8 000 personnes, dont 2 000 mineurs non accompagnés, sont arrivées à Ceuta, à la nage ou à pied, entre le 17 et le 18 mai. L’entrave espagnole située au nord du Maroc a soumis la plupart de ces personnes à des expulsions forcées. Y compris des enfants et des demandeurs d’asile.
Le drame se joue sur fond de crise diplomatique entre l’Espagne et le Maroc. Nous dénonçons le fait que des personnes demandeuses d’asile ou migrantes soient utilisées comme des pions sur un échiquier politique morbide.
Nous dénonçons les violences exercées par les forces de sécurité et l’armée espagnoles, qui ont jeté des personnes à la mer, enfants y compris. Des agents des services frontaliers ont apporté une aide d’urgence à des personnes, mais les abus qui ont été commis sont intolérables.
Nous ne pouvons pas accepter que des personnes, y compris des enfants, soient maltraitées par les forces espagnoles.
Virginia Álvarez, chercheuse à Amnesty International Espagne
Une responsabilité européenne
Les dirigeants européens ont rapidement réagi en apportant leur soutien à l’Espagne et en rappelant que les frontières espagnoles font partie des frontières de l’Union européenne. Si l’on suit cette logique, les abus commis par l’Espagne sont aussi des abus commis par l’Union européenne. Ainsi, ces dirigeants ne doivent plus fermer les yeux sur les abus qui ont lieu aux frontières de Ceuta.
Un grand nombre des personnes qui sont entrées sur le territoire espagnol étaient de très jeunes enfants. Dès lors, il incombe aux autorités de veiller à ce que l’intérêt supérieur de l’enfant soit respecté, quelles que soient les circonstances. Les enfants doivent pouvoir prétendre à une protection internationale.
« Le Maroc joue avec la vie des gens »
Dans une vidéo vérifiée par Amnesty International, on observe des fonctionnaires marocains qui laissent activement passer des personnes migrantes ou demandeuses d’asile à Ceuta, de l’autre côté des clôtures.
Le Maroc ne doit pas utiliser les personnes, parmi lesquelles se trouvent ses propres citoyens, comme des pions sur l’échiquier politique.
Virginia Álvarez
Le Maroc bafoue depuis longtemps les droits des personnes migrantes ou demandeuses d’asile à ses frontières. Par le passé, nous avons constaté des opérations illégales, dont des arrestations et le déplacement vers le sud du Maroc de personnes migrantes ou demandeuses d’asile se trouvant dans des campements et des maisons près de la frontière espagnole. Le tout en dehors de toute procédure légale.
Le 18 avril, un dirigeant du Polisario (mouvement politique et armé opposé au Maroc pour le contrôle du Sahara occidental) est arrivé en Espagne pour y être soigné du Covid-19. Une publication sur Facebook du ministère marocain des droits de l’Homme indique que l’ouverture des frontières vers Ceuta est intervenue en représailles à ces soins médicaux. Les autorités marocaines pourraient ainsi avoir utilisé les personnes migrantes ou demandeuses d’asile comme des pions dans le cadre de ce contentieux.
Des renvois forcés illégaux
Au moins 5 000 personnes auraient été expulsées collectivement vers le Maroc par les autorités espagnoles ces derniers jours. Les forces militaires espagnoles déployées à la frontière ont procédé à des expulsions forcées, sans que soient respectées les garanties nécessaires. Par conséquent, les personnes vulnérables n’ont pas pu être identifiées, elles n’ont pas pu recevoir une aide juridique ni demander l’asile.
Toute arrivée, aussi massive soit-elle, ne peut en aucun cas justifier des expulsions collectives illégales. Parmi les 5 000 personnes expulsées de façon sommaire se trouvaient peut-être des personnes admissibles à l'asile ou ayant besoin d’une protection.
Le fait de refouler des personnes est illégal et constitue une négation de leur droit à un examen équitable et individualisé de leur demande d’asile.
Virginia Álvarez
Les autorités espagnoles doivent ouvrir une enquête exhaustive et veiller à ce que l’obligation de rendre des comptes soit respectée !
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