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Que signifient les sanctions de l’administration Trump contre la CPI pour la justice et les droits humains ?
Le 6 février 2025, Donald Trump, président des États-Unis, a signé un décret autorisant des sanctions envers la Cour pénale internationale (CPI) et son procureur général, Karim Khan. Ce décret exécutif vise à empêcher la CPI d’exécuter son mandat indépendant. Il représente par ailleurs une menace considérable pour la CPI et son personnel. Des expert·e·s de l’ONU ont fermement condamné cette mesure, la qualifiant d’« attaque contre l’état de droit mondial » fragilisant la justice internationale.
Cet acte est similaire à un autre décret qui avait été pris par le président Trump vers la fin de son premier mandat en 2020, avant d’être levé par le président Biden. La nouvelle mesure exécutive de Donald Trump est une réponse directe aux efforts déployés par la CPI afin d’obliger des ressortissants israéliens à rendre des comptes pour des crimes au regard du droit international qui auraient été commis en Palestine. En novembre 2024, la Cour a délivré des mandats d’arrêt contre Benjamin Netanyahou, Premier ministre israélien, et Yoav Gallant, ancien ministre israélien de la Défense, ainsi que contre Mohammed Diab Ibrahim Al Masri, commandant des brigades al Qassam, pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.
En imposant des sanctions à la CPI, l’administration Trump sape les efforts déployés pour rendre justice, non seulement aux Palestinien·ne·s, mais aussi aux autres victimes des crimes les plus graves partout dans le monde. Il s’agit de personnes se trouvant en Afghanistan, au Burundi, en Côte d’Ivoire, au Darfour (Soudan), en Libye, au Mali, au Myanmar, au Nigeria, aux Philippines, en République démocratique du Congo, en Ukraine et au Venezuela, où la CPI mène actuellement des enquêtes ou a délivré des mandats d’arrêt.
Que contenait le décret du président Trump ?
Ce décret prévoit que toute personne ou organisation non américaine peut être sanctionnée si elle participe directement aux efforts déployés par la CPI pour enquêter sur une « personne protégée », l’arrêter, la détenir ou la poursuivre, sans le consentement du pays dont elle a la nationalité. Des sanctions peuvent également être appliquées à celles et ceux qui ont matériellement aidé, parrainé ou soutenu sur le plan financier, matériel ou technologique les activités de la Cour. Les sanctions incluent le blocage de tous les avoirs se trouvant aux États-Unis et l’interdiction d’entrer sur le territoire des États-Unis, pour toute personne sanctionnée et les membres de sa famille.
Les « personnes protégées » sont définies comme les ressortissant·e·s des États-Unis et le personnel militaire des États-Unis, ainsi que toute personne qui est citoyenne ou bénéficie d’un statut légal de résident dans un pays allié aux États-Unis au sein de l’OTAN ou d’un « allié majeur non membre de l’OTAN », désignation officielle dans le droit étasunien. Israël, les Philippines et 17 autres pays font actuellement partie de ce groupe.
Au 25 mars, le procureur de la CPI, Karim Khan, était la seule personne désignée comme la cible de sanctions par ce décret, bien qu’il soit possible que d’autres personnes soient ajoutées à l’avenir.
La CPI est un mécanisme judiciaire international indépendant intervenant en dernier ressort, qui doit pouvoir fonctionner sans ingérence ni coercition politique, afin que les victimes n’ayant pas d’autre recours puissent obtenir justice pour les crimes contre l’humanité commis contre elles. Or, ces sanctions compromettent l’indépendance de la Cour et entravent ses efforts pour rendre une justice véritable et impartiale. Elles dissuadent par ailleurs des personnes et des entreprises de travailler et de coopérer avec la Cour et ses représentants.
Qu’est-ce que la Cour pénale internationale ?
La CPI est une juridiction internationale permanente qui enquête et poursuit des personnes soupçonnées d’avoir commis des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou le crime de génocide, lorsque les tribunaux nationaux manquent à leur devoir sur ce terrain. Le Statut de Rome, traité fondateur de la Cour, compte 125 États membres.
