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URGENCE PROCHE ORIENT

Exigez avec nous la protection sans condition des populations civiles

Ruines de l'hôpital pour enfants Okhmatdyt, récemment touché par un missile russe à Kiev, en Ukraine, le 12 juillet 2024 © Maxym Marusenko / NurPhoto / NurPhoto via AFP

Ukraine : les enfants victimes de frappes russes. Des attaques qui peuvent être qualifiées de crimes de guerre.  

Depuis le début de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine en février 2022, la population ukrainienne est victime de nombreuses exactions commises par l’armée russe. Nous tirons la sonnette d’alarme sur la situation des enfants ukrainiens qui continuent à être blessés ou tués par des frappes aériennes russes. Ces attaques, s’apparentant à des crimes de guerre, ne doivent pas rester impunies.  

L’année 2024 se caractérise par une nette augmentation du nombre de victimes civiles en Ukraine.   

Lire aussi : Notre dossier sur la guerre en Ukraine 

D’après les données publiées, y compris par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), l’été 2024 a été particulièrement meurtrier pour les enfants en Ukraine. 

Nos équipes ont examiné 17 frappes russes menées en 2024 qui ont touché des enfants. Notre service de vérification numérique a examiné plus de 120 vidéos et photos d’attaques. En parallèle, nos chercheur·es ont effectué des investigations complémentaires sur le terrain révélant que les forces russes ont délibérément pris pour cibles des civil·es et des infrastructures civiles. 

Les enfants, qui comptent parmi les groupes les plus vulnérables de toute société, bénéficient d’une protection spéciale en vertu du droit international humanitaire. Pourtant, ils continuent d’être tués et blessés dans des zones éloignées de la ligne de front, y compris là où il n’y a aucune cible militaire

Patrick Thompson, spécialiste de l’Ukraine à Amnesty International 

Des attaques qui peuvent s’apparenter à des crimes de guerre

Nos investigations ont notamment porté sur le bombardement du plus grand hôpital pédiatrique d'Ukraine. Le 8 juillet 2024, le centre Okhmatdyt à Kiev a été visé par un missile de croisière russe Kh-101 qui a causé la mort de deux personnes, blessé plus d'une centaine de civil·es dont des enfants et entrainé des dégâts considérables. 

Oleg Goloubtchenko, un chirurgien qui opérait un enfant à l’hôpital au moment de la frappe, a déclaré : « Lorsque j’ai repris mes esprits, tout était en ruines autour de moi. J’étais blessé : j’ai senti de la chaleur dans tout le corps et j’ai vu que je saignais, mais mes bras et mes jambes fonctionnaient et je respirais. J’ai rampé un peu et j’ai vu que l’enfant allait bien, même si les équipements étaient anéantis. » 

Nos équipes ont vérifié 14 images et six vidéos filmant ce tir de missile sur Okhmatdyt, ainsi que ses répercussions. Sur ces images, on peut voir des dégâts importants dans les services de l’hôpital, des fenêtres brisées et des décombres, ainsi que des taches de sang.  

Nous n’avons trouvé aucune preuve de la présence de militaires ukrainiens dans le vaste complexe hospitalier ni ses environs immédiats. La taille de l’hôpital exclut de fait la possibilité que ce puissant missile de croisière, d’une précision présumée de 5 à 20 mètres, ait été dirigé vers une autre cible.   

Lire aussi : Des frappes russes endommagent un hôpital pour enfant 

Comment qualifier une attaque de crime de guerre ?

Les crimes de guerre sont des violations du droit international humanitaire, et plus particulièrement de ce que l’on appelle des « lois et coutumes de la guerre » définies par les Conventions de Genève et les Conventions de la Haye. Il s’agit de crimes commis à l’encontre de civil·es, et plus largement à l’encontre de toutes les personnes ne participant pas directement aux hostilités, à l’occasion d’un conflit armé international ou non international. 

Il peut notamment être considéré comme crime de guerre :  

Les attaques directes contre des civil·es ou des biens de caractère civil  

Les attaques menées sans discrimination, y compris les attaques disproportionnées qui visent des zones à forte densité de population au moyen d’armes explosives 

Les frappes aveugles menées sans discernement qui tuent ou blessent des civil·es  

Depuis février 2022, nous avons recensé de nombreux cas où les forces russes ont mené des attaques aveugles en Ukraine, faisant des milliers de victimes civiles, et nous avons recueilli des éléments attestant d’autres crimes de guerre – actes de torture, violences sexuelles et homicides illégaux notamment. 

Lire aussi : Conflit armé, terrorisme, crime de guerre, crime contre l’humanité… Que dit le droit international ? 

Nous demandons à nouveau que les auteurs d’attaques illégales et de crimes de guerre soient traduits en justice et que toutes les victimes de crimes de guerre commis dans le cadre de l’agression russe obtiennent réparation. 

Les attaques illégales, en particulier lorsqu’elles touchent des enfants, sont destinées à semer la terreur et la panique au sein de la population. Le sentiment d’impunité dont jouissent les auteurs de ces actes doit prendre fin. Il incombe à la communauté internationale de veiller à ce qu’ils soient traduits en justice. Sans obligation de rendre des comptes, nul doute que ces attaques se poursuivront . 

Patrick Thompson, spécialiste de l’Ukraine à Amnesty International 

Lire aussi : Comment nous enquêtons sur la guerre en Ukraine