une affaire ne peut être soumise à la Cour et tranchée par elle que si les parties ont d’une manière ou d’une autre consenti à sa compétence, il est rare qu’une décision reste inexécutée.
Si l’un des États en cause dans une affaire se plaint de ce que son adversaire ne se conforme pas à une décision de la CIJ, il peut s’adresser au Conseil de sécurité des Nations Unies, qui a le pouvoir de recommander ou de décider des mesures à prendre pour faire exécuter l’arrêt.
Les arrêts pris par la Cour produisent des effets au-delà des seules parties concernées. Les États observateurs vont également se conformer aux arrêts de la Cour pour éviter de se retrouver également condamnés s’ils ne respectent pas le droit international. L’impact d’un arrêt de la Cour est ainsi plus large que pour seules les parties concernées.
La procédure consultative :
Cette procédure a lieu lorsque ce sont les organes et les institutions spécialisées de l'Organisation des Nations Unies qui saisissent la CIJ et non les États.
Contrairement aux arrêts rendus dans le cadre de la procédure contentieuse, la procédure consultative se conclue sur des avis consultatifs qui n’ont pas de valeur obligatoire. Il appartient aux organes ou institutions qui les ont demandés de décider, par les moyens qui leur sont propres, de la suite à donner à ces avis.
Toutefois, certains instruments ou règlements peuvent prévoir que les avis consultatifs demandés à la Cour devront être acceptés comme décisifs.
Même s’ils ne sont pas contraignants, ces avis consultatifs sont d’une importance capitale car ils viennent éclairer l’interprétation à donner aux règles du droit international. Ils vont ensuite être réappropriés par les États afin de se conformer aux décisions de la CIJ pour éviter de se faire condamner par la suite.
Des avis consultatifs qui ont fait date dans l’histoire de la CIJ
Dans sa conclusion en 1996, la CIJ a notamment conclu que “l’utilisation de ces armes n’apparaît guère conciliable avec le respect des exigences du droit applicable dans les conflits armés”.
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La CIJ a estimé que l’édification du mur par l’armée israélienne sur le territoire de la Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est et dans ses environs, constituait une violation de la législation internationale relative aux droits humains et du droit international humanitaire. La Cour est également venue confirmer la bonne interprétation du droit, et a conclu que la Palestine est un territoire occupé depuis 1967.