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URGENCE PROCHE ORIENT

Exigez avec nous la protection sans condition des populations civiles

© Utomi Ekpei/AFP/Getty Images

© Utomi Ekpei/AFP/Getty Images

Nigeria

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 155 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains au Nigeria en 2023.

Des sanctions ont été prononcées contre des organes de presse et des poursuites pénales engagées contre des journalistes accusés de diffamation. Les forces de défense et de sécurité ont eu recours à une force excessive, essentiellement pour disperser des manifestant·e·s. Des personnes ont été torturées pendant des interrogatoires de police. Les autorités ont continué de procéder à des expulsions forcées. Le gouvernement n’a pas mis en place de mesures destinées à atténuer les effets du changement climatique. Toutes les parties au conflit armé ont commis des violations du droit international. Des cas de disparition forcée ont été recensés. Les violences sexuelles et les violences liées au genre sont restées très répandues. Des hommes ont été inculpés au titre de la Loi sur l’interdiction du mariage entre personnes de même sexe. Des personnes déplacées qui avaient été réinstallées manquaient de nourriture et n’avaient pas suffisamment accès aux équipements de base.

LIBERTÉ D’EXPRESSION

Le 14 mars, la Commission nationale de régulation des médias (NBC) a infligé une amende à 25 stations de diffusion en lien avec la façon dont elles avaient traité les élections générales de 2023. Il leur était reproché d’avoir enfreint le Code de l’audiovisuel. À la suite de points de vue exprimés à l’antenne par Datti Baba-Ahmed, le candidat du Parti travailliste à la vice- présidence, la NBC a infligé à Channels Television une amende de cinq millions de naïras (6 540 dollars des États-Unis) le 1er avril. Le 10 mai, toutefois, la haute cour fédérale siégeant à Abuja a interdit à la NBC d’imposer des amendes aux organes de radiodiffusion.

Chude Franklin Nnamdi, un sympathisant du Parti travailliste, a été arrêté le 18 mars par la police à Onitsha (État d’Anambra) sous l’accusation de cyberharcèlement – article 24 de la Loi de 2015 relative à la cyber- criminalité (interdiction, prévention, etc.) – pour avoir critiqué sur les réseaux sociaux le gouverneur de l’État d’Anambra, Charles Soludo.

Invoquant des motifs imprécis (« préoccupations liées à la sécurité » et « suroccupation de la salle de presse »), les autorités ont retiré le 18 août leur accréditation à 25 journalistes et organes de presse, les empêchant ainsi de couvrir les événements ayant lieu à la résidence présidentielle, à Abuja.

Le 7 octobre, la NBC a adressé un « dernier avertissement » à Arise TV, accusée d’avoir diffusé une émission dans laquelle ont été prononcés « de manière irréfléchie des propos incendiaires […] contre le corps législatif, l’exécutif, le corps judiciaire et le chef de l’État ».

Le 1er novembre, dans le contexte d’une manifestation organisée dans la municipalité d’Owerri contre le non-paiement de pensions et de salaires, des membres de la police s’en sont pris, avec la connivence du gouvernement de l’État d’Imo, au président du Congrès des travailleurs du Nigeria (NLC), Joe Ajaero. Ils lui ont bandé les yeux et l’ont frappé.

JOURNALISTES

Les autorités ont continué de soumettre des journalistes à des mesures répressives et de les sanctionner pénalement pour « diffamation ».

Des poursuites pénales ont été engagées en janvier contre Agba Jalingo, accusé de diffamation à l’égard d’une parente de l’ancien gouverneur de l’État de Cross River, Ben Ayade. Le 7 février, les journalistes d’investigation Gidado Yushau et Alfred Olufemi ont été déclarés coupables de conspiration et de diffamation en raison d’une enquête sur la consommation de drogue dans l’État de Kwara.

Le 18 avril, un policier s’en est pris physiquement à Benedict Uwalaka, un photographe de presse qui effectuait un reportage sur un mouvement de protestation de syndicalistes du secteur de l’aviation dans l’État de Lagos.

