Après avoir obtenu des « aveux » forcés, les autorités iraniennes veulent procéder à l’amputation des doigts de quatre hommes reconnus coupables de vol.
D’après les informations obtenues par notre organisation, les sentences prononcées contre ces quatre hommes, Hadi Rostami (33 ans), Mehdi Sharfian (37 ans), Mehdi Shahivand (42 ans) et Kasra Karami (40 ans), ont été confirmées par la Cour suprême iranienne et transmises au Centre pour l’application des peines. Elles peuvent donc être appliquées à tout moment.
Actuellement détenus à la prison d’Urumieh, dans la province de l’Azerbaïdjan occidental, les quatre hommes sont condamnés à « avoir quatre doigts de la main droite entièrement coupés en ne laissant que la paume de la main et le pouce », conformément au châtiment prévu pour certains types de vol au titre de l’article 278 du Code pénal islamique d’Iran.
Procéder à des châtiments d’une telle inhumanité est à l’opposé de la justice et souligne la cruauté de la justice pénale iranienne. L’amputation est un acte de torture, ce qui constitue un crime relevant du droit international, et une atteinte infâme à la dignité humaine.
En tant qu’État partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et en vertu du droit international coutumier, l’Iran est légalement tenu d’interdire et de sanctionner la torture, notamment les peines d’amputation, de flagellation, d’aveuglement et de lapidation, en toutes circonstances et sans exception.
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Torture et procès iniques
Kasra Karami a été initialement condamné à l’amputation des doigts par le premier tribunal pénal de la province de l’Azerbaïdjan occidental, le 12 février 2017. D’après les informations que nous avons obtenues, la 27e chambre de la Cour suprême a tout d’abord annulé la sentence au motif que le plaignant n’avait pas requis le châtiment d’amputation, et a renvoyé le dossier au même tribunal de première instance pour un nouvel examen. Le premier tribunal pénal de la province de l’Azerbaïdjan occidental a rétabli sa sentence le 23 septembre 2017 et, cette fois-ci, la 27e chambre de la Cour suprême l’a confirmée le 10 décembre 2017. La Cour suprême a rejeté la requête en révision judiciaire déposée par la suite.
Kasra Karami a déclaré qu’à la suite de son arrestation le 12 octobre 2015, il n’a pas pu consulter d’avocat et a été torturé dans un centre de détention d’Urumieh géré par le service des enquêtes de la police iranienne (agahi) en vue d’obtenir des « aveux ». Par la suite, ils ont été retenus illégalement à titre de preuve contre lui au tribunal.
Hadi Rostami, Mehdi Sharfian et Mehdi Shahivand ont tous été condamnés le 19 novembre 2019 à une peine d’amputation des doigts, après que le premier tribunal pénal de la province de l’Azerbaïdjan occidental les a reconnus coupables d’être entrés par effraction aux domiciles de quatre personnes et d’avoir volé l’or et le liquide enfermés dans des coffres. Leur procès manifestement inique s’est également appuyé sur des « aveux » forcés obtenus alors qu’ils étaient détenus, sans pouvoir consulter leurs avocats, dans un centre de détention de la police géré par le service des enquêtes.
Au moins l’un des hommes, Hadi Rostami, a maintes fois nié les accusations portées à son encontre et est revenu sur ses « aveux » au tribunal, affirmant qu’ils lui avaient été extorqués sous la torture.
Dans une lettre adressée au responsable du pouvoir judiciaire le 20 septembre 2020, Hadi Rostami a écrit que, durant la phase d’investigation, les agents de l’agahi chargés de l’interroger lui ont asséné des coups de poing et de pied, et des coups à l’aide de divers instruments. Il a ajouté que l’agent chargé de l’interroger a exigé qu’il signe une feuille de papier blanche et qu’il a obtempéré, mais seulement lorsqu’il s’est effondré sur le plan physique et mental. Les autorités en charge des poursuites ont ensuite ajouté, sans qu’il en ait connaissance, les détails de ses inculpations sur la feuille blanche pour faire croire qu’il avait accepté les accusations.
Un bilan déplorable
Les autorités iraniennes défendent l'amputation comme étant le meilleur moyen de dissuader les voleurs, déplorant qu'elle ne puisse pas être pratiquée en public et de manière généralisée sans susciter la condamnation de la communauté internationale.
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Selon la Fondation Abdorrahman Boroumand, organisation de défense des droits humains qui travaille sur l’Iran, du 1er janvier 2000 au 24 septembre 2020, pas moins de 237 personnes ont été condamnées à des peines d’amputation qui ont été appliquées dans au moins 129 cas. Le nombre réel de victimes est sans doute plus élevé, car de nombreux cas ne seraient pas recensés.
Actuellement, on craint que des dizaines de détenus ne subissent une amputation en Iran.
Les victimes de ces amputations sont très majoritairement issues de milieux pauvres et vulnérables. En les mutilant de manière délibérée, les autorités iraniennes réduisent leurs possibilités de trouver un emploi et de subvenir à leurs besoins, dans une société où les personnes souffrant de handicaps physiques subissent une discrimination généralisée.
Nous demandons aux autorités iraniennes de renoncer immédiatement et sans condition à ces actes choquants de cruauté. Les autorités chargées des poursuites et les autorités judiciaires qui ordonnent et exécutent de tels châtiments devraient savoir qu’elles sont passibles de poursuites pénales au titre du droit international.
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