Exigez avec nous la protection sans condition des populations civiles
©Daniel Guerrero
Mexique
Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 155 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains au Mexique en 2023.
Les autorités ont continué de réprimer pénalement les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique. Des défenseur·e·s de l’environnement ou des droits fonciers ou territoriaux ont fait l’objet de poursuites pour le seul fait d’avoir manifesté leur désaccord. Les meurtres de journalistes et de défenseur·e·s des droits fondamentaux étaient fréquents. Le gouvernement du Mexique n’accordait toujours pas de protection aux personnes réfugiées ou migrantes. La Cour suprême a toutefois établi qu’un individu ne pouvait pas rester plus de 36 heures dans un centre de détention des services de l’immigration. La répression pénale de l’avortement ayant été jugée inconstitutionnelle, l’accès à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) était désormais plus facile. Le nombre de féminicides restait extrêmement élevé et les crimes de ce type ne donnaient pas lieu à des enquêtes satisfaisantes. Plus de 114 000 personnes avaient été officiellement portées manquantes ou disparues depuis 1962. Les proches des personnes disparues qui tentaient de retrouver leur trace s’exposaient toujours à de sérieux risques de subir une disparition forcée ou d’être assassinés. Ils se heurtaient fréquemment à des actes d’intimidation et à des menaces. La Cour interaméricaine des droits de l’homme a estimé que le Mexique devait renoncer à la pratique de l’arraigo (détention préventive sans inculpation) et modifier son dispositif de détention provisoire. L’indépendance du système judiciaire restait menacée, notamment par la pratique consistant à placer des juges en détention arbitraire. La construction de la ligne du « Train maya » s’est poursuivie, en dépit des inquiétudes qu’elle suscitait sur le plan écologique. L’État persistait dans son refus de se désengager de la dépendance aux énergies fossiles, et la raffinerie de Dos Bocas a démarré ses activités. De nombreux États mexicains n’avaient toujours pas modifié leur Code civil pour y inscrire le mariage entre personnes de même sexe, pourtant autorisé sur l’ensemble du territoire du Mexique en 2015.
CONTEXTE
L’armée participait depuis 16 ans aux opérations de sécurité publique et le nombre de meurtres et de disparitions forcées n’a fait qu’augmenter au fil de ces années.
La Commission nationale des droits humains (CNDH) a établi que des membres de l’armée ou de la Garde nationale (force de police au niveau fédéral) s’étaient rendus coupables de graves violations des droits fondamentaux dans 28 affaires, y compris de nombreux crimes de droit international (actes de torture, exécutions extrajudiciaires et disparitions forcées).
La Cour suprême a annulé en avril le transfert de la Garde nationale sous l’autorité du ministère de la Défense. Elle a fait valoir que la Constitution indiquait expressément que la Garde nationale était une entité civile et que ses missions devaient lui être dictées par le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile. La Présidence a réaffirmé en octobre qu’elle considérait que la Garde nationale se comportait bien, et a proposé de redemander au Congrès de permettre que ce corps passe sous l’autorité du ministère de la Défense, rejetant les allégations de violations des droits humains émanant de victimes, d’organisations de la société civile et de militant·e·s des droits humains.
Le fonctionnement du ministère de la Défense restait marqué par un manque de transparence, le non-respect de l’obligation de rendre des comptes et des difficultés d’accès aux informations. La Commission pour l’accès à la vérité, la clarification historique et la promotion de la justice concernant les atteintes graves aux droits humains commises entre 1965 et 1990 a publié en octobre un rapport dénonçant l’obstruction du ministère de l’Intérieur lors de ses tentatives d’obtention de documents historiques relatifs aux violations perpétrées pendant la période de répression couverte par son mandat.
LIBERTÉ DE RÉUNION PACIFIQUE
Les autorités ont cette année encore eu recours à des poursuites pénales et à l’usage d’une force excessive contre des personnes entendant simplement exercer leur droit de manifester. Elles ont utilisé de manière abusive le système judiciaire pour traduire en justice des défenseur·e·s de l’environnement ou des droits fonciers ou territoriaux.
