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Yémen. L’arrêt brutal et irresponsable de l’aide américaine aggrave la crise humanitaire et met en danger des millions de personnes

L’arrêt brutal et irresponsable de l’aide internationale par le gouvernement des États-Unis met en danger la santé et les droits fondamentaux des millions de personnes qui dépendent de l’aide humanitaire au Yémen, a déclaré Amnesty International jeudi 10 avril 2025.

Après une décennie de conflit dévastateur, le Yémen reste en proie à l’une des pires crises humanitaires au monde.

Des travailleurs et travailleuses humanitaires ont raconté à Amnesty International que la décision du président des États-Unis, Donald Trump, de faire des coupes dans le financement de l’aide internationale avait entraîné la fermeture de services d’aide et de protection vitaux, tels que le traitement de la malnutrition chez les enfants et les femmes enceintes ou allaitantes, les lieux d’accueil sécurisés pour les victimes de violences fondées sur le genre, et les soins médicaux à destination des enfants souffrant du choléra ou d’autres maladies.

La réduction brutale et irresponsable de l’aide des États-Unis va avoir des conséquences catastrophiques sur les groupes de population les plus menacés et les plus marginalisés du Yémen

Diala Haidar, chercheuse sur le Yémen à Amnesty International

« La réduction brutale et irresponsable de l’aide des États-Unis va avoir des conséquences catastrophiques sur les groupes de population les plus menacés et les plus marginalisés du Yémen, notamment les femmes et les filles, les enfants et les personnes déplacées à l’intérieur du pays, en portant atteinte à leur sécurité, à leur dignité et à leurs droits fondamentaux », a déclaré Diala Haidar, chercheuse sur le Yémen à Amnesty International.

« Si les États-Unis ne rétablissent pas immédiatement un financement suffisant de l’aide vitale au Yémen, en veillant à ce que l’argent soit versé rapidement, la situation humanitaire déjà catastrophique va encore se détériorer et des millions de personnes au Yémen vont se retrouver privées de l’aide dont elles ont désespérément besoin.

« Les autres pays donateurs doivent aussi agir de toute urgence, conformément à leurs obligations relatives aux droits humains, en apportant une aide humanitaire et en soutenant les droits fondamentaux dans ce pays. »

Après des années de conflit et de crises qui s’additionnent, on estime que 19,5 millions de personnes au Yémen, soit plus de la moitié de la population, dépendent de l’aide humanitaire pour survivre. Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA), le Yémen est le théâtre de la cinquième plus grande crise au monde en matière de déplacements de population, avec un nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays estimé à 4,8 millions, dont une grande majorité de femmes et d’enfants. Ces cinq dernières années, aussi bien durant le premier mandat de Donald Trump que sous le gouvernement de Joe Biden, les États-Unis ont toujours été le principal donateur du Yémen. En 2024, ils lui ont apporté 768 millions de dollars d’aide, finançant notamment la moitié du plan de réponse humanitaire coordonné pour ce pays.

Amnesty International a interrogé 10 spécialistes et employé·e·s du secteur de l’aide humanitaire ayant une connaissance directe de la situation sur le terrain, ainsi que six représentant·e·s d’organisations locales de défense des droits humains, dont cinq organisations qui offrent directement des services à des groupes vulnérables. Toutes ces personnes ont dit que les conséquences de la réduction de l’aide seraient dévastatrices et sources de souffrances, de mort et d’instabilité croissante dans un pays déjà fragile. Elles ont toutes souhaité rester anonymes.

Le fait que le Département d’État américain ait qualifié les Houthis d’organisation terroriste internationale a encore aggravé la situation humanitaire. La difficulté pour les organisations de certifier qu’elles respectent cette décision dans l’environnement humanitaire complexe du nord du Yémen a contraint plusieurs organisations humanitaires internationales à suspendre leurs activités dans les territoires contrôlés par les Houthis. Cette qualification a créé une importante confusion et de graves préoccupations, ont déclaré les travailleurs et travailleuses humanitaires interrogés par Amnesty International. En effet, le décret lançant la procédure d’inscription sur la liste des organisations terroristes internationales ne contenait aucune dérogation humanitaire et ordonnait que les financements soient coupés à toute organisation « ayant critiqué les efforts internationaux de lutte contre Ansar Allah [les Houthis] et n’ayant pas suffisamment dénoncé les atteintes commises par ce groupe ».

« Les mesures des États-Unis visant les autorités houthies de facto doivent prévoir des dérogations claires et effectives pour les opérations humanitaires et la livraison de marchandises vitales. La majorité des civil·e·s ayant un besoin critique d’aide humanitaire vivent dans les zones contrôlées par les Houthis du nord du Yémen. Le fait que les États-Unis aient mis les Houthis sur la liste des organisations terroristes ne doit pas empêcher l’acheminement de l’aide et des autres marchandises indispensables pour maintenir les gens en vie, en bonne santé et en sécurité », a déclaré Diala Haidar.

