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Qu'est-ce que la compétence universelle ?

La compétence universelle signifie que l’État est compétent pour la poursuite et le jugement d’une infraction, lorsque celle-ci n’a pas été commise sur son territoire, qu’elle a été commise par une personne étrangère, à l’encontre d’une victime étrangère, et sans que cet Etat soit la victime de l’infraction.

L’objectif est de lutter contre l’impunité des auteurs de violations graves des droits humains, qui ont réussi à échapper à la justice nationale, en raison de son mauvais fonctionnement, de lois d’amnistie ou de la terreur qu’ils suscitent. « Soit extrader soit juger… »

Depuis plus de vingt ans Amnesty International s’engage pour que la compétence universelle soit appliquée et pour que les auteurs de crimes internationaux ne restent pas impunis,. quel que soit le lieu où a été commis ce crime.

Un exemple marquant est l’arrestation d’Augusto Pinochet, ancien dictateur chilien, à Londres en 1998.

On peut aussi noter le jugement de l’ex-président tchadien Hissène Habré par les Chambres africaines extraordinaires (CAE) au Sénégal.

Les États doivent engager des poursuites contre toute personne soupçonnée de graves crimes relevant du droit international, ou l’extrader.

Il existe deux grandes catégories de compétence universelle :

La compétence universelle absolue : les tribunaux de l'État A sont compétents même si aucun lien juridique ne semble rattacher l'infraction audit État A. En particulier, les tribunaux du pays A peuvent juger des personnes qui ont commis un crime à l'étranger et qui ne se trouvent pas sur le territoire du pays A.

La compétence universelle relative : les tribunaux du pays A ne sont compétents que s'il existe un rattachement juridique avec le pays A. En particulier, l'auteur de l'infraction se trouve dans le pays A.

Nota : la compétence universelle est également connue sous les dénominations de répression universelle ou d'universalité du droit de punir.

La compétence universelle en France

En France, les articles 689 à 689-13 du Code de procédure pénale (CPP) précisent dans quels cas les tribunaux français peuvent exercer la compétence universelle.

Les auteurs ou complices d'infractions commises hors de France peuvent être poursuivis et jugés par les tribunaux français notamment quand une convention internationale, auquel la France est partie donne compétence aux dits tribunaux.

Par exemple, la France peut recourir à la compétence universelle sur le fondement de la Convention contre la Torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants de 1984, la convention de 1973 sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid ou encore la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées de 2006

En application de ces conventions internationales, toute personne qui se trouve en France peut être jugée par un tribunal français si, hors de France, elle s'est rendue coupable de l'une des infractions énumérées par ces conventions et inscrites dans le Code Pénal.

Cependant, l’application de la compétence universelle en France est limitée puisqu’elle ne s’applique pas pleinement pour les infractions qui peuvent être poursuivies sur le fondement du Statut de Rome.

Aller plus loin : Compétence universelle, une lâcheté française

En effet, la France a assorti la mise en œuvre du principe de compétence universelle de 4 conditions si restrictives qu’elles rendent pratiquement impossible son activation :

- Le responsable d’un génocide, crime contre l’humanité ou crime de guerre ne peut être poursuivi que s’il « réside habituellement » sur le territoire français. Ce qui lui permet de continuer à séjourner en France en tout impunité du moment qu’il n’y fixe pas sa résidence habituelle. Pour tous les autres crimes internationaux comme la torture et les disparitions forcées, il suffit qu’il se trouve en France.

- La loi confie le monopole des poursuites au Parquet : cela supprime la possibilité pour une victime ou association de déclencher les poursuites en déposant plainte avec constitution de partie civile. Cette condition est en totale contradiction avec notre tradition juridique et porte une atteinte grave au droit des victimes à recours effectif.

- La France se défausse sur la Cour pénale internationale en exigeant qu’elle décline expressément sa compétence avant de pouvoir poursuivre en France les auteurs de crimes internationaux. Elle donne ainsi priorité à cette Cour, en violation de son Statut qui prévoit au contraire de donner priorité aux poursuites par les Etats : ce n’est que si l’État manque de volonté ou est dans l’incapacité de mener véritablement à bien l’enquête ou les poursuites que la Cour pénale internationale se déclare compétente.

- Les faits doivent être punissables à la fois par le droit français et par la législation de l’État où ils ont été commis selon la condition de double incrimination. Ainsi, il suffit qu’un État n’ait pas prévu le génocide dans sa loi nationale pour empêcher des poursuites en France sur ce fondement. La France encourage donc l’impunité dans les Etats où de tels crimes ont été commis.

Afin que la compétence universelle soit pleinement appliquée, iil est indispensable qu’une loi supprimant ces quatre « verrous » soit votée.

Amnesty International continue la mobilisation pour que la France adopte enfin un mécanisme de compétence universelle effectif afin que les auteurs de crimes internationaux les plus graves ne bénéficient pas en France d’une impunité prévue par la loi.

En savoir plus

Lire sur le site de CFCPI (Coalition Française pour la Cour Pénale Internationale) "La compétence universelle : ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas"

Le site de L’ Association Française pour la Promotion de la Compétence Universelle (AFPCU)

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