Les conclusions de notre rapport "‘On a l'impression d’être des sous-humains' - Le génocide des Palestiniens et Palestiniennes commis par Israël à Gaza", sont le fruit de longs mois de travail d’enquête et d’analyse de nos équipes de chercheur·ses et d’expert·es.
Notre rapport s’appuie sur des informations recueillies par nos équipes à la fois sur le terrain et à distance sur des événements survenus entre le 7 octobre 2023, date du début de l’offensive de l’armée israélienne en représailles aux attaques du Hamas dans le sud d’Israël, à début juillet 2024.
Comment avons-nous récolté l’information ?
Dès le début de l’offensive israélienne, l’objectif a été d’évaluer les conséquences des bombardements. Nous avons commencé cette enquête comme toutes les autres enquêtes, en récoltant autant d’informations que possible, issues de sources diverses :
Des témoignages, dont des Palestinien·nes ayant été victimes ou témoins de frappes aériennes, de déplacements, de détention et de destruction d’exploitations et de terres agricoles, d’habitations ou d’autres infrastructures civiles, ainsi que des personnes ayant subi les conséquences des restrictions de l’aide humanitaire imposées par les autorités israéliennes. Nos équipes se sont également entretenues avec des membres des autorités locales à Gaza, des professionnel·les de la santé palestinien·nes travaillant dans des établissements médicaux de Gaza et des personnes impliquées dans la réponse humanitaire.
Des photos et des vidéos prises par nos consultant·es sur le terrain, ou accessibles en open source, partagées sur les réseaux sociaux par des témoins ou les soldats israéliens eux-mêmes.
Des images satellites
Des documents : rapports et données fournis par des agences de l’ONU, des organisations de terrain, ainsi que par des groupes de défense des droits humains palestiniens et israéliens.
Des déclarations officielles émanant de hauts responsables du gouvernement et de l'armée israéliens, ainsi que d’organismes officiels israéliens.
Face à l’impossibilité d’un accès direct au terrain, en raison des restrictions mises en place par les autorités israéliennes, notre enquête s’est appuyée sur des consultant.es locaux qui ont pris ou récupéré des photos, des vidéos ou des preuves cruciales comme des fragments de munitions. Ils et elles se sont chargés également d’établir le premier contact avec des témoins potentiels. Une fois ces personnes identifiées, nos chercheur·ses ont mené des entretiens approfondis via des plateformes sécurisées, garantissant confidentialité et sécurité pour toutes les parties.
Parmi les expert·es ayant contribué à notre rapport, Budour Hassan, notre chercheuse spécialisée sur Israël et le territoire palestinien occupé. Elle témoigne de la façon dont elle et ses collègues ont travaillé sur le terrain.
"Comme nous ne sommes pas autorisé·es à entrer dans Gaza, et alors que de nombreuses preuves de crimes illégaux n’ont pas été conservées, nous avons réussi à mener des recherches sur les frappes israéliennes illégales et sur la création délibérée de conditions de vie destructrices, avec des déplacements massifs de population, ou la destruction d’infrastructures essentielles, Nous en sommes arrivé·es à la conclusion suivante : ce qui se passe à Gaza depuis le 7 octobre, est un génocide.
C’est ça, le mot. C’est le terme juridique pour désigner ce qu’Israël a fait. Israël a commis des actes interdits par la Convention sur le génocide, dans l’intention spécifique de détruire les Palestiniens et les Palestiniennes de Gaza. Cette conclusion est le fruit d’un processus qui a été difficile pour nous, le fruit de mois et de mois de recherche, d’enquête et d’entretiens, parfois avec des personnes qui ont tout perdu. Nous avons rencontré des parents qui avaient perdu tous leurs enfants.
Nous avons dû recueillir leur témoignage alors qu’ils et elles étaient encore en plein deuil. Nous avons interrogé des parents qui déterraient à la main les restes de leurs proches. Nous avons interrogé des médecins qui avaient vu les forces israéliennes s’emparer de leur hôpital. Nous avons interrogé des médecins forcés d’évacuer les hôpitaux, après y avoir exercé dans des conditions extrêmement difficiles causées par les agissements d’Israël.