À San Cristóbal de las Casas, dans l’État du Chiapas, des membres du conseil d’administration du quartier de Colonia Maya ont été accusés d’enlèvement pour avoir protesté contre la construction d’immeubles d’habitation dans une zone protégée. Les poursuites engagées pour « obstruction d’un chantier public » contre Miguel López Vega et Alejandro Torres Chocolatl, deux porte- parole et défenseurs de la communauté nahua à Zacatepec, dans l’État de Puebla, ont finalement été abandonnées respectivement en mars et en juillet. Les deux hommes étaient poursuivis en raison de leur opposition à la construction d’un drainage qui risquait de polluer la Metlapanapa, une rivière locale.
Pour s’être opposés à la construction d’une caserne de la Garde nationale sur leur territoire, César Hernández Feliciano et José Luis Gutiérrez Hernández, deux défenseurs des droits de la communauté tseltal de Chilón, dans l’État du Chiapas, ont été reconnus coupables de « mutinerie » en mai.
Juan Diego Valencia Chan, Arturo Albornoz May et Jesús Ariel Uc Ortega, trois défenseurs des droits du peuple maya de Sitilpech, dans l’État du Yucatán, ont été accusés en mars d’« attaques contre des voies de communication », pour s’être opposés aux activités d’une importante porcherie installée sur leur territoire et dont ils dénonçaient l’impact en matière de pollution, notamment de l’eau, et sur la santé.
En septembre, les autorités de la ville de León, dans l’État de Guanajuato, ont reconnu avoir fait, en 2020, un usage excessif de la force face à des femmes qui manifestaient contre la violence liée au genre. Elles ont présenté leurs excuses aux victimes.
RECOURS EXCESSIF À LA FORCE
Les forces armées continuaient de recourir à une force injustifiée et excessive. Elles se sont livrées cette année encore à des exécutions extrajudiciaires. Elles bénéficiaient toujours d’une grande impunité pour les crimes commis et les violations des droits humains perpétrées.
Des soldats mexicains auraient ainsi tué, le 26 février, cinq jeunes gens qui circulaient dans un pick-up à Nuevo Laredo, dans l’État du Tamaulipas. Des images prises par une caméra de surveillance le 18 mai dans la même ville ont montré des membres des forces armées apparemment en train de tuer cinq hommes. La Commission nationale des droits humains a ouvert une enquête à la suite de la diffusion de ces images. Elle a conclu que de graves violations des droits fondamentaux avaient été commises et a recommandé à l’armée de collaborer avec les enquêteurs du parquet et d’apporter aux familles des victimes un soutien financier et psychologique.
En octobre, une juridiction pénale de Monterrey, dans l’État du Nuevo León, a reconnu la responsabilité pénale d’éléments de l’armée dans l’exécution extrajudiciaire, en 2010, de Jorge Antonio Mercado Alonso et de Javier Francisco Arredondo Verdugo, deux étudiants de l’Institut technologique et d’études supérieures de Monterrey.
La présence des forces militaires dans l’espace public s’est accrue. En janvier, 6 060 membres de la Garde nationale ont été temporairement déployés dans le métro de Mexico, officiellement pour des raisons de sécurité. Plusieurs ONG locales ont indiqué que cette mesure était selon elles inappropriée, car le principal problème était lié au manque d’entretien du réseau métropolitain et la présence de forces en uniforme n’améliorait en rien la sécurité dans les transports.
LIBERTÉ D’EXPRESSION
Les journalistes et les défenseur·e·s des droits humains étaient toujours exposés à des risques considérables. Selon l’organisation Article 19, au moins cinq journalistes ont été tués cette année pour des raisons susceptibles d’être liées à leurs activités professionnelles. Un rapport publié en 2023 par l’ONG Global Witness a fait état de la mort par homicide en 2022 de 31 défenseur·e·s des droits à la terre et à l’environnement. Au moins 13 défenseur·e·s des droits humains ont été assassinés en 2023 selon le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme. Le Mécanisme de protection des défenseur·e·s des droits humains et des journalistes a recensé pour cette année au moins 188 cas d’enlèvements, de menaces ou d’agressions physiques contre des journalistes et des militant·e·s des droits humains.
Deux nouveaux cas d’utilisation du logiciel espion Pegasus visant deux membres de l’ONG Centre des droits humains Miguel Agustín Pro Juárez (Centro PRODH) d’une part, et Alejandro Encinas, alors sous- secrétaire en charge des droits humains, d’autre part, ont été signalés, respectivement en avril et en mai. La surveillance dont ces personnes ont fait l’objet était peut-être à mettre en lien avec leur action pour faire la lumière sur de graves violations des droits humains, dans le cadre de l’affaire d’Ayotzinapa par exemple (voir Disparitions forcées).
DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES
Le nombre de personnes migrantes, demandeuses d’asile ou réfugiées arrivant au Mexique pour tenter ensuite d’aller aux États- Unis ou au Canada était en augmentation. Selon la Commission mexicaine d’aide aux réfugié·e·s (COMAR), 141 053 personnes ont demandé l’asile au Mexique en 2023. La plupart étaient originaires d’Haïti, du Honduras, de Cuba, du Guatemala ou du Salvador.
Les autorités ne faisaient toujours pas le nécessaire pour que les droits à la vie et à la sécurité des personnes migrantes, demandeuses d’asile ou réfugiées soient respectés. Le 28 mars, 40 migrants au moins sont morts dans l’incendie d’un centre de détention des services de l’immigration situé à Ciudad Juárez, dans l’État de Chihuahua. Vingt-neuf autres personnes ont dû être hospitalisées. Les migrant·e·s qui se trouvaient dans ce centre auraient été laissés enfermés alors que le feu s’était déjà déclaré.
La Cour suprême a rendu en mars un arrêt qui fera date, estimant qu’un individu ne pouvait pas rester plus de 36 heures dans un centre de détention des services de l’immigration et que, passé ce délai, il devait être remis en liberté. La Cour suprême a également déclaré que les migrant·e·s et les réfugié·e·s devaient disposer d’une aide juridique appropriée pour faire respecter leurs droits.
DROITS DES FEMMES
Les autorités ont accepté de conserver certains sites et monuments élevés à la mémoire de personnes ayant fait campagne pour les droits des femmes. Une palissade métallique avait été installée en juin autour du « Rond-Point des femmes en lutte », à Mexico, avec l’intention de supprimer ce lieu de commémoration. Toutefois, sous la pression d’organisations et de militant·e·s de la société civile, le maire de la ville, Martí Batres Guadarrama, a finalement accepté de conserver ce monument.
L’accès à l’avortement s’est amélioré. Se prononçant dans le cadre d’un recours introduit par plusieurs organisations féministes, la Cour suprême a estimé, en septembre, que le fait que l’avortement soit érigé en infraction dans le Code pénal était contraire à la Constitution. Cet arrêt avait pour corollaire l’obligation pour l’État de garantir à toutes les femmes et autres personnes en capacité d’être enceintes la possibilité de bénéficier d’une IVG. De même, la Cour suprême a déclaré que la suspension de membres du personnel médical et de sages-femmes qui avaient pratiqué, ou aidé à pratiquer, un avortement était également contraire à la Constitution, dans la mesure où elle avait un effet discriminatoire.
Les cas de violences sexuelles et de féminicides restaient très nombreux et les enquêtes menées sur ces crimes laissaient fortement à désirer. Selon le Secrétariat exécutif du Système national de sécurité publique, neuf femmes en moyenne ont été tuées chaque jour en 2023. À Ciudad Juárez, dans l’État de Chihuahua, où les féminicides ont commencé à être recensés il y a 30 ans, la justice n’avait toujours pas fait son travail dans de nombreuses affaires. Des organisations locales, des familles de victimes et Amnesty International ont publiquement rendu hommage aux femmes ayant été tuées.
Un Bureau du procureur spécialisé dans les féminicides a été créé en janvier dans l’État de San Luis Potosí, sur l’insistance des familles, qui exigeaient que ces crimes fassent l’objet d’enquêtes sérieuses. Le Bureau du procureur général de l’État de Mexico a reconnu en février que les enquêtes menées sur les féminicides dont avaient été victimes Nadia Muciño Márquez, Daniela Sánchez Curiel, Diana Velázquez Florencio et Julia Sosa Conde comportaient des carences et a présenté des excuses publiques pour les dysfonctionnements relevés.
DISPARITIONS FORCÉES
Le nombre de personnes portées manquantes ou victimes d’une disparition restait élevé. En 2023, la Commission nationale de recherche (CNB) a enregistré au moins 12 031 nouveaux cas de personnes manquantes ou disparues, parmi lesquelles 8 426 hommes, 3 596 femmes et neuf personnes non identifiées. Selon les chiffres officiels, un total de 114 004 personnes ont été portées manquantes ou disparues entre 1962 et la fin de 2023.