Le prisonnier d’opinion Omoyele Sowore était toujours sous le coup d’une procédure judiciaire devant la haute cour fédérale siégeant à Abuja, pour des accusations de trahison forgées de toutes pièces qui avaient été portées contre lui après qu’il avait appelé la population à manifester, en 2019, dans le cadre du mouvement #RevolutionNow.

ATTAQUES ET HOMICIDES ILLÉGAUX

Les forces de sécurité ont utilisé une force excessive, y compris pour disperser des manifestations et des rassemblements pacifiques.

Onyeka Ibe a été abattu par un policier le 5 avril dans l’État du Delta. Il avait refusé de verser un pot-de-vin de 100 naïras (0,13 dollar des États-Unis).

Le 29 juin, des militaires ont tué par balle trois jeunes gens qui protestaient contre des pratiques d’extorsion et contre le chômage dans la localité d’Afokpella, dans la zone de gouvernement local d’Etsako (État d’Edo).

Selon une note confidentielle du gouvernement en date du 19 juillet dont le contenu a été révélé, les corps de 103 personnes tuées en octobre 2020 lors du mouvement de protestation #EndSARS étaient entre les mains des autorités de l’État de Lagos, qui ont donné leur accord pour qu’ils soient secrètement enterrés dans une fosse commune. Le gouvernement de cet État a annoncé le 10 octobre la suspension des inhumations.

Le 6 septembre, des policières et policiers armés ont tiré des gaz lacrymogènes et fait usage d’une force excessive contre des étudiant·e·s de l’université de Lagos qui manifestaient contre l’augmentation des frais de scolarité, passés de 19 000 naïras (24,76 dollars des États-Unis) à 190 000 naïras (247,65 dollars des États- Unis). Olorunfemi Adeyeye et six autres étudiant·e·s ont été arrêtés, frappés et menacés de mort par la police.

Le 9 octobre, le policier Drambi Vandi a été déclaré coupable par la haute cour de Lagos du meurtre d’Omobolanle Raheem, qu’il avait abattue le 25 décembre 2022 à un barrage routier sur la route reliant Lekki à Epe. Il a été condamné à la peine de mort par pendaison.

TORTURE ET AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS

Faiz Abdullahi est mort en garde à vue le 30 juillet à Kaduna (État de Kaduna) après avoir été torturé pendant son interrogatoire. Abdullahi Tukur Abba, un lycéen âgé de 17 ans, est mort à l’hôpital après avoir été torturé pendant son interrogatoire. Il avait été interpellé par la police le 5 août à Yola, dans l’État d’Adamawa.

DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Le président, Bola Tinubu, a annoncé le 29 mai l’arrêt du subventionnement de l’achat de carburant, ce qui s’est traduit par une envolée des prix des produits alimentaires et du coût de la vie.

Le NLC a lancé le 2 août un mouvement de grève portant notamment sur la question des bas salaires et du non-versement depuis huit mois du traitement des professeur·e·s d’université. Le chef de l’État a annoncé le 1er octobre une hausse temporaire de 25 000 naïras (31 dollars des États-Unis) du salaire mensuel minimum.

EXPULSIONS FORCÉES

Les autorités ont continué d’expulser de force des personnes sans préavis ni indemnisation adéquats et sans proposition de relogement. Des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants se sont ainsi retrouvés sans abri. Les 21 et 22 mai, des agent·e·s de sécurité et le Service d’urbanisme et d’aménagement urbain de l’État de Kaduna ont démoli des bâtiments qui appartenaient à des sympathisant·e·s du Mouvement islamique du Nigeria. Le 27 juillet, plus de 250 habitations ont été détruites dans des quartiers d’Oworonshoki (État de Lagos) et plus de 12 000 personnes se sont retrouvées sans logement.

DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN

Les autorités n’ont pas pris les mesures nécessaires pour atténuer les effets des fortes précipitations et des crues, aggravées par le changement climatique. Quatre personnes ont trouvé la mort et 166 maisons ont été submergées par des inondations à Abuja en juin. Le même mois, huit personnes ont péri lors de crues qui ont submergé la localité d’Agege, dans l’État de Lagos.

