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Venezuela. Les Nations unies doivent renouveler le mandat d’expert·e·s indépendants
L’établissement des responsabilités devant la communauté internationale s’impose en urgence, sur fond d’intensification de la répression post-électorale
Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies doit renouveler le mandat de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur le Venezuela, ont affirmé lundi 9 septembre 30 organisations nationales et internationales qui défendent les droits humains au Venezuela.
La Mission peut jouer un rôle clé dans la responsabilisation et maintenir un suivi international, tandis que le pays est en proie à une répression généralisée depuis les élections du 28 juillet, ont souligné les organisations.
Les trois expert·e·s composant la Mission présenteront leur cinquième rapport le 19 septembre, lors de la 57e session du Conseil des droits de l’homme, qui se tiendra du 9 septembre au 11 octobre 2024. Une résolution est requise afin que le mandat soit prolongé au-delà d’octobre.
Par le passé, un groupe de pays d’Amérique latine, ainsi que le Canada, ont piloté cette initiative et présenté un texte établissant l’adoption du mandat de la Mission. Si le renouvellement du mandat est soumis au vote des États membres du Conseil, il nécessitera une majorité relative.
Depuis les élections présidentielles, les Vénézuélien·ne·s sont confrontés à une répression brutale visant les personnes ayant exercé leur droit à la participation politique et à la protestation, des dirigeant·e·s politiques, des journalistes, des défenseur·e·s des droits humains et d’autres personnes appartenant à l’opposition ou perçues comme telles, ce qui rend la nécessité de renouveler le mandat des expert·e·s plus urgente que jamais, ont déclaré les organisations.
Le Conseil des droits de l’homme a créé la Mission en 2019 dans le but d’enquêter sur les « exécutions extrajudiciaires, les disparitions forcées, les détentions arbitraires et la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants commis depuis 2014 », notamment les violences sexuelles et sexistes, dans le but de « garantir la pleine responsabilité des auteurs et la justice pour les victimes ». Son mandat a été prolongé deux fois, en octobre 2020 et 2022.
La Mission a été l’un des premiers mécanismes internationaux à affirmer que les autorités vénézuéliennes avaient commis de graves violations des droits humains dans le cadre d’attaques généralisées et systématiques contre la population civile, qui pourraient constituer des crimes contre l’humanité. Dans ses rigoureux rapports, elle a déterminé que des des autorités de rang intermédiaire et supérieur, en particulier le chef de l’État, étaient potentiellement responsables de violations des droits humains telles que des exécutions extrajudiciaires, des détentions arbitraires, des actes de torture, des violences sexuelles, ainsi que des abus contre des manifestant·e·s. La Mission a également évoqué le rôle actif du pouvoir judiciaire vénézuélien dans la commission de ces violations et les différents mécanismes répressifs de l’État, notamment un projet visant à réprimer l’opposition ou les personnes perçues comme y appartenant, et l’absence d’une véritable réforme de l’appareil de sécurité publique.
Des millions de Vénézuélien·ne·s ont participé aux élections présidentielles, malgré les irrégularités et les violations des droits humains qui ont entaché le processus, notamment les arrestations de membres de l’opposition, les discours stigmatisants, les attaques contre l’espace civique, les disqualifications arbitraires de candidat·e·s de l’opposition et les restrictions à la participation politique.
Le Conseil national électoral (CNE) a annoncé que Nicolás Maduro avait remporté les élections, mais un groupe technique d’experts électoraux de l’ONU et du Centre Carter, qui étaient les seules missions techniques d’observation accréditées par le CNE lui-même pour observer le scrutin, a conclu que le processus manquait de transparence et d’intégrité. L’opposition a publié sur Internet des bulletins de vote assurant qu’Edmundo González Urrutia avait remporté les élections avec une marge considérable.
Depuis le 29 juillet, les autorités vénézuéliennes ont activé leur politique de répression, bafouant les droits humains, notamment les droits à la vie, aux garanties judiciaires et à la liberté.
Les forces vénézuéliennes de sécurité, ainsi que des groupes armés pro-gouvernementaux connus sous le nom de « collectifs », ont réprimé les manifestations contre le résultat électoral annoncé, faisant semble-t-il plus de 20 morts parmi les manifestant·e·s et les passant·e·s. Selon Nicolás Maduro, plus de 2 400 personnes ont été arrêtées, dont 120 filles et garçons mineurs. De nombreuses personnes arrêtées ont été inculpées de « terrorisme » et d’autres types d’infractions pénales à la définition très large. Le système judiciaire vénézuélien, notamment la Cour suprême de justice ou le parquet général, manque d’indépendance et d’impartialité, comme la Mission l’a rigoureusement établi dans ses rapports.
D’autres conditions structurelles favorisant des violations graves et ayant conduit à la création de la Mission persistent et se sont aggravées, notamment l’impunité et le manque d’indépendance judiciaire et de réparation pour les victimes, selon les organisations.
En reconduisant le mandat de la Mission, les gouvernements indiqueraient clairement aux auteurs de violations que la communauté internationale s’engage à les amener à rendre des comptes pour les crimes internationaux et les violations continues des droits humains perpétrés, ainsi qu’à soutenir la lutte de tant de victimes pour obtenir vérité et justice, ont affirmé les organisations signataires. Les enquêtes en cours et les rapports publics de la Mission sont également essentiels pour éviter une nouvelle détérioration en cette période post-électorale critique.
Le renouvellement du mandat permettrait à la Mission de continuer à recueillir des preuves sur les graves violations des droits humains qui sont encore commises, d’analyser leurs causes profondes, de déterminer qui sont les éventuels responsables, de faire rapport sur les dynamiques à l’œuvre dans le pays et de fournir les recommandations nécessaires. Cela permettrait également à la Mission d’appuyer et de compléter les fonctions du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et du bureau du procureur de la Cour pénale internationale, qui mène une enquête sur les crimes contre l’humanité au Venezuela.
Interrompre le travail de la Mission à un moment aussi crucial aurait des répercussions négatives sur la protection des victimes actuelles et passées, et de la population en général, et pourrait inciter le gouvernement vénézuélien à poursuivre sa répression brutale, ont conclu les organisations.
Signataires :
Acceso a la Justicia
AlertaVenezuela
Amnesty International
Caleidoscopio Humano
Centre Justice et Paix (Cepaz)
Centre pour les défenseur·e·s et la justice (CDJ)
Centre pour la justice et le droit international (CEJIL)
CIVICUS
Commission internationale de juristes
Comité des parents des victimes des événements de février-mars 1989 (COFAVIC)
Espacio Público
Fédération Internationale des droits de l’homme (FIDH)
Foro Penal
Freedom House
Fundación para el Debido Proceso (DPLF)
Global Centre for the Responsibility to Protect (GCR2P)
Human Rights Watch
Ideas por la Democracia
Justicia, Encuentro y Perdón
Laboratorio de Paz
Observatorio Global de Comunicación y Democracia (OGCD)
Observatorio venezolano de conflictividad social (OVCS)
The Washington Office on Latin America (WOLA)
ONG Red Reto
Organisation mondiale contre la torture (OMCT)
Programa Venezolano de Educación Acción en Derechos Humanos (Provea)
Red Electoral Ciudadana (REC)
Robert F. Kennedy Human Rights
International Service for Human Rights
Voto Joven
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