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URGENCE PROCHE ORIENT

Exigez avec nous la protection sans condition des populations civiles

© Press Association/Lee Jin-Ma/AP

© Press Association/Lee Jin-Ma/AP

Corée du Sud

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 155 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Corée du Sud en 2023.

Le gouvernement a adopté des plans visant à réduire les émissions industrielles de carbone, mais pas de législation prévoyant une réduction progressive du recours au charbon dans la production d’électricité. La construction d’une nouvelle centrale électrique à charbon s’est poursuivie. Les droits des femmes ont été encore davantage mis à mal, puisque le gouvernement a maintenu ses projets controversés de suppression du ministère de l’Égalité des genres et de la Famille et de réduction des budgets alloués à la prévention et à la lutte contre les violences faites aux femmes. Une ligne de plus en plus dure a été adoptée à l’égard des manifestant·e·s pacifiques, notamment de celles et ceux qui militaient en faveur des droits du travail et des personnes en situation de handicap. La détention de personnes réfugiées et migrantes pour une durée illimitée a été jugée inconstitutionnelle.

CONTEXTE

En août, des dizaines de milliers de personnes ont manifesté pacifiquement dans la capitale, Séoul, contre le rejet par le Japon, dans l’océan Pacifique, d’eaux usées issues de la centrale nucléaire de Fukushima. En septembre, environ 30 000 manifestant·e·s ont participé à une marche en faveur de la justice climatique à Séoul.

DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN

Le gouvernement a adopté en avril le Plan fondamental sur la neutralité carbone et la croissance verte, qui prévoyait notamment de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de compenser la baisse ainsi créée des capacités de production énergétique par le recours à d’autres technologies, telles que l’énergie nucléaire.

En juin, la Commission nationale des droits humains a transmis à la Cour constitutionnelle un avis appuyant les requêtes contestant la constitutionnalité de la Loi sur la neutralité carbone. Elle déplorait dans cet avis que les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre soient trop bas et fassent injustement peser sur les générations futures la charge de réduire ces émissions.

Présentée en 2022, la proposition de loi sur l’abandon progressif du charbon, qui comprenait des dispositions sur la mise à l’arrêt des projets de centrales à charbon en cours de construction et l’interdiction de l’octroi de nouvelles licences, était toujours en attente d’examen à la fin de l’année. Pendant ce temps, les travaux de construction d’une nouvelle centrale à charbon à Samcheok, dans la province du Gangwon, se sont poursuivis.

LIBERTÉ D’EXPRESSION, D’ASSOCIATION ET DE RÉUNION

L’érosion des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion s’est poursuivie, dans un contexte de répression gouvernementale des manifestations « illégales ».

En janvier, la compagnie municipale de transport Seoul Metro a porté plainte contre le groupe de défense des droits des personnes en situation de handicap Solidarité contre la discrimination liée au handicap (SADD). Elle lui réclamait 601,45 millions de wons sud-coréens (environ 450 000 dollars des États-Unis) de dommages et intérêts pour les retards de train et les pertes dues aux manifestations organisées par SADD depuis 2021 contre l’inaccessibilité des trains aux personnes en situation de handicap. Dans le cadre de la campagne de SADD en faveur d’un meilleur accès aux transports publics, des personnes en fauteuil roulant étaient montées à bord des trains et en étaient redescendues de manière répétée pour attirer l’attention sur leurs revendications en faveur d’investissements dans des rampes pour fauteuils roulants, des ascenseurs à l’intérieur des stations de métro et d’autres mesures favorisant l’accessibilité.

En septembre la Cour constitutionnelle a jugé conformes à la Constitution les dispositions de la Loi relative à la sécurité nationale interdisant les activités « hostiles à l’État », « servant les intérêts de l’ennemi » et d’« espionnage ». Cette loi, contre laquelle de multiples recours ont été formés, a été utilisée pour faire taire la dissidence et engager des poursuites arbitraires contre des personnes qui avaient exercé pacifiquement leurs droits à la liberté d’expression et d’association.

Toujours en septembre, la Cour constitutionnelle a déclaré anticonstitutionnelle une loi prévoyant des peines allant jusqu’à trois ans d’emprisonnement pour toute personne qui tenterait d’envoyer en Corée du Nord des messages hostiles à Pyongyang, par exemple des tracts transportés par ballon ou via des cours d’eau traversant la frontière. Selon la Cour, cette loi n’était pas conforme aux garanties constitutionnelles relatives à la liberté d’expression.

DROITS DES TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS

Le harcèlement visant les défenseur·e·s des droits du travail s’est intensifié, sur fond de discours antisyndicalistes de la part du président, Yoon Suk-yeol. La police a ouvert des enquêtes pénales sur les activités de dizaines d’adhérent·e·s syndicaux au cours de l’année et a mené des perquisitions dans des bureaux de syndicats. Elle a procédé à une perquisition et à des saisies dans les locaux du Syndicat coréen des ouvriers du bâtiment le 1er mai.

Le même jour, un cadre de ce syndicat, Yang Hoe-dong, s’est immolé par le feu devant l’antenne de Gangneung du tribunal de district de Chuncheon. Il est mort le lendemain. Visé par une enquête en lien avec ses activités syndicales, il s’était notamment vu reprocher d’avoir exercé un « chantage » contre des entreprises de construction afin qu’elles versent des cotisations syndicales et embauchent des personnes syndiquées.

