“Tuez-les” c’est ce qu’a annoncé mercredi 1 avril, le président philippin Rodrigo Duterte lors d’une allocution télévisée. Cette injonction lancée aux forces de l'ordre et aux militaires vise notamment les “fauteurs de troubles” qui ne respecteraient pas les mesures de confinement mises en place dans le pays le 23 mars 2020 afin de lutter contre l’épidémie COVID-19.
“Au lieu de causer des ennuis, je vous enverrai dans la tombe.” Faisant référence à ses opposants politiques mais aussi à toute personne qui pourrait protester et remettre en question les mesures gouvernementales, le président philippin a ouvertement donné l'ordre à la police, aux militaires et aux responsables locaux de les tuer par balles. Nos préoccupations sont vives concernant les populations particulièrement démunies face à la propagation de l’épidémie COVID 19.
Il est très inquiétant que le président Rodrigo Duterte étende la politique du “ tirer pour tuer”, marque de fabrique dévastatrice de sa présidence, aux organes chargés du maintien de l’ordre dans le cadre de la quarantaine imposée aux communautés. Une force meurtrière et incontrôlée ne devrait pas être présentée comme un moyen de faire face à une urgence telle que la pandémie de COVID-19.
Des milliers de personnes arrêtées
Ces derniers jours, on estime que près de 17000 personnes auraient déjà été arrêtées pour le non respect du confinement et des couvre-feu déclarés dans diverses régions dans le pays, selon les sources de la police nationale philippines.
Les conditions dans lesquelles ces populations sont détenues ne sont pas acceptables. Des informations font état de sanctions inhumaines infligées à ceux qui enfreignent les mesures de quarantaine, notamment en les faisant asseoir pendant des heures en plein soleil ou en les enfermant dans des cages pour chiens. D’autres personnes ont reçu des peines de prison, or étant donné les risques élevés de transmission du COVID-19 dans les lieux de détention, prononcer des peines de prison pour faire appliquer les restrictions liées à la quarantaine au nom de la protection de la santé publique est contre-productif et donc disproportionné.
Les méthodes violentes employées pour sanctionner les personnes accusées d’avoir enfreint la quarantaine et le grand nombre d’arrestations massives qui ont principalement visé jusqu’à présent des personnes pauvres, illustrent l’approche répressive choisie par le gouvernement contre celles et ceux qui ont bien du mal à répondre à leurs besoins essentiels.
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La lutte contre la pandémie, une excuse ?
Nous demandons au président de revenir immédiatement sur ses propos dangereux et à ne pas faire usage de violence contre les personnes qui pourraient critiquer le gouvernement durant la pandémie de COVID-19.
Il est primordial que le gouvernement local ouvre le dialogue avec les habitants et apporte une aide indispensable, particulièrement aux populations les plus démunies.
Les organismes compétents doivent pouvoir enquêter sur les membres des forces de police ayant recouru à une violence disproportionnée, et les habitants de San Roque en état d’arrestation doivent être libérés. Enfin et afin de réduire la menace du virus, la vie des personnes les plus à risque doit être une question prioritaire du président Duterte.
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