Accusée d’occuper illégalement des terres, la défenseure des droits humains Máxima Acuña fait aujourd’hui l’objet de poursuites pénales sans fondement, visant à la discréditer et à contester la légitimité de son combat.
Menacée d’expulsion, Máxima Acuña, paysanne de la région de Cajamarca, mène depuis plus de quatre ans une bataille juridique contre l’entreprise Yanococha, l’une des plus grosses compagnies minières du monde.
Des accusations sans fondement
En août 2011, Máxima Acuña Atalaya, paysanne et défenseure des droits humains, son époux Jaime Chaupe Lozano, sa fille aînée et son gendre ont été accusés d'occuper illégalement des terres. Le procureur général avait inculpée Máxima, arguant qu’elle et sa famille avaient fait usage de « violence » et de « menaces » pour empêcher la compagnie minière Yanacocha d’accéder au terrain appelé Tragadero Grande, dans la région de Cajamarca, au Pérou. L'entreprise a fait valoir que ce terrain faisait partie de la propriété qu'elle a acheté en 2001 à l'entreprise Minas Conga.
Nous avons pu consulter le dossier et aucune preuve n’a été présentée par le procureur général pour étayer l'accusation selon laquelle Máxima Acuña et les membres de sa famille ont usé de violence et proféré des menaces à l’encontre des membres du personnel de l’entreprise lorsqu'ils ont pénétré sur Tragadero Grande.
Une affaire pourtant classée
Au contraire, Máxima Acuña et sa famille ont entrepris une série de démarches juridiques afin de résoudre pacifiquement le litige les opposant à Yanacocha. Le 24 mai 2011, lorsque des employés de Yanacocha ont demandé à Jaime et Máxima de quitter le terrain qu'ils occupaient, ils ont porté plainte contre l’entreprise pour invasion de terres. Quelques mois plus tard, le 11 août, cette affaire a été classée au moment où Yanacocha demandait à la police et au procureur de faire partir la famille de Tragadero Grande. Et ceci n’est qu’un recours juridiques parmi les nombreux autres dans cette affaire.
Le procureur général a quand même décidé de poursuivre l'enquête pénale dans laquelle la compagnie minière Yanacocha devenait la partie lésée. Aucune preuve ne venant étayer les accusations d’occupation illégale de terres, nous estimons que la décision de maintenir les poursuites engagées contre Máxima Acuña est une stratégie visant à la harceler et à entraver son droit de promouvoir et défendre les droits. Les charges pénales portées contre Máxima Acuña et sa famille doivent être retirées et le procureur général doit prendre des mesures afin de prévenir l’utilisation abusive de la justice contre les défenseurs des droits humains qui travaillent sur des problématiques liées à la terre, aux territoires et à l’environnement.
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Une entreprise de discrédit
Les poursuites pénales engagées contre Máxima Acuña sont aggravées par la stigmatisation dont elle est victime. Selon des rumeurs qui circulent dans la région où elle habite, Máxima profiterait de son travail en faveur des droits humains pour s’enrichir. Aussi certains membres de la communauté la traitent-ils d’escroc. En outre, des représentants de la compagnie minière Yanacocha l’ont régulièrement accusée d’être une « squatteuse » alors même que la question de la légalité de sa propriété du terrain est en suspend.
La stigmatisation et la criminalisation des défenseurs des droits humains ont également des répercussions négatives sur les mouvements sociaux et les organisations dont ils font partie. L’amalgame entre défenseurs et « criminels » ôte toute légitimité à leur travail essentiel. Il renforce un environnement hostile au droit de promouvoir et de défendre les droits fondamentaux, ce qui, ensuite, favorise des agressions physiques contre les défenseurs, voire des meurtres.