Le 17 décembre 2020, le Parlement danois a adopté un projet de loi qui, une fois promulgué, reconnaîtra enfin qu’un rapport sexuel sans consentement est un viol. Un grand jour pour les femmes au Danemark.
« Ce jour historique n’arrive pas par hasard, a réagi Anna Błuś, notre chercheuse sur les droits des femmes. C’est le résultat d’années de travail de campagne mené par des victimes qui, en racontant leurs histoires douloureuses, contribuent à faire en sorte que d’autres femmes n’aient pas à subir le même calvaire. »
Des années de lutte
Pendant des années, nous avons milité pour la modification de cette loi aux côtés d'une large coalition d'organisations de défense des droits des femmes. Sous les bannières de la campagne #LetsTalkAboutYes, des milliers de personnes ont participé à des manifestations dans tout le Danemark et les militants ont rencontré à de nombreuses reprises des parlementaires et des représentants du gouvernement.
Jusqu'à présent, la loi danoise définissait le viol sur le fait qu'il y ait eu violence physique, menace ou coercition ou que la victime ait été "incapable de résister". Or l'hypothèse selon laquelle une victime donne son consentement parce qu'elle n'a pas résisté physiquement est erronée. La "paralysie involontaire" ou le "gel" a été reconnu par les experts comme une réponse physiologique et psychologique très courante aux agressions sexuelles.
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Si la nouvelle loi n’est pas parfaitement claire dans son commentaire concernant le fait que la passivité ne peut pas être considérée comme un consentement, elle n’en demeure pas moins, malgré cette faiblesse, un grand pas en avant pour le Danemark.
Le 12ème pays d'Europe à faire ce pas en avant
Aussi incroyable que cela puisse paraître, le Danemark est seulement le 12ème pays d’Europe à reconnaître les rapports sexuels sans consentement comme des viols. Mais cette nouvelle positive marque une accélération dans l’évolution des lois sur la reconnaissance du viol et d’autres pays s’apprêtent également à modifier leur législation.
La Grèce a par exemple déjà modifié sa définition du viol en 2019. L’Espagne et les Pays-Bas ont quant à eux récemment annoncé des projets de modification de leur législation nationale pour reconnaître ce fait.
Une étape cruciale vers le changement
« Puisque la culture découle de la loi, la modification des législations est une première étape cruciale vers le changement » a insisté Anna Błuś. « Son adoption doit permettre de favoriser une culture où chacun accepte que le sexe est basé sur le consentement et où les professionnels du système légal sont pleinement conscients des stéréotypes néfastes sur le genre et des idées reçues sur le viol. »
La manière dont la loi définit le viol est un facteur décisif pour que les victimes puissent avoir accès à la justice. Il est temps de reléguer aux oubliettes les lois obsolètes et dangereuses relatives au viol et de mettre un terme à la stigmatisation généralisée et à l’impunité endémique qui entourent ce crime.
L’insupportable culture de l’impunité
Bien trop souvent au Danemark, les viols ne sont pas signalés, et même lorsque les victimes s’adressent à la police, les chances de voir les coupables jugés et condamnés sont extrêmement minces. Le ministère de la Justice danois estime qu’environ 11 400 femmes sont victimes de viol ou de tentative de viol chaque année au Danemark. D’après les recherches de l’Université du Danemark du Sud, ce chiffre serait beaucoup plus élevé et pourrait avoir atteint 24 000 en 2017. Pourtant, en 2019, seuls 1 017 viols ont été déclarés à la police, dont 79 seulement ont abouti à une condamnation.
Un rapport d'Amnesty International de 2019 sur l'accès à la justice pour les victimes de viols a révélé à quel point les femmes et les jeunes filles au Danemark continuaient d'être trahies par une législation dépassée en matière de viol. Il montrait l'impunité que les stéréotypes sexistes nuisibles à chaque étape de la procédure judiciaire faisaient obstacle à la justice.
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