En Algérie, le procès d'un blogueur qui encourt la peine de mort pour des accusations d'espionnage forgées de toutes pièces ternit un peu plus le bilan du pays en termes de droits humains. Explications.
Mise à jour 28/05/2018 : Le blogueur Merzoug Touati a été condamné à 10 ans de prison et à une amende de 50 000 dinars algériens (environ 365 euros) pour des publications en ligne.
Merzoug Touati est inculpé de charges liées à un message publié sur Facebook et à une vidéo publiée sur YouTube qui, selon les autorités, ont encouragé les troubles civils. Il est détenu depuis janvier 2017.
Emprisonné pour avoir exprimé ses opinions pacifiques
Les commentaires publiés par Merzoug Touati avant que son compte Facebook et son site Internet ne soient supprimés ne contenaient ni incitation à la violence ni appel à la haine, et ses publications entraient dans le cadre de la liberté d'expression en lien avec son travail de journaliste citoyen.
Diplômé de l'université, Merzoug Touati était au chômage au moment de son interpellation. Il n'était affilié à aucun parti politique ni à aucune association. En 2015, il a commencé à gérer une page Facebook et le blog alhogra.com, supprimé depuis. Ses sujets de prédilection étaient la situation politique et les droits humains en Algérie.
Chronologie des faits
Dans son premier message publié le 2 janvier 2017, il appelait les habitants de Béjaïa à manifester contre la nouvelle loi de finances. Dans sa vidéo postée sur YouTube le 8 janvier, il interviewait un porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères qui niait toute implication des autorités israéliennes dans les manifestations en Algérie – contredisant les affirmations des autorités algériennes.
Merzoug Touati a ensuite été arrêté le 18 janvier 2017 après avoir publié un commentaire sur Facebook et une interview filmée sur sa chaîne YouTube.
Le 22 janvier 2017, le juge d'instruction du tribunal de Béjaïa a ordonné la détention provisoire de Merzoug Touati, dans l'attente des investigations sur les chefs d'inculpation englobant l'incitation à la violence et l'intelligence avec une puissance étrangère.
Le 24 octobre, la chambre d'accusation du tribunal de Béjaïa a soumis l'affaire au tribunal pénal, inculpant Merzoug Touati d'« incitation à prendre les armes contre l'autorité de l'État », « incitation à un attroupement non armé », « intelligence avec une puissance étrangère dans le but de nuire aux relations diplomatiques » et « incitation à des rassemblements et des sit-ins dans des lieux publics ».
En novembre 2017, les avocats de la défense ont fait appel de l’acte d'inculpation devant la Cour suprême. Toutefois, en avril 2018, Merzoug Touati leur a demandé de renoncer à l'appel, car il craignait que la procédure ne prenne plus de temps que le jugement du tribunal pénal.
L'avocat de Merzoug Touati, Salah Dabouz, a déclaré que « la détention du blogueur a été prolongée à deux reprises pour une durée de quatre mois, la deuxième prolongation ayant expiré le 22 janvier 2018. Cependant, le juge d'instruction n'a pas ordonné de renouvellement depuis lors. » Aux termes de l'article 59 de la Constitution algérienne, la détention provisoire doit rester une mesure exceptionnelle et la loi punit les actes et les faits d’arrestation arbitraire.
Merzoug Touatise se trouve actuellement à la prison d'El Khemis, à Béjaïa, une ville du nord du pays. Il a observé au moins trois grèves de la faim pour protester contre le prolongement de sa détention. Son procès doit s'ouvrir le 24 mai.
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