Plus de 700 fermes et habitations ont été détruites en août par des inondations dans la localité de Cheledi, dans l’État de Bauchi. Dans l’État du Niger, les habitant·e·s de cinq localités ont dû partir de chez eux en raison d’une montée des eaux qui a submergé leur maison et leurs terres. Toujours en août, des fermes situées dans la zone de gouvernement local d’Ogbaru, dans l’État d’Anambra, ont subi de graves inondations. Une ferme avicole a perdu 25 000 volailles.

La pollution et la dégradation de l’environnement causées par l’industrie pétrolière se sont poursuivies dans le delta du Niger. Le nettoyage réalisé par Shell n’était toujours pas suffisant. Shell n’avait pas expliqué comment elle comptait remédier à la pollution générée par ses activités qui affectait des localités nigérianes.

VIOLATIONS DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE

EXACTIONS PERPÉTRÉES PAR DES GROUPES ARMÉS

Des exactions ont continué d’être commises par Boko Haram et l’État islamique en Afrique de l’Ouest dans le nord-est du pays. Les assaillants étaient appelés localement « bandits » dans le nord-ouest et le centre, et « hommes armés non identifiés » dans le sud-est. Christopher Ohizu, un fonctionnaire d’une collectivité locale de l’État d’Imo, a été décapité par des hommes armés le 23 janvier. Au moins 46 habitants du village d’Umogidi, dans l’État de Benue, ont été tués par des hommes armés les 5 et 6 avril.

Le 22 août, des combattants de Boko Haram ont enlevé plus de 40 femmes et filles dans la zone de gouvernement local de Mafa (État de Borno). Le 19 septembre, des hommes armés ont attaqué et tué environ huit membres des forces de sécurité (militaires, fonctionnaires de police et membres du Corps de sécurité et de défense civile du Nigeria) dans la zone de gouvernement local d’Ehime Mbano (État d’Imo).

Le 24 décembre, des hommes armés ont mené des attaques meurtrières contre 20 localités de la zone de gouvernement local de Bokkos et contre des secteurs de celle de Barkin-Ladi, dans l’État du Plateau, tuant au moins 194 personnes ; plusieurs dizaines de personnes ont aussi été blessées et déplacées.

ATTAQUES CONTRE DES ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT

L’État nigérian n’a pas protégé les établissements d’enseignement contre les attaques et les enlèvements. En janvier, des hommes armés ont enlevé six enfants âgés de quatre à six ans qui étaient scolarisés à l’école primaire d’Alwaza, dans l’État de Nasarawa. En mars, des éleveurs ont attaqué l’école secondaire de la ville d’Alaropo Nla, dans l’État d’Oyo, faisant plusieurs blessés parmi les élèves et les enseignant·e·s.

Le 22 septembre, 30 étudiantes de l’université fédérale de Gusau (État de Zamfara) ont été enlevées par des hommes armés dans les foyers étudiants où elles étaient hébergées. Une autre attaque s’est produite le 4 octobre à l’université fédérale Dutsin-Ma de l’État de Katsina, au cours de laquelle cinq étudiantes ont été enlevées par des hommes armés.

Le 9 octobre, des hommes armés ont enlevé quatre étudiantes – Rahila Hanya, Josephine Gershon, Rosemary Samuel et Goodness Samuel – à l’université d’État de Nasarawa, dans la localité d’Angwan Ka’are (État de Nasarawa).

ATTAQUES ET HOMICIDES ILLÉGAUX COMMIS PAR LES FORCES DE SÉCURITÉ

Les forces de défense et de sécurité ont commis des violations des droits humains au cours d’opérations contre des groupes armés.

Plusieurs dizaines de civil·e·s ont été tués le 24 janvier dans la zone de gouvernement local de Rugby (État de Nasarawa) lors d’une frappe aérienne dont on soupçonnait qu’elle a été réalisée par un drone de l’armée de l’air nigériane. Le 25 janvier, 21 civil·e·s au moins ont perdu la vie à la suite d’une frappe aérienne de l’armée de l’air nigériane dans l’État du Niger.