Les proches des personnes disparues qui tentaient de retrouver leur trace s’exposaient à de sérieux risques de subir une disparition forcée ou d’être assassinés. Ils se heurtaient fréquemment à des actes d’intimidation et à des menaces. Teresa Magueyal, qui était à la recherche de son fils depuis 2020, a été assassinée en mai à Celaya, dans l’État de Guanajuato. Griselda Armas, qui cherchait son fils depuis septembre 2022, a été tuée en octobre à Tacámbaro, dans l’État du Michoacán, en compagnie de son mari.
En août, plusieurs familles qui étaient à la recherche de personnes disparues et avaient exigé d’être reçues par le Service de médecine légale et le Centre de réinsertion sociale auraient été, selon leurs témoignages, agressées par des membres du personnel du parquet de Querétaro, qui les auraient ensuite menacées de représailles si elles signalaient l’incident.
En juillet, le Groupe interdisciplinaire d’experts indépendants (GIEI) a publié son sixième et dernier rapport sur l’affaire des 43 étudiants d’Ayotzinapa (État de Guerrero) victimes d’une disparition forcée en 2014. Il a insisté sur le fait que les forces armées mexicaines avaient participé aux disparitions forcées et souligné la difficulté, voire l’impossibilité, d’obtenir des informations des institutions publiques. Prenant acte du manque de coopération des autorités mexicaines, il a ensuite annoncé son départ du pays.
Le président mexicain a réagi en exprimant son soutien à l’armée, en critiquant les organisations de la société civile représentant les victimes et en annonçant qu’une information judiciaire était en cours concernant l’ancien responsable de l’Unité spéciale d’enquête et de poursuites pour l’affaire d’Ayotzinapa, Omar Gómez Trejo. Celui-ci avait démissionné en 2022 après avoir dénoncé les ingérences indues du Bureau du procureur général dans le déroulement de l’enquête.
La présidente de la CNB, Karla Quintana, a démissionné en août, après l’annonce par le chef de l’État de la création d’un nouvel organisme de recensement des disparitions, au motif que les chiffres fournis par cette Commission seraient peu fiables et exagérés. Un certain nombre d’organisations et de militant·e·s de la société civile craignaient que l’exécutif ne cherche à minorer les chiffres officiels concernant les disparitions, pour dissimuler l’échec de la politique sécuritaire fédérale. Teresa Guadalupe Reyes Sahagún a été nommée en octobre à la tête de la CNB.
Plusieurs organisations de la société civile se sont inquiétées du manque de consultation, de participation et de transparence du processus de recrutement, ainsi que du peu d’expérience de la personne retenue. En décembre, l’exécutif a présenté les résultats du nouveau décompte des disparitions, marqué par une diminution du nombre officiel de personnes disparues ou portées manquantes entre 1962 et août 2023. Il a également révélé qu’il ne disposait pas de suffisamment d’informations pour rechercher 79 955 de ces personnes.
ARRESTATIONS ET DÉTENTIONS ARBITRAIRES
La Cour interaméricaine des droits de l’homme a rendu deux arrêts dans lesquels elle condamnait le Mexique pour des faits de détention arbitraire. La première affaire concernait la détention arbitraire, en 2006, de Jorge Marcial Tzompaxtle Tecpile et de deux autres hommes. Deux des trois personnes concernées appartenaient à des communautés autochtones. Ces trois hommes avaient été arrêtés par la police et placés pendant plus de trois mois en arraigo, sans être présentés à un·e juge, puis en détention provisoire pendant encore deux ans.
La deuxième affaire concernait Daniel García Rodríguez et Reyes Alpízar Ortiz, qui avaient passé plus de 17 années en détention provisoire pour leur participation présumée à un homicide. Les deux hommes avaient été soumis à des actes de torture et à d’autres formes de mauvais traitements et avaient été détenus sous le régime de l’arraigo.
Dans ces deux affaires, la Cour a ordonné au Mexique de réformer son cadre juridique, d’abolir la détention au titre de l’arraigo et de modifier son système de détention provisoire. Elle a indiqué que le principe du placement en détention provisoire systématique était contraire à la Convention américaine relative aux droits de l’homme.
