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URGENCE PROCHE ORIENT

Exigez avec nous la protection sans condition des populations civiles

Un migrant portant un imperméable se tient parmi les tentes lors d'une pluie dans un camp de fortune pour réfugiés et migrants à côté du camp de Moria, sur l'île de Lesbos, en Grèce, le 13 décembre 2019 © REUTERS/Giorgos Moutafis
Personnes réfugiées et migrantes

Les réfugiés et migrants laissés à l’abandon

Alors que l’hiver s’installe, des milliers de personnes frôlent la mort sur terre ou en mer entre la Turquie et la Grèce et à travers l'ouest des Balkans. Retour sur une situation critique engendrée par l’Union européenne.

En raison de l'accord conclu entre l'Union européenne et la Turquie, la plupart des personnes qui arrivent sur les îles grecques s'y retrouvent piégées pendant de longues périodes avant d'être transférées en Grèce continentale ou renvoyées en Turquie.

Plus de 40 000 personnes, dont 13 800 enfants, sont contraintes de vivre dans des conditions épouvantables sur les îles grecques.

Beaucoup d'entre elles dorment dans des tentes légères ou des conteneurs aux fines parois, qui ne les protégeront pas des rigueurs de l'hiver.

La surpopulation est à l'origine de nombreux décès. Le 6 décembre 2019, une femme est morte dans l'incendie de son conteneur dans le camp de Kara Tepe, sur l'île de Lesbos. Depuis août, trois enfants ont trouvé la mort tragiquement à Moria, dont un nouveau-né qui a succombé à une déshydratation sévère, selon Médecins sans frontières.

Des traversées mortelles

Tandis que beaucoup subissent ce sort sur les îles grecques, de plus en plus de gens cherchent d'autres moyens d'obtenir une protection en Europe. Ainsi, 14.000 personnes sont arrivées en traversant le fleuve Évros, dans le nord de la Grèce, à la frontière terrestre entre ce pays et la Turquie.

Ces derniers jours, six décès par hypothermie ont été signalés à différents endroits entre la frontière grecque et l'intérieur du pays. Il semble que les personnes retrouvées mortes aient suivi des chemins pour entrer en Grèce via l'Évros afin d'éviter les routes principales et les contrôles de police. Or, le gouvernement grec ne fait rien pour remédier à la situation toujours plus précaire des personnes en mouvement dans cette région. Au contraire, il renforce ses plans de verrouillage des frontières, allant jusqu'à installer un système de surveillance pour éviter les traversées.

Face à une crise humanitaire

Parallèlement, dans l'ouest des Balkans, la police croate continue de renvoyer illégalement, avec violence, les personnes qui tentent d'entrer dans l'Union européenne par la Croatie, provoquant une crise humanitaire grandissante en Bosnie-Herzégovine. Malgré les éléments accablants prouvant les pratiques illégales et violentes de la police croate, la Commission européenne ferme les yeux et a recommandé aux États membres d'autoriser l'adhésion de la Croatie à l'Accord de Schengen.

En décembre 2019, des personnes réfugiées et migrantes se sont mises en grève de la faim dans le camp de Vucjak, en Bosnie. Près de 800 personnes vivaient sur ce site pollué d'une ancienne décharge, sous des tentes légères et sans eau potable, équipements sanitaires satisfaisants ni moyens de chauffage appropriés.

La fermeture de ce camp a depuis été annoncée. Faute de place dans les camps surpeuplés, quelque 3 000 personnes sur les 8 000 présentes en Bosnie (selon les estimations) dorment dehors par des températures glaciales dans toute la Bosnie-Herzégovine. Des milliers d'autres vivent dans des conditions précaires dans d'autres pays de la région, tels que la Serbie, dans une situation d'incertitude permanente.

Une crise remédiable ?

Cette situation catastrophique est due à la politique de l'externalisation du contrôle migratoire et de la protection des réfugiés, qui sont confiés aux pays de sa périphérie, voire à des pays tiers, où les droits des personnes réfugiées, demandeuses d'asile et migrantes sont systématiquement menacés.

En encourageant la dissuasion musclée à ses frontières extérieures, les dirigeants européens font preuve d’ambivalence à l'égard de ses valeurs fondamentales et des conséquences de ses politiques, qui sont à l'origine de souffrances massives et créent de l'instabilité dans d'autres pays.

De même qu'elle essaie actuellement de mettre en place des dispositifs équitables et prévisibles de débarquement et de réinstallation des migrants recueillis en mer Méditerranée, l'Union europénne doit respecter son engagement à la solidarité et agir de toute urgence pour protéger les droits des personnes en mouvement à ses frontières orientales, notamment en créant un mécanisme de répartition obligatoire pour aider les États.

Il est grand temps que l'Union européenne respecte ses valeurs fondatrices et repense sa politique actuelle visant à empêcher les entrées à tout prix, afin que cet hiver soit le dernier que les migrants et les réfugiés passeront dans le froid, à craindre pour leur vie.