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URGENCE PROCHE ORIENT

Exigez avec nous la protection sans condition des populations civiles

©AP/Press Association Images

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Corée du Nord

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 155 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Corée du Nord en 2023.

La liberté d’expression, qui était déjà fortement restreinte, a été encore réduite par une nouvelle loi prévoyant des sanctions sévères en cas d’utilisation ou de diffusion d’une langue « de style sud-coréen ». Des cas de travail forcé, auquel étaient notamment soumis des enfants, ont cette année encore été signalés. La politique gouvernementale contribuait à l’insécurité alimentaire persistante et la population n’avait pas suffisamment accès aux soins de santé. Des personnes ayant critiqué le gouvernement étaient toujours détenues arbitrairement dans des conditions déplorables, et le sort réservé à des Nord-Coréen·ne·s renvoyés de force par la Chine suscitait de vives préoccupations.

CONTEXTE

Les frontières du pays, fermées depuis janvier 2020 en raison de la pandémie de COVID-19, ont rouvert partiellement avec la reprise, en août, des services de transport de passagers par train, autobus et avion vers et depuis la Chine. Cependant, les autorités ont, semble-t-il, fortifié davantage la frontière et autorisé les gardes-frontières à utiliser la force meurtrière contre quiconque tenterait de la franchir.

Des échanges de marchandises ont été observés entre la Corée du Nord et la Russie. Des équipements militaires et des munitions ont notamment été envoyés en Russie en amont du sommet entre le dirigeant nord- coréen Kim Jong-un et le président russe Vladimir Poutine, qui s’est tenu en septembre. Selon certaines informations, des fournitures militaires russes auraient aussi été livrées à la Corée du Nord. La politique de la Corée du Nord en matière de force nucléaire a été inscrite dans la Constitution, afin de garantir le « droit d’exister » du pays et son « droit de dissuasion face à la guerre ».

LIBERTÉ D’EXPRESSION

Le gouvernement a continué d’appliquer des lois draconiennes empêchant toute forme de liberté d’expression. Il surveillait et contrôlait les moyens de communication et la circulation des informations entrant dans le pays et en sortant.

Des personnes accusées d’avoir adopté « une idéologie et une culture réactionnaires » ont été sévèrement sanctionnées. Celles qui étaient surprises en train de visionner, d’écouter ou de lire des contenus jugés « réactionnaires » (films, livres, chansons, etc.) encouraient des peines de plusieurs années d’emprisonnement, et celles qui participaient à la diffusion de tels contenus risquaient la réclusion à perpétuité ou la peine de mort.

Le 18 janvier, le gouvernement a adopté une nouvelle loi visant à « éliminer » la langue « de style sud-coréen » (appelée par les autorités « langue des pantins »). Cette Loi sur la protection de la langue culturelle de Pyongyang prévoyait des sanctions sévères en cas d’utilisation ou de diffusion d’éléments linguistiques « de style sud-coréen ». Son article 58 indiquait ainsi que « toute personne reconnue coupable d’avoir parlé, écrit, envoyé des messages ou échangé des courriels dans la langue des pantins, ou d’avoir créé du matériel imprimé, des enregistrements vidéo, des compilations, des images, des photographies ou des contenus en ligne dans la langue écrite des pantins » était passible d’au moins six années de « rééducation par le travail ». En cas d’infraction jugée « grave », la peine était alourdie et la personne risquait la « rééducation par le travail » à perpétuité ou la peine de mort.

Les parents encouraient également au titre de cette loi l’humiliation publique s’il était établi que leurs enfants avaient eu accès à des contenus sud-coréens ou imité la langue « de style sud-coréen ». La loi demandait aux autorités concernées de recourir à des arrestations, des procès et des exécutions publics afin de « briser la mentalité » des personnes « polluées » par la langue et la culture sud-coréennes.

L’arrestation, en mars, de deux adolescents qui avaient regardé des films sud-coréens a été signalée ; ils risquaient d’être exécutés.

TRAVAIL FORCÉ

Cette année encore, des informations ont fait état d’un vaste recours au travail forcé. Selon le HCDH, les institutions étatiques ont continué de s’appuyer sur la mobilisation forcée d’hommes et de femmes pour des travaux dans la construction, l’exploitation minière ou l’agriculture et dans d’autres secteurs clés de l’économie. Les personnes assujetties au travail forcé ne recevaient qu’une rémunération minimale.

