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URGENCE PROCHE ORIENT

Exigez avec nous la protection sans condition des populations civiles

AAP Image/Lukas Coch
Discriminations

Chine : des enfants ouïghours sont détenus et séparés de leur famille

Notre enquête donne la parole à ces parents ouïghours exilés dont les enfants sont détenus dans des « orphelinats » d’État, dans la région chinoise du Xinjiang. Témoignages.

La campagne impitoyable de détention massive que la Chine mène au Xinjiang a mis les membres de familles séparées dans une situation impossible : les enfants ne sont pas autorisés à partir, mais leurs parents risquent de subir des persécutions s'ils tentent de rentrer pour s'occuper d'eux. Ils pourraient notamment être placés en détention arbitraire ou envoyés dans des camps d’internement à des fin de « rééducation ».

La peur de représailles condamne les familles exilées au silence

Nous nous sommes entretenus avec six familles ouïghoures vivant actuellement en exil en Australie, au Canada, en Italie, aux Pays-Bas et en Turquie. Ces familles ont quitté la Chine, en 2017, avant l'intensification de la répression contre les Ouïghours et d'autres minorités musulmanes. Depuis, elles sont totalement coupées de leurs enfants, âgés de 5 ans à peine pour certains. Leurs témoignages poignants donnent un aperçu de l'ampleur des souffrances endurées par toutes ces familles ouïghoures.

Depuis 2017, on estime qu’au moins un million de personnes ont été placées arbitrairement en détention dans des centres de « transformation par l’éducation » ou de « formation professionnelle » au Xinjiang. Elles y subissent diverses formes de torture et d’autres mauvais traitements, y compris un endoctrinement politique et une assimilation culturelle forcée. Les Ouïghours installés à l’étranger hésitent souvent à parler publiquement des atteintes aux droits humains dont ils sont victimes, car ils craignent que leurs proches restés en Chine fassent l’objet de représailles. Malgré ces difficultés, ces parents ont décidé de partager publiquement leur histoire dans l’espoir que cela les aide à retrouver leurs enfants bientôt.

Des enfants lancés dans un dangereux périple pour tenter de rejoindre l'Italie

Mihriban Kader et Ablikim Memtinin ont fui le Xinjiang pour l'Italie en 2016, après avoir été harcelés par la police et avoir subi des pressions visant à les contraindre à restituer leurs passeports. Ils ont confié temporairement leurs quatre enfants à leurs grands-parents. Mais peu de temps après, la grand-mère a été emmenée dans un camp et le grand-père interrogé par la police.

Nos autres proches n’osaient pas s’occuper de mes enfants après ce qui était arrivé à mes parents. Ils avaient peur d’être envoyés dans des camps eux aussi.

Mihribanl

L’aîné a été envoyé dans un pensionnat, les trois plus jeunes enfants dans un « camp pour orphelins ». Mihriban et Ablikim n'ont pas pu entrer en contact avec eux depuis l'Italie, mais en novembre 2019, ils ont obtenu du gouvernement italien l’autorisation de faire venir leurs enfants. Les quatre enfants - âgés de 12 à 16 ans - ont voyagé seuls à travers la Chine pour rejoindre le consulat italien à Shanghai, mais ils ont été arrêtés par la police et renvoyés à l'orphelinat et au pensionnat. « Maintenant, mes enfants sont entre les mains des autorités chinoises et je ne suis pas sûre de les revoir un jour », a dit Mihriban. « Le plus douloureux, c’est que, pour mes enfants, c’est comme si leurs parents n’existaient plus, comme si nous étions décédés et qu'ils étaient orphelins. »

Nous n’avons pas entendu la voix de nos filles depuis 1 594 jours. Ma femme et moi ne pleurons que le soir, pour essayer de cacher notre chagrin à nos autres enfants qui sont là avec nous.

Omer, parent exilé

Omer et Meryem Faruh, quant à eux, ont fui vers la Turquie à la fin de l’année 2016 après que des policiers aient exigé qu’ils leur remettent leurs passeports. Le couple a confié ses deux plus jeunes enfants, âgées de 5 et 6 ans, à leurs grands-parents. Omer et Meryem ont découvert par la suite que leurs proches avaient été emmenés dans des camps ; depuis lors, ils n'ont plus aucune nouvelle de leurs enfants.

Xinjiang, une région fermée au reste du monde

La séparation des familles au Xinjiang montre les efforts inhumains que déploie la Chine pour contrôler les Ouïghours et d’autres minorités musulmanes au nom de la « lutte contre le terrorisme ». La Chine doit mettre fin aux mesures qui restreignent le droit de toutes les minorités musulmanes d’entrer et de sortir librement du pays. Elle doit fermer tous les « camps de rééducation » politique et libérer les détenus immédiatement, sans condition et sans préjugé. Nous appelons le gouvernement chinois à autoriser pleinement et sans restriction les experts des Nations unies en droits humains, les chercheurs indépendants et les journalistes à se rendre au Xinjiang pour enquêter sur la situation dans la région. Parallèlement, nous engageons les autres gouvernements à faire tout leur possible pour que les Ouïghours, les Kazakhs et les autres minorités ethniques chinoises résidant dans leur pays bénéficient d’une assistance pour tenter de localiser, contacter et retrouver leurs enfants.

 

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