Nasrin Sotoudeh, éminente avocate iranienne spécialisée dans la défense des droits humains et des droits des femmes, a été condamnée à un total de 38 ans de prison et 148 coups de fouet à l’issue de deux procès manifestement iniques. Une injustice sans nom.
Cette semaine, le bureau d’application des peines de la prison d’Evin à Téhéran où elle est incarcérée l’a informée qu’elle a été reconnue coupable de sept chefs d’inculpation et condamnée à 33 ans de prison et 148 coups de fouet, dans le cadre d’une deuxième affaire.
Elle est notamment inculpée, en représailles de son travail pacifique en faveur des droits humains, d’« incitation à la corruption et à la prostitution », d’avoir commis ouvertement « un acte immoral… en apparaissant en public sans porter le hijab (voile) » et de « troubles à l’ordre public ».
Elle devra donc passer au total 38 années derrière les barreaux.
L’acharnement judiciaire
Lors du prononcé du jugement, l’article 134 du Code pénal iranien a été appliqué, qui autorise les juges à imposer une peine plus élevée que la peine obligatoire maximale, lorsque l’accusé fait l’objet de plus de trois chefs d’inculpation.
Dans le cas de Nasrin, le juge Mohammad Moghiseh a appliqué la peine maximale prévue par la loi pour chacun des sept chefs d’inculpation et lui a infligé quatre années supplémentaires, faisant passer sa peine du maximum statutaire de 29 à 33 ans.
Incarcérer une défenseure des droits humains en raison de ses activités pacifiques est déplorable, mais le fait que le juge ait usé de son pouvoir discrétionnaire pour qu’elle soit enfermée pendant plus longtemps que la durée requise au titre du droit iranien ajoute à l’injustice flagrante de sa condamnation.
C’est la condamnation la plus sévère que nous avons recensée contre un défenseur des droits humains en Iran ces dernières années. Cela laisse à penser que les autorités, encouragées par l’impunité généralisée en matière de violations des droits humains, durcissent leur répression.
Ciblée à cause de son engagement pour les droits humains
Nasrin Sotoudeh a consacré sa vie à défendre les droits humains, et des femmes en particulier, et à dénoncer la peine de mort.
En tant qu’avocate, elle a notamment défendu des femmes protestant contre les lois relatives au port obligatoire du voile en Iran.
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Il est révoltant que les autorités iraniennes la punissent pour son travail pacifique en faveur des droits humains. Ce jugement ternit davantage la réputation de l’Iran, un pays déjà tristement connu pour oppresser les droits des femmes.
Il est urgent que la communauté internationale, notamment l’Union européenne, qui entretient un dialogue actif avec l’Iran, prenne publiquement position contre cette condamnation honteuse et intervienne pour que Nasrin Sotoudeh soit libérée immédiatement et sans condition.
Précision
D’après un article de l'Agence de presse de la République islamique d’Iran datant du 11 mars, le juge Mohammad Moghiseh aurait déclaré aux journalistes que Nasrin Sotoudeh a été condamnée à sept ans de prison : cinq années pour « rassemblement et collusion en vue de commettre des infractions compromettant la sécurité nationale » et deux années pour « outrage au Guide suprême ».
Aucune autre information n’était fournie et l’article ne disait pas clairement si le juge faisait référence à une autre affaire. S’il s’agit de la même affaire, nous ne sommes pas en mesure pour l’instant d’expliquer pourquoi ces informations contredisent celles qui ont été fournies à Nasrin Sotoudeh par le bureau d’application des peines de la prison d’Evin.
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