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Les Graines du figuier sauvage de Mohammad Rasoulof / © Pyramide films

Tourné en secret en Iran, un film sur le soulèvement « Femme, Vie, Liberté »

Pour la sortie de son dernier film « Les Graines du figuier sauvage », le réalisateur iranien Mohammad Rasoulof a dû fuir clandestinement l’Iran. L’exil pour porter l’histoire du soulèvement des femmes iraniennes et pour donner à voir la brutalité d’un régime.

C’est au mois de mai que Mohammad Rasoulof débute sa traversée, à pied, clandestine, de la frontière iranienne. Un départ que le réalisateur décrit comme «extrêmement éprouvant, douloureux, dangereux.» Une traversée de 28 jours avant d’arriver en Allemagne. Quelques jours plus tard, Mohammad Rasoulof sera à Cannes pour présenter son film « Les Graines du figuier sauvage », sélectionné en compétition officielle du festival.

Je devais choisir entre la prison et quitter l’Iran. Le cœur lourd, j’ai choisi l’exil.

Mohammad Rasoulof, réalisateur iranien 

L’un des déclencheurs de son exil, c’est une condamnation : le 8 mai 2024, son avocat l’informe qu’il est condamné à une peine de huit ans de prison suite à une arrestation en 2022 pour avoir soutenu des manifestations. La peine tombe mais les autorités iraniennes ne connaissant pas encore l’existence de son nouveau film, réalisé clandestinement. C’est là que Mohammad Rasoulof a dû faire son choix : « Sachant que la nouvelle de mon nouveau film serait révélée très bientôt, je savais, sans aucun doute, qu’une nouvelle peine viendrait s’ajouter à ces huit années. Je n’avais pas beaucoup de temps pour prendre une décision. » L’exil pour sauver la création iranienne, prise pour cible par les autorités. 

Lire aussi : Deux ans après le soulèvement iranien, la répression se poursuit

« Nous avons pu contourner la censure »  

Si les autorités iraniennes avaient été au courant de la réalisation d’un film rendant hommage au soulèvement « Femme, Vie, Liberté », il n’aurait sans doute jamais pu voir le jour. « Je ne peux pas expliquer comment, mais nous avons réussi à contourner le système de censure. » explique Mohammad Rasoulof. « Le gouvernement ne peut pas tout contrôler. En intimidant et en effrayant les gens, ils essaient de donner l’impression qu’ils maîtrisent tout, mais cette méthode est une grenade assourdissante dont seul le bruit peut vous effrayer. (…) le courage de mon équipe a été la force motrice qui nous a permis de terminer ce film. »

Bande annonce du film « Les Graines du figuier sauvage »

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Le casting du film devait aussi se faire sans bruit. « Le choix des acteurs a été compliqué. Nous ne pouvions pas procéder à un casting large, car cela implique d’informer de nombreuses personnes, et la nouvelle d’un film en train de se préparer se répandrait peu à peu... Nous avons donc contacté les personnes une à une. Nous devions deviner qui, en plus de ses capacités artistiques, aurait la volonté et le courage de jouer dans un tel film. » Le courage. C’est bien l’un des sujets du film de Mohammad Rassoulof, qui en plus de dénoncer avec vigueur la brutalité et l’oppression d’un régime, porte haut le courage des milliers d’Iraniennes et d’Iraniens descendus dans les rues pour scander « Femme, Vie, Liberté » depuis septembre 2022. « Malgré les contraintes considérables auxquelles nous avons été confrontés lors du tournage, j’ai voulu réaliser un film libre qui soit loin du récit dominé par la censure dans la République islamique. » livre Mohammad Rasoulof.

Inquiétude pour l’équipe restée en Iran  

Lorsque le film a été connu des autorités iraniennes, ça a été le début d’un calvaire pour les nombreux acteurs et techniciens toujours en Iran. « Les services de renseignement les persécutent. » témoigne le cinéaste. « Ils ont subi de longs interrogatoires. On leur a demandé de faire pression sur moi pour que je retire le film du Festival de Cannes. On a essayé de leur faire dire qu’ils n’étaient pas au courant de l’histoire du film et qu’ils avaient été manipulés pour participer au projet. Les familles de certains d’entre eux ont été convoquées et menacées. En raison de leur participation au film, des poursuites judiciaires ont été engagées contre eux et il leur a été interdit de quitter le pays. » Parmi les acteurs qui ont pu fuir précipitamment l’Iran avant la sortie du film, on compte trois de ses comédiennes  : Mahsa Rostami, Niousha Akhsi et Setareh Maleki, aujourd’hui à Berlin. 

Répression implacable des artistes  

La répression du régime iranien passe aussi par la silenciation de ses artistes. Mohammad Rassoulof appelle la communauté cinématographique mondiale à assurer un fort soutien aux réalisateurs iraniens « qui résistent et affrontent courageusement la censure ». En plus des difficultés d’obtention d’autorisation de tournage, les équipes sont soumises à une lourde pression des forces de sécurité. Mohammad Rasoulof explique que ses collègues cinéastes ont « l’interdiction de quitter le territoire et sont menacés de prison, pour avoir simplement collaboré à une création artistique. Comme au Moyen-Âge, les tribunaux révolutionnaires ont ouvert des dossiers contre eux. »  

Lire aussi : La peine de mort pour étouffer le soulèvement iranien

Et en Iran, la censure ne se limite pas qu’au 7ème art. Toomaj Salehi, rappeur iranien de 33 ans, a été condamné à mort par les autorités pour avoir soutenu le soulèvement populaire iranien suite à la mort de Mahsa Amini. Il est l’un des rappeurs les plus réputés en Iran. «Ici, les gens sont seulement vivants. Ils n’ont pas de vie » clame-t-il dans l’une de ses chansons, écoutées des millions de fois sur les réseaux sociaux. Pour s’être battu, pour avoir parlé, pour avoir chanté, le rappeur Toomaj Salehi est aujourd’hui dans le couloir de la mort. Sa condamnation à mort a été annulée par la Cour suprême iranienne le 26 juin 2024 mais l’affaire va être rejugée.

Mohammad Rassoulof s’est déjà attaqué au sujet de la peine de mort en Iran dans son dernier film intitulé « Le diable n’existe pas », lui aussi tourné en secret. Un film que nous avions déjà soutenu. Dans la même lignée, c’est avec fierté que nous soutenons son dernier film « Les Graines du figuier sauvage », qui donne à voir, notamment avec des images inédites des manifestations, les graves violations des droits humains commises par les autorités iraniennes depuis le début du soulèvement.

Mohammad Rasoulof, en choisissant l’exil, fait aussi le choix d’amener les récits des Iraniens et des Iraniennes à l’international. Car le film donne surtout à voir la force d’un peuple qui se bat pour sa liberté. Un film qui donne à voir et ressentir pour faire réagir. Lutter contre l’impunité en Iran nous concerne toutes et tous. En plus du travail de recherche, montrer les récits des Iraniennes et Iraniens et soutenir ardemment leur combat, sont autant de graines semées qui permettront à ce qu’un jour, justice soit rendue. « Les Graines du figuier sauvage » est en salle à partir du 18 septembre 2024, deux jours seulement après les deux ans de la mort de Mahsa Amini.

Agir

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