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URGENCE PROCHE ORIENT

Exigez avec nous la protection sans condition des populations civiles

Les partisans de l'ONG Sea-Watch tiennent des drapeaux et des couvertures de sauvetage lors d'une manifestation en solidarité avec le capitaine allemand du navire de sauvetage Sea-Watch 3, Carola Rackete, le 6 juillet 2019
Des supporters de l'ONG Sea-Watch manifestent en solidarité avec la capitaine allemande du navire de sauvetage Sea-Watch 3, Carola Rackete, le 6 juillet 2019© AFP via Getty Images
Personnes réfugiées et migrantes

En Europe, la solidarité au banc des accusés

Aujourd’hui, donner des vêtements chauds, proposer un abri ou sauver des vies en mer peut vous conduire en prison. La solidarité est plus que jamais prise pour cible par les autorités.

Dans notre nouvelle enquête « Compassion sanctionnée : la solidarité devant la justice au sein de la forteresse Europe » nous démontrons comment la police, des magistrats et des responsables politiques s'en prennent à des hommes et femmes, défenseurs des droits humains qui aident les personnes réfugiées, demandeuses d'asile et migrantes. En effet, en Croatie, en Espagne, en Grèce, en Italie, à Malte, au Royaume-Uni, en Suisse et aussi en France, des personnes sont poursuivies pour des simples gestes d’humanité.

Cherchant à dissuader des réfugiés et migrants d’arriver en Europe, les autorités considèrent comme une menace le simple fait d'aider ces personnes à se sentir accueillies ou en sécurité. Face à l'incapacité des États européens à répondre aux besoins fondamentaux des personnes réfugiées et migrantes, ce sont souvent des citoyens et citoyennes ordinaires qui se retrouvent à leur apporter l'aide et les services nécessaires. En sanctionnant ces personnes qui redoublent d'efforts pour combler leurs propres lacunes, les gouvernements européens exposent les personnes déracinées à un danger encore plus grand.

Des sauveteurs en mer poursuivis

En Italie, des sauveteurs portant secours aux personnes réfugiées et migrantes en mer ont été la cible de campagnes de dénigrement, d'enquêtes pénales, et ont été bloqués en mer sans possibilité de débarquer les personnes secourues dans un port sûr.

Depuis août 2017, les autorités italiennes ont saisi à maintes reprises des navires affrétés par des ONG, réduisant le nombre de bateaux disponibles pour des opérations de secours, alors même que le nombre de décès en mer a augmenté en 2018 et 2019.

C’est notamment le cas pour les membres de l’équipage du bateau Iuventa qui ne peuvent plus retourner en mer pour sauver des vies car leurs actions font l’objet d’une enquête depuis plus de deux ans et demi. Pourtant, ce bateau a pu sauver plus de 14 000 personnes.

En Grèce, Sarah Mardini et Seán Binder, formés au sauvetage en mer, ont passé plusieurs mois en détention provisoire après leur arrestation par les autorités grecques pour avoir aidé des réfugiés arrivant sur l'île grecque de Lesbos. Accusés sans fondement d'aide à l'entrée irrégulière et d'espionnage, entre autres, ils sont toujours en attente de leur procès.

Nous nous sommes portés bénévoles pour aider les personnes dans le besoin. Nous risquons vingt-cinq ans de prison pour avoir secouru des gens, mais si vous me demandiez aujourd'hui si j'agirais autrement, sachant que ma vie pourrait en être bouleversée, je vous répondrais que je ferais exactement la même chose.

Sarah Mardini

Carola Rackete, la capitaine du Sea Watch 3 qui a été arrêtée par les autorités italiennes résume la situation : « À chaque fois qu’une ONG sauve des vies, il y a des enquêtes, pendant que les autorités libyennes n’ont pas à rendre des comptes. »

Les autorités espagnoles, quant à elles, ont utilisé de manière abusive des lois administratives pour restreindre les activités de secours des navires des ONG, les menaçant d'amendes pouvant atteindre 901 000 euros.

Trois adolescents emprisonnés

En mars 2019, des personnes réfugiées et migrantes se sont opposées à la décision du capitaine du cargo El Hiblu, qui entendait les ramener illégalement en Libye après les avoir secourues en mer, malgré les risques très concrets de torture et d'autres atteintes aux droits humains.

Quand le cargo a finalement accosté à Malte, trois adolescents faisant partie des personnes secourues ont été arrêtés par les autorités maltaises et accusés d'avoir détourné le navire.

Actuellement sous le coup de charges disproportionnées, ils risquent la réclusion à perpétuité, notamment en vertu de lois antiterroristes. Pourtant, aucun élément ne permet à ce jour d'affirmer qu'ils ont fait usage de violence ou mis quiconque en danger.

Des ONG harcelées

Le droit pénal a aussi été utilisé de manière abusive pour attaquer et harceler des organisations de la société civile. En Croatie, les ONG Are You Syrious et Centre d'études pour la paix (CMS) ont fait l’objet de manœuvres d’intimidation et de harcèlement et ont été traînées devant les tribunaux pour « aide à l’immigration irrégulière ». Elles avaient recueilli des informations et témoigné sur des cas de renvois forcés illégaux pratiqués au moyen d'une force excessive par la police aux frontières avec la Bosnie-Herzégovine et la Serbie.

Faire vivre la fraternité

Les autorités doivent cesser de traiter les défenseurs des droits humains comme des délinquants.

Confrontés à des amendes et à des frais de justice, les défenseurs des droits humains et les ONG qui sont poursuivis sont contraints d'utiliser une partie du temps et des ressources limités normalement destinées à leur travail humanitaire pour se défendre contre des accusations infondées et, dans le cas des organisations de secours en mer, pour récupérer leurs navires.

De nombreuses personnes en Europe ont fait preuve d'une compassion et d'une humanité bien plus grandes que celles de leurs gouvernements à l'égard des étrangers en quête de sécurité. Il est scandaleux que des défenseurs des droits humains soient pris pour cible par des pouvoirs publics dépourvus d'humanité, déterminés à fermer leurs frontières à tout prix, y compris au prix de vies humaines.

Agir

PROTÉGEONS LES DÉFENSEURS DES DROITS DES MIGRANTS

Les personnes et organisations en France, qui défendent les droits des personnes exilées (migrants, réfugiés) font l’objet de pressions de plus en plus importantes en raison de leurs actions pacifiques et désintéressées.