Yasaman Aryani, Saba Kordafshari, Armita Abbasi… Ces Iraniennes, symboles de la lutte pour les droits des femmes en Iran, ont été libérées de prison. Des bonnes nouvelles importantes, porteuses d’espoir dans un contexte où le soulèvement déclenché par la mort de Mahsa Amini continue d’être violemment réprimé par les autorités.
Elles militaient contre les lois sur le port obligatoire du voile, elles étaient chercheuses, artistes, elles participaient activement aux manifestations… Autant de raisons suffisantes pour les autorités iraniennes pour condamner ces femmes à des peines de prison. Depuis le 7 février 2023, plusieurs femmes iraniennes ont été libérées.
Dès leur sortie de prison, elles ont scandé « Femme, vie, liberté ! ». Un acte symbolique fort qui montre que les autorités iraniennes n’ont pas fait taire leur voix et leur détermination. Au contraire. Elles continueront leur combat pour la liberté.
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Yasaman Aryani : une libération portée par des années de mobilisation
Des fleurs pour la liberté. C’est l’acte de défiance poétique que Yasaman Aryani avait choisi pour s’opposer aux lois en vigueur sur le port obligatoire du voile. Le 8 mars 2019, à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, Yasaman a distribué des fleurs blanches dans le métro de Téhéran à plusieurs Iraniennes. Un acte poétique, une ode à la liberté qu’elle a fait courageusement en retirant son voile. Cet acte l’a conduite en prison. Yasaman était emprisonnée depuis avril 2019, condamnée pour ce type de motifs : « propagande contre le régime », « incitation à la corruption et la prostitution ». Yasaman est devenue un véritable symbole de la lutte pour les droits des femmes en Iran.
C’est avec une joie immense que nous avons appris, jeudi 16 février 2023, sa libération ainsi que celle de sa mère Monireh Arabshahi. Une libération portée par des années de mobilisation des militants d'Amnesty International : pétition mondiale, action devant l'ambassade d'Iran à Paris, lettres de soutien envoyées, erc. Merci à toutes les personnes qui se sont mobilisées pour la libération de Yasaman Aryani. Chaque signature, chaque lettre envoyée a aussi permis de faire résonner le combat des femmes en Iran qui se battent inlassablement pour leurs droits, leur vie, leur liberté.
Depuis l’arrestation de Yasaman et de sa mère Monireh, Amnesty International s’est fortement mobilisée pour défendre les Iraniennes emprisonnées ou menacées pour avoir milité pacifiquement contre les lois en vigueur sur le port obligatoire du voile. Avec les militantes et les militants d'Amnesty International France, nous avons lancé de nombreuses actions pour défendre et soutenir Yasaman.
Yasaman à l'honneur de notre plus grande campagne
« 10 jours pour signer » : c'est le nom de notre campagne annuelle à l'occasion de la journée internationale des droits de l'homme. Il s'agit de la plus grande mobilisation mondiale pour les droits humains. En 2019, Yasaman faisait partie des dix situations de personnes à défendre. La pétition qui demandait sa libération a recueilli 124 000 signatures rien qu'en France.
Des actions de soutien pour Yasaman
Plusieurs de nos militantes et militants se sont impliqués durant toute la durée de l'incarcération de Yasaman pour mener des actions sur le terrain, notamment grâce à un dossier d'intervention crée en janvier 2020. L'objectif : montrer à Yasaman que nous ne l'oublions pas et continuer à interpeller les autorités iraniennes pour sa libération. Le 8 mars 2020, à l'occasion de la journée internationale du droit des femmes, plusieurs groupes locaux ont fait signer des cartes de soutien aux manifestantes présentes. Pour les remercier, notre équipe de militants leur donnait des graines de fleurs, en écho à l'action de Yasaman dans le métro de Téhéran. L'idée étant qu'en rentrant chez elles, les personnes fassent pousser une fleur au nom de Yasaman. Des mots et des fleurs de soutien, depuis Paris jusqu'en Iran. La mobilisation passe aussi, et surtout, par la solidarité internationale.
Une action devant l'ambassade d'Iran en France
Le 8 mars 2021, à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, nos équipes d'Amnesty International France ont décidé de mettre à l'honneur la situation de Yasaman. En écho au geste poétique et pacifique de Yasaman, nos militantes et nos militants ont fabriqué des milliers de fleurs colorées en origami. Nous les avons rassemblées et déposées devant l'ambassade d'Iran. Une action forte, pacifique, engagée, à l'image de Yasaman Aryani.
Mobilisation à Paris devant l'Ambassade d'Iran en France, le 8 mars 2021 / © Christophe Meireis
Vidéo du moment de la libération de Yasaman et de sa mère. 👇
Une série de libérations
Armita Abbasi, 21 ans, fait elle aussi partie des femmes libérées. Elle aura passé plus de 100 jours dans une prison en Iran, accusée notamment d’avoir été « leadeure des manifestations ». Nous nous réjouissons également de la libération de la célèbre chercheuse franco-iranienne Fariba Adelkhah, détenue depuis juin 2019 dans la prison d’Evin à Téhéran, pour « atteinte à la sécurité nationale ». Dans cette même prison, était détenu un groupe de prisonnières politiques iraniennes : Saba Kordafshari, militante contre les lois sur le port du voile obligatoire, et Fariba Asadi, Aliyeh Motallebzadeh, Parastoo Moini et sa mère Zahra Safaei, Gelareh Abbasi ainsi que Shohreh Hosseini. Les sept femmes ont été libérées en même temps, le 8 février.
Vidéo du moment de la libération des sept femmes détenues dans la prison d'Evin. 👇
L’incroyable courage des femmes en Iran
Cela fait des années que les Iraniennes se battent pour revendiquer leurs droits et lutter contre l’oppression des femmes exercée par les autorités iraniennes. La mort de Mahsa (Zina) Amini, le 16 septembre 2022, aura été le drame de trop. Celui qui a embrasé tout un pays, celui qui a rassemblé tout un pan de la société iranienne, femmes et hommes réunis, ensemble, contre des décennies d’oppression.
Nous saluons le courage de ces femmes qui, malgré les risques auxquels elles s’exposent, se battent pour leur liberté et pour un changement profond de société en Iran. Lors des manifestations, certaines femmes ont enlevé leur voile comme acte de protestation, et certaines sont allées jusqu’à le brûler dans les rues. Beaucoup d’entre elles sont encore en prison ainsi que des hommes ayant pris part aux manifestations. Dans la prison d’Evin notamment, plane la menace de la peine de mort pour de nombreux manifestants.
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Des moyens d'agir pour empêcher l'exécutions de manifestants condamnés à mort
Ces bonnes nouvelles surviennent dans un contexte où la répression se poursuit en Iran. De nombreuses personnes continuent d’être emprisonnées et risquent la peine de mort pour avoir participé au soulèvement qui secoue le pays depuis septembre 2022. Nous sommes aux côtés de la population iranienne et saluons à nouveau leur courage. Nous continuerons de porter haut et fort leur message : « Femme, vie, liberté ».
14 manifestants risquent d'être exécutés
Depuis le début du soulèvement en Iran, quatre manifestants ont déjà été exécutés par les autorités. Quatorze autres personnes ont été condamnées à mort en lien avec les manifestations et risquent donc de subir le même sort. Soutenez-les, portez leur voix, agissez pour empêcher ces exécutions.