Outre les mandats d’arrêt délivrés contre Benjamin Netanyahou, Yoav Gallant et Mohammed Diab Ibrahim Al Masri, la CPI a émis des mandats d’arrêt contre de hauts responsables militaires et civils, notamment :
- Le président russe Vladimir Poutine en 2023 pour des crimes de guerre commis en Ukraine ;
- L’ancien président des Philippines Rodrigo Duterte pour des crimes contre l’humanité commis dans le cadre de la « guerre contre la drogue » menée par son gouvernement. En mars 2025, les autorités philippines l’ont transféré à la Cour pour qu’il réponde de ses actes ;
- Omar el Béchir, ancien président du Soudan, pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide au Darfour ;
- Joseph Kony, commandant de l’Armée de résistance du Seigneur, pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité en Ouganda.
La CPI a été créée en tant que « juridiction de dernier recours » : elle existe pour rendre justice dans des situations où les États ne peuvent pas ou ne veulent pas véritablement enquêter ni poursuivre des individus. Dans un certain nombre de situations, sans l’intervention de la CPI, les auteurs des crimes les plus graves sont susceptibles de bénéficier d’une impunité perpétuelle. La CPI est conçue pour représenter une lueur d’espoir en matière d’établissement des responsabilités, et agir comme un mécanisme solide permettant de réfréner les abus de pouvoir et d’engager des poursuites contre ceux-ci.
Pourquoi l’administration Trump impose-t-elle ces sanctions ?
Les autorités étasuniennes ont annoncé ces sanctions quelques jours avant la première visite du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou à la Maison Blanche depuis la réélection du président Trump. Le gouvernement des États-Unis a pris des sanctions similaires en 2020, lors du premier mandat présidentiel de Donald Trump.
Sous l’ancien président, Joe Biden, le gouvernement des États-Unis a exprimé son soutien à l’enquête de la CPI en Ukraine et aux mandats d’arrêt délivrés contre de hauts responsables du gouvernement et de l’armée russes, notamment le président Vladimir Poutine. Les États-Unis ne sont toutefois pas devenus un État membre de la Cour, et des représentants de l’administration Biden ont exprimé de vives critiques à l’égard de l’enquête de la CPI sur Benjamin Netanyahou et Yoav Gallant, recevant même ce dernier après l’émission des mandats d’arrêt.
Les États-Unis se sont toujours opposés au mandat de la CPI consistant à poursuivre des personnes originaires de pays qui ne sont pas membres de la Cour, même si les crimes qu’on leur attribue ont eu lieu dans des pays qui sont membres de la CPI. En particulier, les États-Unis s’opposent depuis longtemps aux enquêtes de la Cour en Afghanistan, où des éléments de l’armée américaine et de la Central Intelligence Agency (CIA) ont fait l’objet d’une enquête, et en Palestine.
Cependant, ces nouvelles sanctions, comme celles de 2020, marquent une nouvelle intensification de l’opposition des États-Unis à l’autorité de la Cour.
En quoi ces sanctions entraveront-elles la justice pour toutes les victimes en Israël et dans le territoire palestinien occupé ?
Ces sanctions entraveront la justice pour les victimes pour lesquelles la CPI est un dernier recours. Le procureur sanctionné est chargé de traiter les affaires visant Mohammed Diab Ibrahim Al Masri, Benjamin Netanyahou et Yoav Gallant. Les sanctions ont toutefois un impact tout particulier sur les Palestinien·ne·s qui cherchent à obtenir justice, car c’est là leur objectif. Les sanctions sont destinées à faire pression sur la Cour pour qu’elle ne cherche plus à rendre une justice impartiale et indépendante, sous peine de subir des conséquences dans l’ensemble de ses travaux.
