Depuis fin 2014, notre organisation suit la mise en œuvre des nouvelles lois et politiques visant à s'attaquer à la menace terroriste en Europe. Explications.
Notre organisation vient de publier aujourd’hui un rapport sur les mesures disproportionnées prises par certains pays européens.
Des recherches sur le terrain ont été menées par le biais d'entretiens avec des personnes victimes de mesures de lutte contre le terrorisme ayant porté atteinte à leurs droits humains, et avec leurs avocats et leur famille (en France et en Hongrie par exemple). Dans d'autres cas, des entretiens ont été réalisés avec des législateurs, des responsables politiques, des membres de l'appareil judiciaire et des experts indépendants (aux Pays-Bas, en Pologne et au Royaume-Uni, entre autres pays).
Découvrir notre dossier : l'antiterrorisme en Europe
Pourquoi l’Europe ?
Les recherches pour ce rapport se sont limitées à l'Union européenne pour plusieurs raisons : l'UE représentait une entité régionale distincte au sein de laquelle les attentats mentionnés ci-dessus avaient eu lieu ; des initiatives étaient en cours au niveau communautaire pour répondre à certains aspects de la politique de lutte contre le terrorisme, comme par exemple la proposition de directive sur les « combattants terroristes étrangers » ; et une tendance se dégage clairement parmi les États membres, qui s'inspirent les uns des autres pour élaborer leurs mesures régressives de lutte contre le terrorisme.
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14 pays à la loupe
Des chercheurs des bureaux nationaux d'Amnesty International dans les États membres de l'UE ainsi qu'au Secrétariat international au Royaume-Uni ont réuni des informations sur les évolutions législatives, souvent adoptées via des procédures accélérées, dans 14 pays : Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Danemark, Espagne, France, Hongrie, Irlande, Luxembourg, Pays-Bas, Pologne, Royaume-Uni et Slovaquie. Certains pays figurent dans plusieurs sections du rapport ; d'autres dans une section ou deux uniquement.
Les employés du Bureau des institutions européennes d'Amnesty International surveillent et dénoncent depuis longtemps les évolutions des traités et de la législation relatifs à la lutte contre le terrorisme au niveau de l'UE et du Conseil de l'Europe. Les informations tirées de leur travail ayant été intégrées dans ce rapport cherchent à illustrer la tendance régionale en faveur d'une sécurisation profonde et permanente.
Signer la pétition : stop à l'utilisation abusive des lois antiterroristes en Hongrie
Une étude sur des mesures juridiques précises
Le rapport s'intéresse aux mesures de ce processus de sécurisation qui :
sont passibles d'une sanction pénale ;
sont, dans les faits, passibles d'une sanction pénale et devraient donc comprendre les garanties qui accompagnent les sanctions pénales ;
et limitent l'exercice d'un droit fondamental d'une manière qui le restreint de façon disproportionnée ou qui l'anéantit quasiment (par exemple, une interdiction générale de manifester).
Le rapport ne décrit ou n'analyse pas d'autres types d'initiatives. Par exemple, il ne traite pas des mesures « douces » visant à identifier les individus « radicalisés » ou les personnes susceptibles d'être identifiées ainsi. Il ne s'intéresse pas non plus aux projets souvent décrits comme destinés à « prévenir l'extrémisme violent » ou à « lutter contre l'extrémisme violent ».
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L’ensemble des pays européens concernés par l‘étude
D'autres organisations de défense des droits humains et de plaidoyer se sont déjà employées à analyser ces programmes de manière détaillée. Ce rapport tient compte de tels programmes et précise, lorsque cela est pertinent, les liens inextricables qui existent entre ceux-ci et les mesures répressives dont il est question.
Tous les États membres de l'UE ne sont pas mentionnés dans ce rapport, mais la quasi-totalité d'entre eux a promulgué des projets de loi, adopté des lois et mis en œuvre des opérations de sécurité similaires à ceux décrits dans ce rapport.
En ce qui concerne la criminalisation des voyages et d'autres actions associées au phénomène que certains désignent sous le nom de « combattants terroristes étrangers », chaque membre de l'ONU, y compris les membres de l'UE, est contraint par la résolution n° 2178 du Conseil de sécurité de l'ONU de promulguer des lois pour ériger en infraction de telles activités. Si un État membre de l'UE n'est pas mentionné dans ce rapport, c'est principalement à cause d'un manque d'accès aux informations pertinentes dans cet État, cela ne veut absolument pas dire que cet État a résisté à la tendance à la sécurisation.