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Jérémie Elkaïm, réalisateur du film "Ils sont vivants"
Jérémie Elkaïm, réalisateur du film "Ils sont vivants" © Christophe Brachet
Personnes réfugiées et migrantes

Rencontre avec Jérémie Elkaïm, réalisateur du film "Ils sont vivants"

Le film « Ils sont vivants » raconte l’histoire de Béatrice, aide-soignante en gériatrie à Calais. La jungle de Calais, elle n’en connaissait que le nom. En quelques jours, elle découvre la dure réalité des personnes migrantes et réfugiées qui y vivent. Le distributeur du film, Memento, a interviewé Jérémie Elkaïm, le réalisateur du film qui sortira le 23 février 2022.

Cet entretien est à découvrir en intégralité sur le site de Memento distribution

Ils sont vivants est au départ un projet de Marina Foïs, inspiré par le récit de Béatrice Huret, Calais mon amour. Comment vous y êtes-vous greffé ?

Jérémie Elkaïm : Marina s’était passionnée pour cette histoire vécue par Béatrice. Elle s’y projetait et rêvait d’un film. Je connais Marina depuis le tournage de Polisse de Maïwenn, elle m’a parlé de cette envie et nous avons échangé des idées de manière tout à fait informelle… Mais un jour les producteurs de Marina sont venus me trouver pour me proposer de le réaliser. Depuis l’adolescence le désir de réaliser des films m’a toujours habité. Les événements de la vie et mon parcours ont fait que paradoxalement je me l’étais interdit jusque-là. Parfois les chemins vers l’évidence ne sont pas les plus courts, mais au contraire plein de détours. Je leur ai dit de me laisser un peu de temps. Le principe de la commande aurait pu m’inquiéter mais je sentais au contraire qu’il pouvait me libérer…

Découvrir la bande annonce du film "Ils sont vivants" de Jérémie Elkaïm

Mais il fallait que je sois sûr d’être capable de trouver ma place dans cette histoire. Il y avait des écueils potentiels : je ne voulais pas d’une bluette sur fond de crise des réfugiés, ni d’un film à thèse, désincarné, faux… Je redoute la bien-pensance facile.

Quand deux corps se rencontrent que deviennent les frontières et les lois ? Plus besoin de tenir un discours.

Quand j’ai compris que je pouvais traiter cette histoire de façon incarnée et intime, faire vivre les échanges de regard et l’attirance à fleur de peau des personnages, je me suis dit que ça permettrait de mettre le politique dans la chair et l’inconscient du film. Le fait que ce soit le désir charnel et l’acte sexuel qui unissent Béatrice et Mokhtar rend absurde et révoltante l’idée que les lois et les frontières les séparent. Cette puissance politique du désir et des corps m’a passionné.

Photo du film "Ils sont vivants"

Marina Foïs et Seear Kohi dans le film "Ils sont vivants" de Jérémie Elkaïm © Memento Distribution

Xénophobe, agacée par la présence des migrants, Béatrice en raccompagne un en voiture vers la « jungle de Calais ». C’est en découvrant ce lieu qu’elle éprouve un premier basculement vers l’empathie ?

Jérémie Elkaïm : Au début, Béatrice est sûre d’elle et assez hostile, mais elle fait tomber accidentellement un jeune migrant en reculant sa voiture, elle s’en veut sans doute un peu et lui propose de le raccompagner. Elle passe alors une sorte de frontière en pénétrant pour la première fois dans la jungle. Mais ce n’est pas une soudaine révélation. D’autant que le jeune homme tente de voler le blouson de son mari qui vient de mourir. Béatrice est furieuse : « Je te raccompagne et tu me voles ! ». Mais presque malgré elle, elle fait un premier pas… Puis un deuxième une fois rentrée chez elle, en décidant de donner les vêtements de son mari qui vient de mourir aux associations de la jungle. C’est une décision simple et concrète, mais qui pour moi garde une part de mystère. Souvent les deuils sont des moments de flottements pour ceux qui les vivent. Sans savoir tout à fait pourquoi et comment, Béatrice réévalue ses priorités et fait petit à petit bouger ses valeurs. Les lignes se déplacent. Son goût pour la liberté l’emporte sur ses a priori. En l’occurrence, elle commence par faire simplement preuve de bon sens : elle n’a pas besoin de ses vêtements, les migrants oui.

Ensuite se produit en elle une suite de basculements progressifs, comme une suite de marches d’escalier.

Jérémie Elkaïm : Oui, une fois qu’elle revient dans la jungle, elle voit l’humain, le vivant, des enfants, des gens investis dans la solidarité… Elle est aide-soignante. Elle a cette fibre pour prendre soin des autres. La gradation de son chemin vers les migrants correspond à mon goût pour la nuance. Je voulais que le camp et ceux qui y vivent existent dans leur complexité. Le film contient des valeurs humanistes et défend qu’il est absurde de ne pas accueillir des gens venus d’ailleurs. Mais au-delà de cette note humaniste qui domine, nous n’avions pas envie d’un film caricatural avec d’un côté les vertueux et de l’autre les salauds. Les choses sont plus complexes et en chacun de nous, il y a de la lumière et de la monstruosité.

Agir

Découvrir la bande-annonce du film "Ils sont vivants"

Le film "Ils sont vivants" de Jérémie Elkaïm avec Marina Foïs sortira le mercredi 23 février 2022.

Un film coup de cœur pour Amnesty International France.