Des membres des forces de sécurité ont attaqué en septembre la localité d’Umualumaku, située dans la zone de gouvernement local d’Ehime Mbano, dans l’État d’Imo. Plusieurs maisons et véhicules ont été incendiés dans cette opération menée en représailles à l’homicide de membres de la police, de l’armée et du Corps de sécurité et de défense civile.

Le 3 décembre, plus de 120 personnes qui assistaient à une cérémonie religieuse dans le village de Tudun Biri (État de Kaduna) ont été tuées par une frappe aérienne de l’armée de l’air nigériane.

DISPARITIONS FORCÉES

Maduabuchi Obinwa, âgé de 22 ans, a disparu après avoir été enlevé le 24 avril 2022 lors d’une descente effectuée dans sa maison à Ekwulobia (État d’Anambra) par des agents de sécurité du Département des enquêtes criminelles de l’État d’Awkuzu. Obiora Agbasimalo, qui était candidat au poste de gouverneur dans l’État d’Anambra, a été enlevé par des hommes armés le 18 septembre 2021 alors qu’il se rendait à un rassemblement électoral dans la ville d’Azia. Sunday Ifedi et son épouse, Calista Ifedi, ont été emmenés par des membres des services de sécurité qui sont venus les chercher chez eux, à Enugu, le 23 novembre 2021, en raison de leur appartenance présumée à l’organisation Peuples indigènes du Biafra. À la fin de l’année, on ignorait toujours ce qu’il était advenu de toutes ces personnes et où elles se trouvaient.

VIOLENCES FAITES AUX FEMMES ET AUX FILLES

La ministre de la Condition féminine a indiqué que 24 720 cas de violences sexuelles ou fondées sur le genre avaient été recensés entre janvier et octobre 2023, ayant entraîné la mort de 975 personnes. Une femme enceinte de huit mois a été violée le 15 juin à Irabi (État de Benue) par un homme du nom de John Akpo. Chukwuemeka Orji a été arrêté par la police le 22 juin pour le viol d’une employée de maison de 13 ans commis à Aba, dans l’État d’Abia.

Le corps mutilé d’une femme âgée de 32 ans, Dorcas Shangev, a été retrouvé le 14 juillet à Makurdi, dans l’État de Benue. Chinyere Awuda, âgée de 27 ans, est morte des suites des coups qui lui ont été infligés le 15 juillet. Son corps a été jeté dans la piscine désaffectée d’un hôtel d’Awka, dans l’État d’Anambra.

DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES, TRANSGENRES OU INTERSEXES

Le 27 août, la police a arrêté 69 hommes accusés d’avoir organisé un mariage gay dans l’État du Delta. Ils ont été inculpés le 4 septembre par une haute cour de cet État en vertu de la Loi sur l’interdiction du mariage entre personnes de même sexe, et incarcérés. Ils ont bénéficié le 19 septembre d’une remise en liberté sous caution assortie de conditions strictes, tandis que la procédure pénale se poursuivait.

Le 22 octobre, 59 hommes et 17 femmes ont été arrêtés dans la galerie commerciale Duwa Plaza à Gombe (État de Gombe) parce qu’ils auraient participé à une fête d’anniversaire gay et projeté d’organiser un mariage gay.

DROITS DES PERSONNES DÉPLACÉES

Plus de 2,4 millions d’hommes, de femmes et d’enfants étaient toujours déplacés dans le nord-est du pays. Le gouvernement de l’État du Borno a fermé quatre camps en juillet et procédé à la réinstallation de 11 000 familles. La plupart des personnes réinstallées manquaient de nourriture et n’avaient pas suffisamment accès aux équipements de base.

Le 6 octobre, la ministre des Affaires humanitaires et de la Lutte contre la pauvreté, Betta Edu, a remis 40 unités de logement à des personnes déplacées, dans l’État de Zamfara.

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