Dans une tribune publiée dans le journal Ouest France le 26 janvier 2021, notre présidente, Cécile Coudriou, appelle à un sursaut citoyen et rappelle que les droits humains doivent, hors de toute logique partisane, être un sujet des élections et peser dans les urnes.
À quelques semaines de l’élection présidentielle, nous faisons entendre notre voix, dans un esprit non-partisan, loin de la polarisation et des excès qui caractérisent les débats actuels. Nous appelons à un sursaut citoyen, d’autant plus nécessaire que la pré-campagne a déjà été marquée par une surenchère de propositions contraires au respect des droits humains et d’attaques par plusieurs candidats et éditorialistes contre l’État de droit, le droit européen et le droit international.
À grand renfort de tweets fracassants et de « fake news » qui inondent les réseaux sociaux, d’éditoriaux et de petites phrases soigneusement ciselés, ou de bandeaux accrocheurs sur les chaînes d’infos, l’assaut est lancé : haro sur les engagements internationaux de la France, sur la Cour européenne des droits de l’homme, sur la Convention de Genève garantissant la protection des réfugiés !
Nous faisons entendre notre voix, dans un esprit non-partisan, loin de la polarisation et des excès qui caractérisent les débats actuels
Haro sur les valeurs et les droits universels auxquels tous les peuples aspirent pourtant ! Une opinion publique parfois déjà inquiète est chauffée à blanc, poussée au rejet de l’autre et au repli sur soi. Les droits humains, comme ceux et celles qui les défendent, sont constamment attaqués. Un vent mauvais souffle indéniablement sur l’idée même de l’État de droit, parfois présenté comme un obstacle et non plus une protection contre l’arbitraire.
Cette dérive, d’abord insidieuse, s’accentue année après année, mois après mois, et plus encore à l’approche de la présidentielle. C’est d’autant plus grave que la France est le pays de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le pays où a été signée la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations unies. Comment la France pourrait-elle porter et défendre ses valeurs, hors de ses frontières ainsi que dans les enceintes multilatérales, si elle ne fait pas elle-même preuve d’exemplarité ?
Aller plus loin : Notre manifeste pour l'élection présidentielle 2022
« Nos droits ne sont pas négociables »
On ne peut ignorer l’effet domino qui se produit lorsqu’un État s’affranchit du respect du droit. Rien ne serait plus délétère que de détricoter le droit international construit depuis la Seconde Guerre mondiale. Les textes internationaux signés et ratifiés par les États constituent un cadre commun qui nous protège tous. Diriger la France exige de rester fidèle à ce cadre tout autant qu’à nos valeurs : liberté, égalité, fraternité. Cette élection est l’occasion de le rappeler.
Une personne aspirant aux plus hautes fonctions ne devrait pas verser dans un discours de haine et de division
Dans un contexte de crises – sanitaire, économique, climatique, accueil des réfugiés, conflits et instabilité géopolitique –, une personne aspirant aux plus hautes fonctions ne devrait pas verser dans un discours de haine et de division. Elle devrait, bien au contraire, s’engager à lutter contre toute forme de discrimination et à garantir les libertés individuelles : liberté d’expression, droit de manifester et respect de la vie privée notamment. Elle devrait s’engager à mener une politique extérieure respectueuse des droits humains. Cela implique de ne pas les sacrifier à des enjeux économiques et stratégiques, par exemple en vendant des armes à des pays qui les utilisent contre les populations civiles.
Les personnes candidates à l’élection se montreront-elles à la hauteur de ces enjeux, indissociables de la fonction à laquelle elles prétendent ? Incarneront-elles la vision d’une France pays de libertés, d’égalité et de justice, une France terre d’asile et de solidarité, une France qui veille à ce que les entreprises ne commettent ou ne facilitent pas de violations des droits humains ?
Ces questions doivent peser dans les urnes. Celui ou celle qui remportera cette élection en 2022 aura la charge de protéger, garantir et promouvoir les droits humains en France et dans le monde. Amnesty International France y veillera car ces droits, nos droits, ne sont pas négociables. Ils sont le fondement même de notre société.
Amnesty International est politiquement non partisane et ne prend pas parti dans les débats politiques. Elle s'en tient strictement à sa mission de promotion et de défense des droits humains et ne prend pas position sur des questions qui ne relèvent pas de cette mission.