Depuis le 15 mars, les États-Unis ont aussi intensifié leurs opérations militaires au Yémen, menant plusieurs vagues d’attaques aériennes contre des cibles houthies, notamment contre les gouvernorats contrôlés par les Houthis, comme ceux de Sanaa, Saada et Hodeïda.

« Affamée, déplacée et épuisée par les violences, la population yéménite était déjà en proie à l’une des pires crises humanitaires au monde. L’escalade militaire au Yémen, ainsi que la réduction de l’aide américaine, vont exacerber la catastrophe humanitaire à laquelle était déjà confrontée cette population durement touchée par le conflit qui fait rage depuis longtemps. Cette situation n’est pourtant pas inéluctable – les États-Unis doivent rétablir immédiatement le financement de ces programmes », a déclaré Diala Haidar.

« Nous avons été contraint·e·s de prendre des décisions portant sur des questions de vie ou de mort »

Le 20 janvier, le président américain, Donald Trump, a signé un décret suspendant toute aide internationale pendant 90 jours, le temps d’examiner si elle était cohérente avec la politique étrangère des États-Unis. Le 24 janvier, le secrétaire d’État américain, Marco Rubio, a ordonné aux employé·e·s qui travaillaient à la fourniture de l’aide dans le monde de cesser leurs activités. Les États-Unis ont alors annoncé que quelques dérogations seraient accordées, notamment pour « l’aide humanitaire vitale ». Le 10 mars, soit seulement six semaine après le décret ordonnant le réexamen de l’aide internationale, Marco Rubio a écrit sur X que 83 % des programmes d’aide de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) avaient été officiellement annulés.

Les organisations se sont retrouvées contraintes de prendre des décisions impossibles sur des services vitaux sans disposer d’informations claires communiquées par les agences américaines, comme l’USAID, ont déclaré plusieurs travailleurs et travailleuses humanitaires à Amnesty International.

Une de ces personnes a ainsi expliqué : « Nous avons été contraint·e·s de prendre des décisions portant sur des questions de vie ou de mort sans informations ou presque. Souvent, nous n’avons personne à qui nous adresser car l’USAID a été démantelée. Les gens à qui nous écrivons des courriels ne sont plus là. Cela a des conséquences sur nos subventions au Yémen comme sur beaucoup d’autres ailleurs. »

Le 28 mars, le Département d’État américain a officiellement informé le Congrès de la dissolution de l’USAID, dont il a supprimé certaines fonctions et repris les autres.

Un effet dévastateur sur les femmes et les filles.

Au Yémen, les femmes et les filles sont depuis longtemps en butte à une discrimination et des violences fondées sur le genre systémiques. La législation du pays n’impose pas d’âge minimum pour le mariage, et près d’un tiers des femmes sont mariées avant l’âge de 18 ans. Le mariage des enfants va de pair avec une vie entière d’atteintes aux droits humains. Le Yémen présente également l’un des taux de mortalité maternelle les plus élevés de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, avec près de 200 décès de femmes pour 100 000 naissances, selon le Fonds des Nations unies pour la population.

D’après les spécialistes et les travailleurs·euses humanitaires interrogés par Amnesty International, en mars 2025, la réduction des financements américains avait déjà contraint à la fermeture des dizaines de lieux d’accueil sécurisés destinés aux femmes et aux filles (conçus pour prévenir les violences liées au genre ou y répondre) à différents endroits du Yémen. Ces personnes ont averti que, si les financements ne reprenaient pas, des dizaines de centres de soins et d’établissements de santé reproductive et de protection seraient fermés, ce qui priverait des centaines de milliers de femmes et de filles, notamment victimes de violences liées au genre, d’accès à des soins vitaux, à un soutien psychosocial et à une assistance juridique.

Une représentante d’une organisation locale offrant tout un éventail de services aux victimes de violences fondées sur le genre, tels qu’un hébergement en lieu sûr, une assistance juridique et un soutien psychosocial, a indiqué que la réduction de l’aide américaine avait eu de graves répercussions sur plus de la moitié des programmes de l’organisation. Elle a déclaré à Amnesty International :

« Des centaines de femmes vont être touchées […] Nous ne sommes plus en mesure de fournir une aide psychosociale, un service pourtant crucial pour les femmes victimes de violences liées au genre. L’assistance juridique va aussi s’arrêter. »

Outre la suppression de financements, le fait que les États-Unis aient placé les Houthis sur la liste des organisations terroristes internationales a conduit des organisations internationales qui menaient des programmes vitaux d’aide aux enfants et aux femmes enceintes ou allaitantes malnutris à suspendre leurs activités dans les zones contrôlées par les Houthis.

