Poursuivis par les garde-côtes en pleine mer, les réfugiés sont persécutés sur terre. Un enfer sans réelle échappatoire.
Dans les centres de détention officiels, 20 000 personnes sont détenues au nom de la loi libyenne contre les migrations irrégulières. Là, les personnes sont détenues pour une durée indéfinie, sans pouvoir voir un juge.
Des violations des droits humains sur terre
Surtout, elles sont systématiquement maltraitées, torturées, agressées sexuellement par les gardes de ces centres de détention.
Leurs conditions de détention constituent des traitements inhumains et dégradants, du fait du manque d’eau, de nourriture, des conditions d’hygiène et de l’absence de soins disponibles.
Ces personnes peuvent également être tuées, ou laissées pour mortes après avoir été sévèrement battues ou torturées.
Certaines sont revendues pour travailler de force, ou réaliser d’autres tâches pour le compte de milices, de groupes armés ou de bandes criminelles. Ce qui démontre bien la collusion entre officiels et bandes armées et criminelles.
Un nombre inconnu – probablement des milliers – de personnes sont détenues dans de terribles conditions par des groupes privés armés. Leur sort est très certainement le même.
Celles et ceux qui ne sont pas détenues vivent dans la peur constante d’être tuées, arrêtées, enlevées, torturées et exploitées. Leur peur est d’autant plus grande que les étrangers sont victimes d’une xénophobie rampante dans la société libyenne, sentiment qui existait déjà à l’époque d’Al Gadaffi.
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...comme en mer
Même lorsqu’ils arrivent à quitter la Libye, les migrants et réfugiés ne sont pas au bout de leur cauchemar, s’ils sont interceptés par les garde-côtes libyens.
Les opérations de sauvetage sont conduites de façon violente, sans respecter les protocoles d’intervention, sans se préoccuper de la mise en danger des personnes devant être secourues.
Par exemple, le 23 mai 2017, SOS Méditerranée et Médecins sans frontières étaient engagés dans une opération de sauvetage de 1004 personnes en détresse. Les garde-côtes libyens sont arrivés sur place et ont commencé à demander les téléphones et de l’argent aux personnes devant être secourues, tout en tirant des coups de feu en l’air. Leur intervention a provoqué la panique et 60 personnes sont tombées en mer.
Un exemple encore plus éprouvant a été filmé par l’organisation Sea Watch au cours d’une opération de sauvetage où l’intervention des garde-côtes libyens a provoqué la mort de 50 personnes, l’une d’entre-elles ayant été traînée en mer par leur bateau
Lorsque les survivants sont aux mains des garde-côtes libyens, ces derniers les débarquent en Libye. De la côte, ils sont envoyés dans les centres de détention officiels, où un nouveau calvaire recommence.
Les ONG qui interviennent en mer doivent, en plus de leur mission de sauvetage, tenir compte du comportement imprévisible des garde-côtes et des menaces ou même violence qu’ils exercent à leur encontre : abordage, intimidations, violations des règles du droit maritime international.
Libye : La complicité européenne en chiffres
Depuis plus d’une décennie, l’Europe coopère avec la Libye pour y maintenir ou renvoyer des réfugiés et migrants. Voici les principes chiffres de cette complicité.
46.3 millions : c’est le montant des fonds alloués par l’Union européenne pour renforcer les capacités des autorités libyennes à gérer leurs frontières.
4 patrouilleurs à haute vitesse ont été livrés par l’Italie aux garde-côtes libyens. 6 autres seront bientôt livrés.
50 personnes meurent, le 6 novembre 2017, suite à l’intervention violente des garde-côtes libyens alors que l’ONG Sea Watch menait une opération de sauvetage.
19.333 personnes ont été interceptées en mer, en 2017, par les garde-côtes libyens afin d’être ramenées en Libye et renvoyées en détention.
500.000 réfugiés et migrants restent pris au piège en Libye.
10.000 hommes, femmes et enfants sont mort en mer, dans les trois dernières années, en tentant d’atteindre l’Europe depuis la Libye.
Des centaines de rapports, reportages, alertes ont été faits par des organisations internationales, des gouvernements, des experts de l’ONU, des organisations non gouvernementales, des médias depuis 2011 et la chute du gouvernement Al Gaddafi. Tous révèlent les graves violations commis par les autorités libyennes et des groupes armés. En toute connaissance de cause, l’UE a développé sa politique de coopération.