Le Sénat a terminé l'étude du projet de loi relatif aux Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 avant un vote solennel prévu le 31 janvier. Certaines mesures soulèvent de graves préoccupations. Le texte légaliserait pour la première fois en France l’utilisation d’une surveillance s’appuyant sur des systèmes d’intelligence artificielle. Une pratique qui comporte de graves dangers pour nos droits. Explications.
Voté en l’état, ce projet de loi marquerait une première étape dangereuse pour les droits humains, dont le droit à la vie privée. Nous appelons les sénatrices et les sénateurs à prendre toute la mesure de l’impact d’un tel choix sur le futur de notre société et demande la suppression de l’article 7 qui introduit cette mesure.
L’Article 7 du projet de loi Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 propose d’expérimenter la vidéosurveillance algorithmique avec pour objectif affiché de garantir la sécurité autour d’événements publics importants. Concrètement, des algorithmes vont analyser des images issues de caméras fixes ou de drones pour détecter et signaler en temps réel des comportements anormaux ou suspects prédéterminés, sans que ne soit précisé ce que recouvrent ces notions.
Si la lutte contre la criminalité ou le terrorisme est légitime, elle doit cependant être encadrée et répondre à des critères stricts de nécessité et de proportionnalité. Or la disposition proposée par l’article 7 ne remplit pas ces conditions .
Katia Roux, responsable plaidoyer « Technologies et droits humains »
Certes, le gouvernement affirme qu’aucune donnée biométrique ne sera utilisée pour identifier des personnes. Pour autant, les algorithmes évalueront des comportements en analysant des données corporelles et comportementales, qui sont des données personnelles relevant du droit à la vie privée et devant être protégées. Par ailleurs, l’efficacité de ces technologies d’évaluation pour lutter contre la criminalité fait l’objet de vives critiques de la part de la communauté scientifique.
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Se penser ou se savoir surveillées peut également amener les personnes à modifier leur comportements ou s’auto-censurer. L’effet dissuasif d’une telle surveillance de l’espace public comporte donc également un risque d’atteinte aux droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique.
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Enfin, si le gouvernement insiste sur le caractère expérimental et exceptionnel de ce projet de loi, la portée du texte dépasse largement les seuls Jeux Olympiques de 2024. Ce sont en effet tous les événements sportifs, festifs et culturels qui seront concernés par le dispositif de surveillance dès l’adoption de la loi et jusqu’à juin 2025.
L’exception risque donc de devenir la norme dans un contexte de volonté très claire des autorités françaises d’élargir leur pouvoir de surveillance. Les Jeux olympiques ne doivent pas servir de prétexte pour faciliter l'instauration d'un état d'exception permanent.
Katia Roux
Amnesty International France appelle les parlementaires français à refuser d’ouvrir la voie à une normalisation de pratiques de surveillance préoccupantes pour nos libertés et à prévenir les risques de dérives dangereuses.