Des cas d’enfants soumis au travail forcé, notamment sur des chantiers de construction et dans des mines, ont continué d’être signalés. Selon les Nations unies, la mobilisation forcée des enfants intervenait dans les écoles et dans les organisations pour la jeunesse telles que la Ligue de la jeunesse, à laquelle l’adhésion était obligatoire.

Des travailleuses et travailleurs étaient également envoyés à l’étranger, notamment en Chine et en Russie, afin de générer un revenu pour l’État. Des personnes ayant travaillé à l’étranger ont été interrogées par les Nations unies et ont décrit des conditions s’apparentant à du travail forcé, caractérisées notamment par des restrictions sévères de leur liberté de mouvement et une faible rémunération, la majeure partie de leur salaire étant retenue par l’État nord-coréen. Ces personnes ont également raconté avoir été soumises à une étroite surveillance et contraintes d’effectuer des tâches physiquement difficiles et parfois dangereuses, en l’absence de dispositifs de santé et de sécurité satisfaisants et pendant de longues heures de travail, sans pauses ni journées de repos.

DROIT À L’ALIMENTATION

Des organismes de recherche basés en Corée du Sud ont fait état d’une augmentation des récoltes agricoles en Corée du Nord en 2023. L’insécurité alimentaire n’en restait pas moins un problème persistant.

En mars, l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture [ONU] a indiqué qu’une proportion importante de la population consommait une alimentation peu diversifiée et en quantité insuffisante. L’insécurité alimentaire trouvait son origine dans la politique économique du gouvernement et la récurrence des mauvaises récoltes. Elle était peut-être aussi liée aux sanctions internationales.

Le problème était exacerbé par le fait que le gouvernement faisait passer les dépenses militaires avant celles destinées à l’alimentation et à la satisfaction d’autres besoins élémentaires de la population, ainsi que par la réticence du régime à coopérer avec la communauté internationale.

La surveillance stricte des frontières rendait difficile la contrebande de denrées alimentaires. La nourriture et d’autres produits de première nécessité étaient en conséquence moins disponibles sur les marchés non officiels, où une part considérable de la population nord-coréenne faisait ses courses.

DROIT À LA SANTÉ

Le droit à la santé était fortement compromis. La réponse des autorités à la pandémie de COVID-19 est restée très insuffisante, et les traitements médicaux et les médicaments de base étaient souvent indisponibles.

La quantité de vaccins destinés aux enfants restait limitée, même si la reprise provisoire du transport ferroviaire de marchandises entre la Chine et la Corée du Nord fin 2022 a permis la livraison d’un certain nombre de vaccins. L’UNICEF a indiqué que plus de 350 000 enfants et plus de 150 000 femmes enceintes avaient été vaccinés en mars dans le cadre d’une « campagne de vaccination de rattrapage ». Cette opération a été menée car, selon certaines informations, il avait été impossible en 2022 d’injecter à ces personnes la troisième dose du vaccin diphtérie-tétanos-coqueluche, nécessaire à une immunisation totale contre ces maladies, en raison d’une rupture de stock à l’échelle nationale.

ARRESTATIONS ET DÉTENTIONS ARBITRAIRES

La Constitution, le Code pénal et d’autres lois interdisaient explicitement les arrestations et détentions arbitraires, mais, dans la pratique, le droit à la liberté et à la sécurité de la personne, ainsi que le droit à un procès équitable étaient régulièrement bafoués. La crainte de s’attirer les foudres des autorités ou d’être dénoncé par d’autres citoyen·ne·s était omniprésente, et le gouvernement recourait fréquemment aux arrestations et détentions arbitraires pour réprimer l’opposition et les personnes considérées comme dissidentes.

Selon les informations disponibles, les camps de prisonniers politiques (kwanliso) étaient toujours en activité, même si les autorités continuaient de nier leur existence. Des milliers de personnes y étaient notamment enfermées pour avoir exprimé des opinions dissidentes ou critiqué les autorités de quelque autre façon. Les détenu·e·s de ces camps étaient soumis aux travaux forcés et à des conditions de vie inhumaines.

Le sort réservé à des centaines de personnes, principalement des femmes, qui auraient été renvoyées de force en Corée du Nord par les autorités chinoises en octobre suscitait de vives inquiétudes. Les autorités nord-coréennes considéraient quiconque ayant fui le pays comme un·e « criminel·le » ou un·e « traître » pour avoir franchi « illégalement » la frontière. Par le passé, des personnes ont été arrêtées de façon arbitraire et soumises à la torture ou à d’autres mauvais traitements à leur retour dans le pays (voir Chine).

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