L’invasion de l’Ukraine par la Russie constitue un crime d'agression selon le droit international. Quant aux victimes de crimes de guerre, elles sont chaque jour plus nombreuses. Face à la gravité de la situation, la Cour Pénale Internationale, saisie par 39 de ses États membres, a annoncé l’ouverture d’une enquête sur la situation en Ukraine. Un signal fort pour tous les auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité dans ce conflit.
L’attaque de la Russie contre l’Ukraine : un crime d’agression
L’invasion de l’Ukraine par la Russie est grave. Mais surtout, elle se définit par une seule caractéristique : l’agression. Or, cet acte d’agression est un crime de droit international : c'est un "crime d'agression".
👉 La Charte des Nations Unies interdit tout acte d’agression. On entend par "acte d’agression", l’emploi par un État de la force armée contre la souveraineté, l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’un autre État. Les seules exceptions sont la légitime défense et un recours à la force autorisé par le Conseil de sécurité des Nations unies. Or, aucune des deux ne s’applique à la crise actuelle.
👉 Le statut de Rome de la Cour Pénale Internationale (CPI) réprime le "crime d'agression". Il précise que "l’invasion ou l’attaque par les forces armées d’un État du territoire d’un autre État" constitue un crime d'agression.
Des actes constitutifs de crimes de guerre
Depuis le début de l’invasion russe, le 24 février, nous recueillons des informations sur les violations du droit international humanitaire et du droit international des droits humains. Nos recherches, étayées notamment par notre Crisis Evidence Lab qui analyse des preuves numériques (photos, vidéos et images satellites), ont déjà permis d’attester de plusieurs frappes aveugles menées par les forces russes en Ukraine contre des zones et infrastructures civiles ou des lieux protégés comme des hôpitaux et des écoles. Ces frappes illégales ont causé la mort de plusieurs civils, dont des enfants.
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L’analyse des preuves numériques nous a également permis d’identifier le type d’armes utilisées lors de ces attaques aveugles. Nos recherches ont mis à jour l’utilisation par les forces russes d’armes frappant sans discrimination, dont l’usage à proximité de zones densément peuplées est interdit par le droit international. Mais également l’emploi d’armes strictement interdites telles que les bombes à sous-munitions.
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Toutes ces violations du droit international humanitaire imputables aux forces russes sont graves et sont susceptibles de constituer des crimes de guerre.
Les responsables présumés de ces crimes, bientôt face à la justice ?
Concernant le crime d’agression
À moins que le Conseil de sécurité des Nations Unies ne saisisse la Cour Pénale Internationale (CPI) - ce qui est peu probable étant donné que la Russie est un membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU - la Cour ne sera pas compétente pour juger le crime d’agression dans cette situation.
Cependant, un certain nombre d’États, parmi lesquels l’Ukraine, sont dotés de lois qui permettraient de poursuivre les responsables présumés de ce crime.
La Cour Pénale Internationale (CPI) est une juridiction permanente indépendante instaurée par la communauté internationale pour poursuivre et juger les responsables des crimes les plus graves relevant du droit international, à savoir le crime de génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et le crime d’agression.
La CPI est compétente pour juger les crimes de guerre et crimes contre l’humanité perpétrés en Ukraine, qui a déclaré en 2015 accepter la compétence de la CPI pour les crimes commis sur son territoire depuis le 20 février 2014. La Russie a signé le Statut de Rome en 2000 mais a retiré sa signature en 2016.
Concernant les possibles crimes de guerre
Le lundi 28 février, le Procureur de la CPI a annoncé qu’il allait demander l’autorisation d’ouvrir une enquête sur la situation en Ukraine. Le 2 mars, il a confirmé l’ouverture de cette enquête, après avoir été formellement saisi de la situation en Ukraine par 39 Etats membres de la CPI. C’est un signal fort pour tous les auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité en Ukraine - y compris les hauts représentants de l’État dont la responsabilité est la plus engagée – qui seront amenés à rendre des comptes à titre individuel.
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En Ukraine, les victimes de ces crimes doivent entendre que nous sommes là
« En moins d’une semaine, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a déclenché une crise de très grande ampleur sur le plan humanitaire, des droits humains et du déplacement, qui a les caractéristiques de la pire catastrophe de ce type de l’histoire récente de l’Europe, a déclaré Agnès Callamard, notre secrétaire générale. Non seulement la Russie porte atteinte à la souveraineté d’un pays voisin et de son peuple, mais elle remet aussi en question la structure de la sécurité mondiale et exploite ses faiblesses, notamment les dysfonctions du Conseil de sécurité des Nations unies. Les conséquences pour nous toutes et tous seront durables ».
Les victimes de crimes de guerre en Ukraine sont malheureusement de plus en plus nombreuses. Nous voulons aujourd’hui qu’elles entendent notre message et celui de la communauté internationale qui est déjà déterminée à enquêter et à obtenir réparation pour leurs souffrances.
Notre collègue Oksana Pokalchuk, directrice d'Amnesty International Ukraine, témoigne et appelle le Conseil des droits de l'Homme à agir. 👇
Nos demandes
L’enquête de la CPI ne peut être menée sans aide. La collecte et la préservation d’éléments de preuve sont essentielles au succès des futures enquêtes. Elles requièrent des efforts concertés et innovants de la part des Nations unies et de ses organes, ainsi que des initiatives au niveau national en application du principe de compétence universelle.
Nous demandons à tous les États parties au Statut de Rome et à la communauté internationale dans son ensemble de coopérer avec l’enquête de la CPI.
Nous demandons aux États membres des Nations unies de condamner ensemble les crimes d’agression commis par la Russie
Nous demandons aux États membres des Nations unies de fournir secours et assistance aux civils, notamment ceux qui fuient le conflit.
Nous rappelons, en vertu du droit international, qu’il incombe à tous les États de résoudre les différends internationaux par des moyens pacifiques, et d’une manière qui ne compromette pas la paix, la sécurité, ni la justice internationales.