La CPI est actuellement le seul mécanisme international permettant de demander des comptes aux responsables présumés de crimes de droit international commis en Israël et dans le territoire palestinien occupé. Elle compte toutefois sur la coopération de ses États membres dans ses enquêtes et les poursuites qu’elle diligente, notamment en ce qui concerne l’arrestation des personnes faisant l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI. Les sanctions de l’administration Trump pourraient dissuader des pays, ainsi que des particuliers et des entreprises, d’aider la Cour, ce qui rendrait plus difficile la traduction en justice d’auteurs de crimes présumés depuis Israël et d’autres pays.
La CPI dépend par ailleurs d’un grand nombre de parties prenantes – chercheurs et chercheuses, avocat·e·s et défenseur·e·s des droits humains – ainsi que de victimes et de témoins pour constituer ses dossiers. Ces sanctions rendront leur travail beaucoup plus difficile. Rendre justice est quasiment impossible si ces personnes ne peuvent pas agir librement et sans contrainte.
Quel sera l’impact des sanctions sur les autres enquêtes de la CPI ?
Les sanctions nuiront en définitive à toutes les enquêtes de la CPI, et pas seulement à celles auxquelles s’oppose le gouvernement des États-Unis. Elles auront un impact négatif sur les intérêts de toutes les victimes qui se tournent vers la Cour pour obtenir justice dans tous les pays où elle mène des enquêtes, y compris celles que les États-Unis disent soutenir, par exemple en Ukraine, en Ouganda ou au Darfour.
L’ancien président des États-Unis, Joe Biden, avait explicitement salué le mandat d’arrêt délivré par la CPI contre le président russe Vladimir Poutine, et avait appelé à son arrestation. Ce mandat est le résultat de l’enquête de la Cour sur l’Ukraine, qui porte sur les crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis après l’invasion massive de 2022. Le programme américain Global Criminal Justice Rewards a par ailleurs offert des récompenses financières pour toute information permettant l’arrestation de Joseph Kony, inculpé par la CPI pour des crimes commis en Ouganda, et d’Ahmad Harun au Darfour.
La CPI continue d’enquêter sur les crimes commis par les talibans en Afghanistan depuis leur retour au pouvoir en 2021. Au Venezuela, le procureur de la CPI enquête sur des crimes contre l’humanité commis contre des opposant·e·s présumés au gouvernement du président Maduro. En février dernier, le procureur de la CPI a souligné la détermination de son bureau à intensifier le travail visant à rendre justice et à établir les responsabilités dans l’est de la RDC.
Comment pouvons-nous protéger la CPI et la justice internationale ?
Les sanctions prononcées par les États-Unis constituent une grave menace pour la CPI, ainsi que pour l’état de droit international au sens large et le système multilatéral. Mais tous les espoirs ne sont pas perdus.
De nombreux pays continuent de soutenir la CPI. En juin 2024, 74 États membres de la CPI ont affirmé leur engagement à lutter contre l’impunité. Après le récent décret du président Trump, les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne ont déclaré leur « soutien indéfectible » à la Cour.
Mais les paroles ne suffisent pas. Les États doivent traduire leurs déclarations d’engagement et de soutien en actions concrètes pour défendre la CPI, notamment en adoptant des lois nationales qui protègent les individus et les entreprises contre la menace de lois américaines en matière de sanctions. Il s’agit aussi de coopérer pleinement avec la Cour, notamment en arrêtant et en transférant les personnes visées par un mandat d’arrêt de la CPI.
En agissant à titre individuel et collectif, les États peuvent défendre la CPI et s’opposer aux attaques flagrantes du gouvernement des États-Unis à son encontre. Notre réseau mondial de défenseur·e·s des droits humains appelle activement les gouvernements à soutenir la CPI et à défendre la justice internationale.ment’s egregious attacks on it. Our global network of human rights advocates is actively calling on governments to support the ICC and uphold international justice.
Comment fonctionne la défense des droits humains ?
L’ouverture d’un dialogue et un travail de pression auprès des gouvernements et des États sont essentiels à la défense des droits humains. Si vous souhaitez acquérir des compétences pratiques en matière de plaidoyer, auprès d’expert·e·s chevronnés des droits humains, et rejoindre un mouvement mondial de personnes appelant au changement.
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