Les États-Unis affaiblissent des années d’efforts menés par des organisations yéménites dirigées par des femmes pour aider et rendre plus autonomes d’autres femmes

Diala Haidar, chercheuse sur le Yémen à Amnesty International

« Les États-Unis affaiblissent des années d’efforts menés par des organisations yéménites dirigées par des femmes pour aider et rendre plus autonomes d’autres femmes, a déclaré Diala Haidar. Quand les victimes de violences fondées sur le genre perdent l’accès à des services essentiels comme les centres d’accueil, le soutien psychosocial, la possibilité d’être orientées vers des établissements de santé et l’assistance juridique, les conséquences peuvent être mortelles. La réduction des financements risque d’entraîner le démantèlement du réseau d’aide et de protection existant bâti au fil des ans par des organisations humanitaires et des femmes défenseures des droits des humains yéménites, ce qui exposerait alors les filles à encore plus de risques, tels que le mariage des enfants, la traite des êtres humains, la mendicité et le travail des enfants. »

La politique des États-Unis concernant le Yémen a aussi eu des répercussions sur d’autres groupes vulnérables, comme les enfants et les personnes déplacées. Dans ce pays, environ 2,3 millions d’enfants, soit près de la moitié des enfants de moins de cinq ans, sont en situation de malnutrition aiguë, selon l’OCHA. Un certain nombre d’organisations ont dû suspendre ou supprimer leurs services de protection, de santé et de nutrition à destination des nourrissons et des jeunes enfants. Il est aussi à prévoir que des centaines de milliers de personnes déplacées à l’intérieur du pays perdent l’accès à une aide humanitaire d’urgence vitale à la suite de la réduction des financements.

« La suppression des financements […] réduit les victimes au silence et affaiblit la justice »

Des représentant·e·s d’organisations locales de défense des droits humains au Yémen ont aussi décrit comment la réduction brutale des financements américains avait mis en péril leur travail de suivi des atteintes aux droits humains, tout en fragilisant les droits des centaines de milliers de personnes qu’elles aidaient à trouver un abri, une assistance juridique et la sécurité, notamment les victimes de violences liées au genre, les femmes défenseures des droits humains et les familles de victimes de disparition forcée. Ils ont raconté que ces mesures avaient porté un coup à leurs efforts visant à obtenir justice et obligation de rendre des comptes au Yémen et ont dit leur crainte que cela n’enhardisse les auteurs d’atteintes aux droits humains.

À propos des coupes dans les financements, un défenseur des droits humains a déclaré : « Notre travail en faveur des droits humains est déjà restreint par différentes autorités [au Yémen], là c’est comme si la communauté internationale nous abandonnait. »

Une défenseure des droits humains a expliqué que la réduction des financements américains allait avoir des conséquences directes sur les victimes de violations des droits humains, notamment les personnes détenues arbitrairement ou soumises à une disparition forcée, car le travail de recueil d’informations et les services d’assistance juridique allaient cesser. Elle a déclaré : « Le droit à la vérité et à la justice de ces victimes et de leurs familles est en jeu. »

Une autre personne engagée dans la défense des droits humains a alerté : « La suppression des financements ne met pas seulement fin à des projets, elle réduit les victimes au silence et affaiblit la justice au Yémen. »

Complément d’information

Ces cinq dernières années, les États-Unis ont été le principal donateur humanitaire au Yémen. Les autres grands donateurs finançant la réponse humanitaire dans ce pays sont notamment le Royaume-Uni, la Commission européenne, l’Arabie saoudite et l’Allemagne. Même avant la réduction de l’aide américaine, le plan de réponse humanitaire au Yémen était systématiquement et largement sous-financé depuis des années. En avril 2025, il n’était financé qu’à 6,9 %.

Les Houthis ont aussi aggravé la crise humanitaire en prenant pour cible des travailleurs et travailleuses humanitaires et du personnel international participant à la distribution de services vitaux dans le nord du Yémen. À partir du 31 mai 2024, ils ont mené une série de raids dans les zones placées sous leur contrôle, arrêtant arbitrairement 13 employé·e·s de l’ONU et au moins 50 employé·e·s d’organisations yéménites et internationales de la société civile. Entre le 23 et le 25 janvier 2025, ils ont procédé à une nouvelle vague d’arrestations, détenant arbitrairement huit membres du personnel de l’ONU. L’un d’eux est mort le 11 février alors qu’il se trouvait toujours aux mains des Houthis. Beaucoup des personnes arrêtées œuvraient à apporter une aide ou une protection aux populations les plus dans le besoin, et ces arrestations ont conduit les Nations unies à annoncer, en janvier 2025, la suspension de tous les mouvements officiels vers et dans les zones contrôlées par les Houthis.

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