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URGENCE PROCHE ORIENT

Exigez avec nous la protection sans condition des populations civiles

La surveillance généralisée permis par la législation au Bélarus  est une véritable menace pour les défenseurs des droits humains.
Liberté d'expression

Bélarus : des entreprises de télécommunications complices de la répression

Les autorités du Bélarus utilisent directement des réseaux téléphoniques gérés par les entreprises de télécommunications autrichichiennes et turques opérant dans le pays pour brider la liberté d'expression et museler la dissidence.

Les autorités du Bélarus utilisent directement des réseaux téléphoniques gérés par les entreprises de télécommunications autrichichiennes et turques opérant dans le pays pour brider la liberté d'expression et museler la dissidence.

Notre rapport, intitulé "Il suffit que les gens pensent que ça existe: société civile, culture du secret et surveillance au Bélarus démontre qu'une surveillance potentiellement illimitée, exercée 24 heures sur 24 et non contrôlée a des effets désastreux sur les militants de la société civile. Les activités les plus anodines de ces derniers, comme le fait de fixer un rendez-vous par téléphone, leur font dès lors courir des risques.

Ce rapport se base sur des entretiens réalisés entre août 2015 et mai 2016 avec plus de 50 militants des droits humains, journalistes, avocats, membres de l'opposition politique et experts en matière de technologies, entre autres, qui se trouvent soit au Bélarus soit en exil. Il montre que la crainte d'être sous surveillance affecte la vie privée, la liberté d'expression et les libertés de réunion pacifique et d'association.

Les Nord-coréens doivent être libre de communiquer, signez notre pétition qui sera remise à l'ambassadeur de Corée du Nord à l'ONU.

La lourde responsabilité des télécoms

Pour pouvoir opérer, les entreprises qui ont des activités au Bélarus ont laissé les autorités obtenir les données qu'elles voulaient, au moment où elles les voulaient. Dès lors, si le KGB (service de renseignement intérieur), par exemple, veut espionner les communications numériques, il n'a pas besoin de présenter un mandat, il n'a pas besoin de demander à l'entreprise qu'elle lui accorde un accès aux informations.

Des entreprises de télécommunications, dont certaines appartiennent à Telekom Austria Group et à Turkcell, rendent cela possible en accordant au gouvernement un accès quasi illimité aux communications et aux données personnelles de leurs clients. Pour pouvoir mener des activités au Bélarus, elles sont tenues de donner aux autorités un accès à distance à toutes les communications par téléphone et par Internet de leurs utilisateurs.

Les entreprises de télécommunications ont de lourdes responsabilités. La technologie favorise généralement la liberté d'expression, mais l'expansion des technologies de l'information au Bélarus a eu pour effet d'accroître les risques de répression. Il faut absolument que les entreprises de télécommunications opposent une résistance aux abus liés aux technologies des communications qui se traduisent par des violations du droit au respect de la vie privée et du droit à la liberté d'expression.

L'avenir en matière de liberté sur Internet dépend en grande partie de l'attitude des entreprises de télécommunications : elles peuvent soit s'opposer aux mesures gouvernementales qui outrepassent les limites en ce qui concerne le respect de la vie privée et de la liberté d'expression, soit se soumettre aux exigences des autorités afin de protéger leur chiffre d'affaires. En choisissant la seconde option, elles se rendent complices de violations graves des droits humains.

Au Bélarus, les militants et les journalistes nous ont confié leurs inquiétudes face à cette surveillance © Max Sarychau

Quand communiquer devient un risque pour les militants

Des militants nous ont dit que le secret absolu entourant les activités de surveillance les force à supposer qu'ils sont en permanence surveillés. Un journaliste indépendant, dont l'identité n'est pas révélée, a déclaré :

La plupart des gens n'osent pas parler ouvertement par téléphone. C'est comme si cela faisait partie de notre mentalité. On a depuis toujours l'impression de vivre dans la peur, que tout est dangereux, et qu'on ne peut exercer aucun contrôle ni aucune influence sur cette situation.»

Un journaliste indépendant au Bélarus

Le simple fait de rechercher des financements pour une organisation, de passer des coups de fil ou d'organiser une réunion comporte des risques ; les militants disent qu'ils craignent de voir les informations sur leur vie privée ou leur situation financière utilisées pour engager contre eux des poursuites, pour les discréditer ou pour les soumettre à un chantage. Des militants nous ont expliqué que la police était manifestement informée de l'heure et du lieu de leurs réunions, manifestations et autres activités publiques avant qu'elles n'aient eu lieu, même quand ils n'avaient fait que parler au téléphone de ces activités.

Une législation permettant une surveillance généralisée

La législation du Bélarus oblige les entreprises à rendre leur réseau compatible avec le système technique SORM (un acronyme qui peut se traduire par « Système informatique pour les opérations de recherche »), qui permet aux autorités d'avoir accès aux communications sans avoir besoin de faire appel à l'opérateur ou même de l'en informer. Les entreprises doivent aussi conserver les informations sur les équipements et les services Internet de leurs clients pendant cinq à dix ans, afin que les autorités puissent continuer d'y accéder à distance.

L'utilisation de ce système est peu contrôlée et aucune information n'est rendue publique quant à la fréquence de son utilisation et aux buts recherchés. Les autorités recourent à des arguments très imprécis pour justifier cette surveillance sur le plan juridique. Par exemple, les menaces pesant sur la sécurité nationale peuvent justifier cette surveillance, mais la législation du Bélarus prévoit 30 types différents de menaces pour la sécurité nationale, notamment le « recul du bien-être et de la qualité de vie », la « hausse du chômage », les « investissements étrangers inadéquats ou de mauvaise qualité » et les « tentatives de détruire les traditions spirituelles et morales du pays et les révisions tendancieuses de l'histoire ». Les autorités n'ont pas besoin de l'approbation d'un juge ou d'une décision de justice pour lancer une opération de surveillance.

Le Bélarus doit mettre en place des mécanismes de contrôle des pratiques de surveillance afin de les mettre en conformité avec les normes internationales relatives aux droits humains.