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URGENCE PROCHE ORIENT

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Les autorités ukrainiennes continuent de nier la pratique de la détention secrète, malgré des preuves accablantes. © AFP/Getty Images
Peine de mort et torture

Ukraine : 13 personnes libérées après une détention secrète

De nouvelles informations sur la pratique de la détention secrète par les autorités ukrainiennes ont été dévoilées. Cela fait suite à la libération de 13 personnes d'un centre des services de sécurité ukrainiens (SBU), à Kharkiv les 25 juillet et 2 août derniers.

De nouvelles informations sur la pratique de la détention secrète par les autorités ukrainiennes ont été dévoilées. Cela fait suite à la libération de 13 personnes d'un centre des services de sécurité ukrainiens (SBU), à Kharkiv.

Leur libération intervient après que notre organisation et Human Rights Watch ont dévoilé que les autorités ukrainiennes et les séparatistes pro-Russes ont recours à la torture et la détention secrète dans le cadre du conflit dans l'est de l'Ukraine. Ces révélations sont contenues dans un rapport conjoint publié le 21 juillet sous le titre ‘You Don’t Exist.’Arbitrary Detentions, Enforced Disappearances, and Torture in Eastern Ukraine.

DES LIBÉRATIONS SUITE À L'ENQUÊTE

Avant la publication du rapport, nous avions rencontré le procureur général militaire d'Ukraine avec Human Rights Watch, et nous lui avions remis la liste de 16 personnes qui seraient toujours détenues à Kharkiv. Il avait promis de superviser personnellement l'enquête sur la pratique de la détention secrète.

Depuis cette rencontre, nous avons appris que six hommes avaient été libérés le 25 juillet, et six hommes et une femme le 2 août. Parmi les personnes libérées, 12 figuraient sur la liste des 16 noms remise au procureur général militaire. L'une des personnes figurant sur la liste initiale avait déjà été libérée en mars 2016. Trois autres ont été transférées du centre de détention secrète en avril 2016, et l'une d'entre elles a été libérée le 2 août.

Les autorités ukrainiennes continuent de nier la pratique de la détention secrète, malgré des preuves accablantes. Si la libération de ces 13 personnes est bien entendu une très bonne nouvelle, elle ne fait malheureusement que confirmer la nécessité d'enquêter sur ces abus, d'y mettre un terme et de rendre justice aux victimes.

DES MANOEUVRES VISANT À DISSIMULER LE RECOURS A LA DÉTENTION SECRÈTE

Des représentants de nos organisations ont interrogé cinq prisonniers récemment libérés de détention secrète. Leurs histoires confirment les conclusions choquantes du rapport "You Don't Exist". Trois d'entre eux – Mykola Vakarouk, Viktor Atchykhine et Dmytro Koroliov – sont décidés à obtenir justice. Les deux autres ont demandé à garder l'anonymat par crainte de représailles contre eux-mêmes ou leurs familles.

D'après les entretiens menés avec d'anciens prisonniers, il ressort que les autorités ukrainiennes ont mis en place divers stratagèmes visant à cacher le recours à la détention secrète au centre du SBU, à Kharkiv.

Viktor Atchykhine par exemple a « disparu » de son domicile à Oukraïnsk le 7 décembre 2014 et a été libéré le 25 juillet 2016. Il nous a raconté que les gardiens l'ont changé de lieu à trois reprises durant ses 597 journées de détention illégale afin de cacher sa présence à des observateurs indépendants. Le 10 février 2015, les gardiens ont dit aux détenus de rassembler leurs affaires et de se couvrir la tête de sacs en plastique, et les ont conduits de leurs cellules vers un autre étage du bâtiment. Ils ont passé plusieurs heures assis par terre dans différentes pièces, avant d'être reconduits dans leurs cellules. Ils ont ajouté que leurs cellules avaient été nettoyées et aérées afin d'effacer toute trace de leur présence. Plus tard, ils ont entendu des gardiens affirmer que « quelqu'un d'officiel » visitait le centre. D'autres mesures similaires ont été prises le 20 avril et le 20 mai 2016.

À leur libération, les gardiens ont remis aux détenus leur passeport et entre 50 et 200 hryvnas (entre 1,75 et 7 euros) « pour frais de transport ». Ils les ont explicitement avertis de garder le silence sur leur détention secrète aux mains du SBU et les ont menacés de graves répercussions s'ils parlaient publiquement de ce qu'ils avaient subi.

Les autorités ukrainiennes doivent mener une enquête approfondie, indépendante et efficace sur ces cas et à assurer la sécurité des prisonniers relâchés.

LE CAS DE VLADIMIR BEZOBRAZOV

D'après les personnes interrogées par les chercheurs de nos organisations, au moins cinq autres prisonniers se trouvent toujours en détention secrète : deux Russes et deux Ukrainiens de Kharkiv. Selon certaines informations, le cinquième souffre de troubles mentaux, mais les prisonniers libérés récemment n'ont pas pu fournir d'informations sur son identité.

L'une des personnes maintenues en détention secrète est le russe Vladimir Bezobrazov. Il a été arrêté alors qu'il se trouvait en vacances avec sa famille à Karolino-Bougaz, dans la région d'Odessa, en mai 2014.

Le responsable de l'unité locale des gardes-frontières l’a entendu tenir des propos en faveur des séparatistes pro-Russes dans un café et l'a arrêté sur-le-champ.

En mars 2015, des médiateurs ukrainiens ont proposé de le libérer en échange d'un combattant ukrainien capturé par des séparatistes pro-Russes à Louhansk. Mais Vladimir Bezobrazov a été enlevé à la sortie du tribunal. On ignore où il se trouve depuis. Entre mai 2015 et août 2016, Lioudmila Korobova a reçu un appel téléphonique de son fils et plusieurs coups de téléphone de ses compagnons de cellule libérés confirmant sa détention au centre de Kharkiv.

L'état de droit est déjà affaibli en Ukraine. Les autorités ukrainiennes ne peuvent espérer restructurer leur système judiciaire défaillant tant que des secteurs des forces d'application des lois se livrent à des pratiques aussi nuisibles en toute impunité. Les intérêts de l'Ukraine seront bien mieux servis en faisant face à ce problème qu'en le niant.