Le Groupe de travail sur la détention arbitraire [ONU] a demandé en septembre aux autorités mexicaines de supprimer de la Constitution du pays les dispositions concernant la détention provisoire obligatoire et l’arraigo. Il s’est également ému de la militarisation des missions de sécurité publique, de l’usage excessif de la force lors des arrestations et des mesures de privation de liberté prises dans le cadre d’une politique excessivement répressive menée depuis 2006 en matière de lutte contre les stupéfiants.
Le chef de l’État a de nouveau critiqué la Cour suprême et l’appareil judiciaire lorsque leurs décisions allaient à l’encontre des projets de l’exécutif. En juin, la juge Angélica Sánchez, en poste dans l’État de Veracruz, a été accusée d’« atteintes à la confiance du public et trafic d’influence », parce qu’elle avait décidé de remettre en liberté un homme soupçonné d’homicide, pour manque de preuves. Elle a été arrêtée dans la capitale, Mexico, par des membres de la police et de la Garde nationale détachés auprès de la Coordination nationale de lutte contre les enlèvements (CONASE), agissant en concertation avec le parquet de Veracruz. L’Institut fédéral de la défense publique (service fédéral d’aide juridique) a qualifié cette arrestation d’atteinte à l’indépendance du pouvoir judiciaire. De graves irrégularités ont été dénoncées, notamment le placement arbitraire en détention de la juge et le fait que ni la Garde nationale ni la CONASE n’étaient habilitées à procéder à son arrestation. Angélica Sánchez a été libérée de prison en juillet et placée en résidence surveillée.
DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN
La construction du « Train maya », réseau ferroviaire de 1 525 kilomètres de long sillonnant la péninsule du Yucatán, s’est poursuivie en 2023, menaçant les milieux naturels du sud du Mexique ainsi que le droit de vivre dans un environnement propre, sain et durable. Militant·e·s et organisations de la société civile ont dénoncé le non-respect par les autorités du droit environnemental fédéral pendant le chantier, affirmant que le projet aurait des conséquences néfastes pour l’écosystème, et en particulier pour les fonds marins du sud-est du pays. Le droit environnemental fédéral fixait un certain nombre d’obligations de l’État s’agissant de la protection de l’environnement et de la réalisation d’évaluations de l’impact des travaux publics. Le secrétariat de la Commission de coopération environnementale de l’Accord Canada-États-Unis-Mexique a recommandé aux autorités mexicaines de soumettre un rapport sur les risques et les incidences du projet.
Le gouvernement continuait d’encourager la production et l’utilisation des carburants fossiles. Officiellement inaugurée en 2022, la raffinerie de Dos Bocas, dans l’État du Tabasco, est entrée en activité en 2023.
Le 1er novembre, 84 habitant·e·s du village d’El Bosque, dans l’État du Tabasco, ont été évacués en raison de la montée du niveau de la mer, attribuée à la crise climatique. Les personnes concernées ont demandé à être réinstallées et à ce que leurs besoins les plus élémentaires (logement, scolarisation, services publics) soient satisfaits. Les autorités avaient promis de leur proposer une solution, mais rien de concret n’avait été fait à la fin de l’année.
DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES, TRANSGENRES OU INTERSEXES
Le mariage entre personnes de même sexe était autorisé dans les 32 États de la République fédérale depuis 2015, mais certains n’avaient toujours pas modifié leur code civil en conséquence. En juin, le Congrès de l’État du Nuevo León a modifié son Code civil, qui disposait désormais que deux personnes âgées de plus de 18 ans avaient le droit de se marier, sans considération de leur sexe. Parmi les États qui n’avaient pas encore inscrit dans leur législation le mariage entre personnes de même sexe figuraient ceux d’Aguascalientes, du Chiapas et de Chihuahua.
DROIT À LA SANTÉ
Les autorités ont modifié en mai un certain nombre d’articles de la Loi générale de santé. Les services mexicains en charge de la santé publique assuraient désormais l’accès gratuit aux soins et aux médicaments et autres produits de santé aux personnes non affiliées à un établissement de santé publique. Il s’agissait des personnes travaillant dans le secteur informel et ne disposant donc pas d’un employeur payant des cotisations sociales, des personnes dont aucun des proches n’exerçait officiellement une activité rémunérée, ou de jeunes ne poursuivant pas d’études. Cette mesure visait certes à garantir le droit à la santé de toutes et tous, et en particulier des plus défavorisés, mais militant·e·s et organisations considéraient que les services mexicains en charge de la santé publique ne disposaient pas de moyens suffisants pour traduire cette garantie dans les faits.