Le 31 mai, la police a démoli un autel à la mémoire de Yang Hoe-dong, faisant quatre blessés dans l’opération, et a menacé d’utiliser du gaz poivre pour disperser une manifestation pacifique organisée par la Confédération coréenne des syndicats.

DISCRIMINATION

FEMMES ET FILLES

Le gouvernement a maintenu son projet controversé d’abolition du ministère de l’Égalité des genres et de la Famille, qu’il n’avait cependant pas mené à bien à la fin de l’année. En octobre, il a annoncé d’importantes coupes dans le budget alloué en 2024 à la prévention des violences faites aux femmes et au soutien aux victimes, faisant naître de vives critiques de la part de centaines d’organisations de défense des droits des femmes. Le 24 août, des manifestations ont été organisées à Séoul pour exiger des autorités qu’elles accentuent leurs efforts de lutte contre les violences faites aux femmes, après l’homicide au début du mois d’une femme dans le parc de Sillim- dong, dans l’arrondissement de Gwanak, à Séoul.

En août également, un réseau de personnes militant en faveur de l’avortement sécurisé a formé un recours auprès de la Commission nationale des droits humains, au motif que le gouvernement portait atteinte au droit à la santé des femmes en n’inscrivant pas le droit à l’avortement dans la loi. En novembre, le Comité des droits de l’homme [ONU] a appelé le gouvernement à prendre des mesures appropriées, notamment sur le plan législatif, pour mettre en application un arrêt de 2019 de la Cour constitutionnelle qui dépénalisait l’avortement afin qu’il soit accessible en toute sécurité.

PERSONNES LGBTI

En février, la haute cour de Séoul a ordonné au Service national d’assurance maladie de rétablir la couverture de Kim Yong-min en tant que personne à charge de son conjoint de même sexe. Il s’agissait de la première décision d’une juridiction de Corée du Sud reconnaissant légalement les couples de même sexe. Cet arrêt parvenait à la conclusion que le système d’assurance entre conjoints appliqué par l’assurance maladie était discriminatoire étant donné qu’il n’octroyait pas les mêmes avantages aux couples de même sexe qu’aux autres couples. Le Service national d’assurance maladie a fait appel de cette décision.

En mai, plusieurs membres de l’Assemblée nationale issus de différents partis ont soumis conjointement une proposition de loi sur l’égalité devant le mariage visant à modifier le Code civil pour que le mariage entre personnes du même sexe soit autorisé. Si cette proposition semblait avoir peu de chances d’être adoptée, elle était néanmoins considérée comme une avancée symbolique importante permettant d’exercer une pression accrue sur le gouvernement pour qu’il élargisse la définition de la « famille ».

En mai également, la Commission nationale des droits humains a fait des recommandations à la Cour suprême l’invitant à remanier les règles qu’elle appliquait en matière de reconnaissance du genre des personnes trans afin que les normes relatives aux droits humains soient respectées. Aucune mesure n’avait été prise en ce sens à la fin de l’année.

Le 26 octobre, la Cour constitutionnelle a confirmé pour la quatrième fois la constitutionnalité de l’article 92-6 du Code pénal militaire, qui érigeait en infraction les relations sexuelles consenties entre personnes du même sexe au sein de l’armée coréenne.

DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES

Un arrêt de la Cour constitutionnelle laissait entrevoir des perspectives d’amélioration de la protection des personnes réfugiées et migrantes en Corée du Sud. Le 23 mars, celle-ci a en effet jugé que les dispositions de la Loi relative au contrôle de l’immigration, notamment la détention pour une durée illimitée des personnes étrangères visées par une mesure d’expulsion et l’absence de contrôle indépendant des décisions relatives à la détention, étaient inconstitutionnelles et contraires aux principes de proportionnalité et de régularité de la procédure. Le ministère de la Justice a annoncé qu’il ferait appel de cette décision.

DROITS DES ENFANTS

Le 23 mars, la Cour constitutionnelle a estimé que les dispositions de la Loi sur l’enregistrement des liens familiaux qui rendaient presque impossible l’enregistrement de la naissance par le père biologique d’un enfant né hors mariage étaient contraires à la Constitution. Elle a confirmé que le droit d’être déclaré à la naissance devait être garanti à tous les enfants du pays, indépendamment de leur nationalité ou de leur situation.

VIOLENCES SEXUELLES OU FONDÉES SUR LE GENRE

Le 26 janvier, le ministère de la Justice a rejeté un projet, annoncé dans la journée par le ministère de l’Égalité des genres et de la Famille, qui visait à réviser la définition légale du viol figurant dans le Code pénal afin d’y inclure les rapports sexuels non consentis. Selon la définition en vigueur dans le pays, des preuves de « violence ou intimidation » étaient requises, ce qui était incompatible avec les normes internationales, en vertu desquelles l’absence de consentement constituait un aspect fondamental de la définition du viol.

PEINE DE MORT

Plusieurs faits nouveaux ont laissé craindre que la Corée du Sud puisse envisager une reprise des exécutions. En avril, le parquet suprême a annoncé son intention d’instaurer la peine de mort pour les infanticides et les infractions liées à la vente et la distribution de stupéfiants aux mineur·e·s. En août, le ministre de la Justice a ordonné aux établissements pénitentiaires d’inspecter leurs installations destinées aux exécutions et de procéder aux opérations de maintenance nécessaires.

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