Et les personnes dont nous avons recueilli le témoignage n’essayaient pas seulement de se remettre des conditions inhumaines qu’elles avaient traversées. Elles vivaient, et vivent encore aujourd’hui, au beau milieu de ces conditions abominables. C’est pourquoi ce rapport, qui porte sur un conflit en cours, est absolument essentiel. Parce que ce que nous espérons, avec ce type de travail, ce n’est pas seulement d’obliger les responsables de génocide ou d’autres crimes de droit international à rendre des comptes, mais c’est de prévenir le génocide et de mettre fin aux actes génocidaires qu’Israël a commis et continue de commettre à Gaza."
Comment avons-nous vérifié les informations ?
Au-delà de nos équipes de chercheur·ses directement impliqués sur le terrain, d’autres expert·es ont été appelés à se mobiliser à distance. Les équipes de notre Laboratoire de preuve contribuent à analyser les preuves digitales en ayant notamment recours à différents moyens technologiques comme la télédétection et corroborent ces données avec des témoignages et des documents officiels, en vue de prouver des violations du droit international.
Les informations recueillies ont ensuite été rigoureusement croisées, permettant non seulement de confirmer les témoignages recueillis, mais aussi d’écarter les données non fiables. Seules les informations qui ont pu être validées par plusieurs sources distinctes ont été utilisées.
Cette méthodologie rigoureuse nous permet de documenter, de manière irréfutable, les actes de destruction, les atteintes aux droits humains et les conditions inhumaines auxquelles la population de Gaza est actuellement confrontée.
Lire aussi : L'impartialité au cœur de notre combat pour les droits humains
Qu’avons-nous analysé dans cette enquête ?
Après vérification, voici le type de faits que nous avons retenus et analysés :
Des attaques contre les infrastructures civiles (maisons, hôpitaux, écoles, etc.)
Des destructions massives de lieux essentiels à la survie de la population, y compris les sites culturels et religieux.
Des attaques systématiques contre des zones résidentielles densément peuplées.
L’impact du siège israélien et des restrictions sur les conditions de vie des Palestiniens
Comment avons-nous déterminé de l’intention génocidaire de l’État d’Israël ?
Pour analyser et qualifier une situation de génocidaire de manière impartiale et apolitique, nos juristes ont notamment utilisé la Convention sur le Génocide de 1948 comme cadre juridique.
Lire aussi : qu’est-ce qu’un génocide ?
Sur la base de cette convention, nos juristes ont analysé si :
Les Palestinien·nes sont considérés comme un groupe protégé
Les actes commis par l’armée israélienne figurent dans la liste des actes illicites détaillés dans la Convention
Les autorités israéliennes ont l’intention de détruire totalement ou partiellement un groupe national, ethnique, et raciale, dans le cas présent, les Palestinien·nes de Gaza
Notre enquête permet de prouver ces trois critères.
Pour déterminer si les actes interdits ont été perpétrés avec l'intention spécifique requise de détruire les Palestinien·nes de Gaza, nous avons suivi la jurisprudence internationale dont celle de la Cour internationale de justice et celle des tribunaux pénaux internationaux selon laquelle les preuves de l'intention génocidaire doivent être abordées et examinées de manière globale (contexte, existence d’un schéma comportemental global, caractère systématique des actes illégaux, ampleur et degré des pertes).
À plusieurs reprises, nous avons fait part de nos conclusions aux autorités israéliennes, mais n’avons reçu aucune réponse substantielle au moment de la publication de notre rapport.
Les yeux du monde sont rivés sur Gaza. Tous les Etats, dont la France, ont un rôle majeur à jouer : ils ont l’obligation de prévenir et de punir le génocide.
Faites pression sur Emmanuel Macron pour qu’il agisse !