Un an après les engagements visant à accueillir plus de 66 000 demandeurs d'asile se trouvant en Grèce, moins de 6 % de ces personnes ont été relocalisées. Bilan et perspectives.
Il y a un an, les Etats européens ont fièrement annoncé un plan de solidarité pour les réfugiés. Les milliers de réfugiés qui sont bloqués en Grèce allaient enfin pouvoir reconstruire leur vie dans un pays qui pourrait les offrir mieux qu’une tente dans un camp. Un an après, 3 734 personnes ont pu rejoindre un autre pays. Une bonne nouvelle pour eux, mais des milliers restent dans l’attente d’une solution.
À ce rythme, cela prendra 18 ans pour que soient respectés les engagements.
L’Autriche, la Hongrie et la Pologne n’ont accueilli personne. La Belgique, la Bulgarie, la République tchèque, la Croatie, l’Allemagne, la Slovaquie et l’Espagne ont accueilli moins de 5% de personnes qu’ils se sont engagés de protéger. De plus, le système de relocalisation n’est destiné qu’aux nationalités qui ont un taux de reconnaissance au-dessous de 75%. Les demandeurs d’asile d’Irak et d’Afghanistan sont donc exclus alors que ces personnes pourraient avoir des réelles craintes de persécution dans leur pays.
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Une vie affreuse sur le continent
En mars 2016, la frontière entre la Grèce et la Macédoine a été fermée, bloquant ainsi 47 000 réfugiés et migrants sur Grèce continental. 90% de ces personnes viennent de Syrie, d’Iraq ou d’Afghanistan et sont vraisemblablement des réfugiés qui ont le droit d’être protégé.
Environ 7 500 de ces 47 000 personnes sont logés dans des logements durs. La grande majorité vit dans une cinquantaine de camps dans des conditions insalubres ou beaucoup doivent dormir à même le sol. Personne n’y est épargné, ni les enfants, ni les personnes handicapées, ni des personnes âgées.
C’est une vie affreuse. L’eau est sale et on n’en a pas assez. Pour 8 personnes, nous avons reçu 3 litres par jour. On nous donne de nourriture mais les réfugiés se sentent mal. Nous avons besoin de vivre comme des êtres humains. Il n’y a pas de toilettes dans les tentes, pas de médicaments et les gens commencent à désespérer. Nous sommes des êtres humains, pas des animaux.
Basel, un coiffeur de Syrie qui vit dans le camp de Nea Kavala depuis février 2016.
Un climat explosif sur les îles
12 500 personnes sont arrivées en Grèce depuis la conclusion de l’accord entre l’UE et la Turquie qui prévoit, au mépris du droit international, que toute personne, migrante ou réfugiée, soit renvoyée en Turquie. Ces personnes sont depuis lors bloquées dans des camps surpeuplés et insalubres en attente d’être renvoyées vers la triste case de départ en Turquie.
Le 19 septembre, un incendie a ravagé le camp de Moria, à Lesbos, et qui a entraîné l'évacuation de milliers de demandeurs d'asile. Cet incendie ne surprend personne. Le maintien de milliers de personnes vulnérables à Lesbos dans des conditions épouvantables et dans une totale incertitude quant à leur avenir crée un climat explosif nourri par la peur et l'abattement.
Un début d'espoir avec la France
Avec 1.425 personnes qui ont été accueillies, la France est le premier pays qui aide les réfugiés à sortir de la Grèce. Cet accueil est toujours en deçà de l’engagement mais il a changé la vie de personnes qui ont pu en bénéficier. Nous avons parlé avec Karam qui s’est installé dans les Vosges avec sa famille.
Ça fait quatre mois qu'on est ici. On a une vie en sécurité ici, c'est le plus important. Vous ne pouvez pas imaginer, avant la guerre, on était en sécurité. La sécurité, c'est quelque chose qu'on ne peut pas toucher, mais qu'on sent quand on vous l'enlève.
Karam, réfugié relocalisé dans les Vosges
Dans l'est de la France, Karam attend son cours de Français © Jean Marc Viret
Les réfugiés bloqués en Grèce doivent pouvoir vivre
Chaque jour est une perte de temps pour les réfugiés. Les enfants ne vont pas à l’école. Les adultes ne peuvent pas travailler ; ils perdent leurs capacités. Comme tout le monde, les réfugiés cherchent à pourvoir pour leurs familles et vivre une vie normale en sécurité.
Chaque Etat européen doit augmenter ses engagements. En plus, le programme de relocalisation doit être élargi pour inclure tous les demandeurs d’asile. Les Etats doivent aussi permettre aux réfugiés de rejoindre leur pays par d’autres moyens en accordant des visas humanitaires et en mettant en place des procédures accélérées et accessibles de regroupement familial.
La France doit faire le choix de l'accueil
Interpellez le Président de la République. La crise des réfugiés est l’affaire du monde, de tout le monde. Au nom de la France, il doit faire le choix de l’accueil.